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Sommes-nous au bord d´un embrasement du monde ? Depuis qu´au lendemain des attentats revendiqués par Al Qaida, le président Bush a déclaré une « guerre sans fin » contre le terrorisme et les pays de l´« axe du mal » qui a débouché sur l´invasion de l´Irak, de nombreuses voix se sont élevées en Amérique pour interpeller l´Europe : elle devrait exercer une médiation, fournir un contrepoids, pour retenir les États-Unis sur la pente de la militarisation et d´une remise en question des droits démocratiques, et préserver le monde entier d´une polarisation irrémédiable entre « civilisations » hostiles.
À cette demande, les experts en stratégie répondent que le décalage entre le poids économique de l´Europe et sa faiblesse militaire rend illusoire toute perspective d´influence dans les affaires mondiales. Étienne Balibar choisit de s´en saisir pour repenser les relations entre identité collective et puissance, constitutives du concept même de politique. La voie qu´il explore est celle d´une « anti-stratégie », dans laquelle les exigences de l´action primeraient sur celles de l´homogénéité culturelle et de la forme constitutionnelle, de façon à ouvrir une alternative dans le cours actuel de la « mondialisation ».
Tout en s´inspirant des leçons de l´histoire (guerres nationales, colonisation et décolonisation, institutionnalisation des conflits), son propos s´articule autour de quatre propositions: sécurité collective dans un « ordre public international », relance du désarmement universel progressif et contrôlé, primat de la politique locale sur l´exploitation globale des « nouveaux conflits », construction de l´ensemble euro-méditerranéen comme exemple de réduction des « fractures » de civilisation. L´Europe n´a pas de frontières assignables, elle est elle-même une frontière géopolitique. Elle n´a pas d´avenir comme « grande puissance », mais - à l´instar d´autres régions du monde - comme force de traduction et de médiation, vouée à disparaître dans ses propres effets.
« Une sorte de réplique aux équations simplistes, mais politiquement dévastatrices, d'un Robert Kagan, qui oppose l'Europe pacifiste, naïve, irresponsable et somme toute décadente, à une Amérique puissante, virile, qui est, elle, capable d'employer la force pour résoudre les conflits. » LE NOUVEL OBSERVATEUR
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