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C'est une histoire vraie que nous livre ici l'auteur, une histoire pleine d'émotion et d'humanité où, grâce à des souvenirs étonnamment précis, elle fait revivre son enfance et surtout sa grande soeur Bongsun qui l'a initiée au monde et à la vie. Bongsun a connu la maltraitance, l'abandon et la faim dès son plus jeune âge. A sept ans elle s'est enfuie d'une famille où elle avait été placée, qui la battait et l'affamait, pour se réfugier auprès de la mère de Jjang (surnom d'enfance de l'auteur). La petite Jjang, très attachée à elle, la considère comme sa grande soeur et partage des moments forts et tendres avec elle. Pour autant, Bongsun n'occupe pas une place égale à celle des autres enfants dans la famille, elle reste une subalterne, une petite bonne.
Tel un chat qui quitte des maîtres négligents pour se trouver un nouveau toit, Bogsun, maltraitée et affamée par sa famille d'accueil, a choisi la famille de Jjiang-a pour fuir ses bourreaux. Chez Jjiang-a on est pauvre mais généreux. Le père poursuit ses études aux Etats-Unis, la mère travaille au marché, la famille vit en location dans un sombre sous-sol mais Bogsun y reçoit chaque jour sa part de riz.
Elle avait 12 ans à la naissance de Jjiang-a et c'est tout naturellement qu'elle a pris la petite en charge, la promenant sur son dos, la nourrissant et l'endormant au son de ses histoires. Jjiang-a grandi avec cette sœur qu'elle suit partout, partageant son lit, ses secrets et ses escapades nocturnes. Pourtant, avec le retour au pays du père, la situation change. A mesure que la famille prospère, déménage dans un meilleur quartier, devient propriétaire, Jjiang-a prend conscience que Bogsun n'est pas vraiment sa sœur, plutôt une domestique que l'on tolère par pure bonté, pour finir par devenir une charge indésirable...
Quelque quarante ans plus tard, Jjiang-a, auteure reconnue, engagée contre la dictature, raconte sa ''très chère grande sœur'' dont le sourire et l'optimisme ont illuminé son enfance. Et pourtant, comme le reste de la famille, elle s'en est détachée, allant jusqu'à l'effacer de sa mémoire. Compagne de misère, Bogsun en est aussi le témoin gênant et ne saurait les suivre dans leur ascension sociale. C'est aussi ce que décrit Jjiang-a : la Corée du Sud des années 60, la pauvreté extrême, la solidarité, l'ambition de s'en sortir et la perte des valeurs de ceux qui s'enrichissent.
Une écriture simple pour dire l'insouciance et l'amour inconditionnel de l'enfant, mais aussi le rejet, la honte et la culpabilité de l'adulte. Beaucoup de profondeur et de sentiments pour cette auteur qui sait toujours toucher au cœur. Même s'il n'a pas la puissance de Nos jours heureux, Ma très chère grande sœur est un beau roman au ton doux-amer. Bogsun, durement marquée par la vie mais toujours solaire et souriante restera longtemps dans l'esprit du lecteur.
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