"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Un îlot en chantier. Un plan d'architecte... Rendez-vous 168 rue de Crimée dans le dix-neuvième arrondissement de Paris. Un toit-manteau de cuivre-gold. Un couple qui dort à la belle étoile sur une log- gia. Le piano d'Anton Tchekhov dans sa datcha blanche...
Aux 212 fenêtres du bâtiment répondent les 212 petites narrations, visions et fragments de ce livre pour imaginer la vie rêvée de ses habitants, pour raconter les transformations d'un immeuble parisien par l'architecte Sarah Bitter - tout en donnant des coups de sonde dans le passé du quartier. On pense alors à la Vie mode d'emploi de Georges Perec, cette tentative d'inventaire et d'épuisement d'un immeuble parisien, de ses vies, de son plan en coupe... Sous une forme miniature, Villa Crimée s'attache aux mêmes principes.
Célia Houdart offre ainsi son premier texte écrit à la première personne. On suit, entre réalisme et somnambulisme léger, ses déambulations et rêveries intimes dans le temps et dans l'espace, à travers des sensations, des réminiscences littéraires, cinématographiques ou musicales.
Ce livre est né d'une commande de Sarah Bitter, architecte (agence Metek) et d'un film, Crimée enchantée. Histoire(s) d'une architecture, de Sophie Comtet Kouyaté, sur une idée originale de Sarah Bitter (2017, disponible en dvd).
Est-ce parce que le sujet rencontre un quotidien parisien très actuel soit celui des constructions d’immeubles et réhabilitations de logements sociaux qui en ce moment, impactent tous les quartiers de la capitale ou est-ce que le titre « Villa Crimée » m’a plu, toujours est-il que j’ai tendu la main vers ces 86 pages éditées chez P.O.L. En les feuilletant, je me suis retrouvée dans des pensées communes, venant de vivre la réhabilitation de mon propre immeuble, éveillée par la curiosité de Paris et son évolution actuelle mêlant l’ancien et l’architecture moderne sans compter que l’écriture m’apparut tout à fait agréable dotée d’un style original et personnel. Alors, j’ai acheté le livre et ce dimanche matin, j’ai aimé me faire conduire dans ce courant de pensées errantes face aux travaux du 168 rue de Crimée, son Histoire, son quartier présent et passé, ses habitants, sa réalité et sa fiction.
Rendant un effet rythmé, de nombreuses courtes phrases commençant par « J’admire » suivi d’un complément d’objet direct, introduisent l’idée d’une âme dans la construction du bâtiment mais aussi dans celle du livre, la construction de soi, de chacun et de la communauté qui va émaner en se renouvelant et s’ouvrir à l’espace d’une nouvelle clarté et le souhait d’une vie améliorée.
« J’admire un ancrage. » « J’admire une respiration. » « J’admire une hauteur. » « J’admire une aspérité. » « J’admire une intensité. » « J’admire une liberté » Etc.
En réponse à une commande littéraire de l’architecte Sarah Bitter, l’auteure va décider de : « Je décide de créer autant de fenêtres imaginaires qu’il y a de fenêtres dans le site. Fenêtres depuis lesquelles j’observai, comme à travers une longue-vue, l’histoire du lieu et la longue vie de ses habitants. »
« Mon carnet, moins solide qu’une maison, plus léger qu’un ordinateur, et que je rafistole comme une cabane, est l’abri de fortune où j’écris, habite et me construis. »
Belle curiosité au bardage et toit-manteau de cuivre gold à travers une multitude de fenêtres percées, que Célia Houdart, généreuse à partager ses connaissances culturelles, a su faire refléter à l’encre d’une belle plume !
Ce livre n’est pas sans rappeler le manque de logements ou les logis insalubres. L’auteure rend donc hommage à l’architecture moderne d’une de ces nombreuses réhabilitations de logements sociaux.
« Ce qui suit est un point de vue sur une réalité en même temps qu’une fiction. »
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