"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Adriana, une jeune femme roumaine, vit depuis quelques années à Bruxelles après avoir échappé à un viol collectif et à la prostitution forcée. Malgré son désir de vengeance, elle a trouvé un équilibre entre son travail de nounou dans une famille discordante d´expatriés allemands et son petit ami Gaston, un homme stable et aimant. Cette stabilité vacille quand elle doit prendre en charge son fils Cosmin. Le garçon de 11 ans, qui a grandi chez ses grands-parents en Roumanie, se réjouit du voyage, mais son séjour ne se déroulera pas comme il l´avait espéré.
Adriana vit à Bruxelles où elle a fini par se trouver une vie qui lui convient, après des années difficiles, d’abord en Roumanie, puis à son arrivée en Belgique. Mais cela, on ne l’apprend que petit à petit. Adriana garde une petite fille chez un couple aisé venu d’Allemagne, elle fréquente Gaston, qui lui apporte de la quiétude. Mais voilà que les parents d’Adriana lui demandent de venir chercher Cosmin, son fils de onze ans, dont la grand-mère, immobilisée par une fracture, ne peut plus s’occuper. Et là, l’équilibre précaire de la vie d’Adriana va avoir bien du mal à tenir.
« Comme si souvent, Stefan est allé se coucher avant vingt-trois heures. Le sommeil est sa deuxième fixation après l’alimentation saine. Ah, Nina oubliait la condition physique, d’importance cruciale aussi. Il faut rester fit. Fit est l’un des mots préférés de Stefan. Nina par contre le déteste. »
Ce roman a un petit air de Chanson douce au début, en moins frontal, et je peux vous assurer que tout va y être différent, si ce n’est la description fine des rapports entre patrons et employée de maison, surtout lorsque cette dernière a en charge une grande partie des soins à l’enfant. Sous forme chorale, le roman présente des personnages immédiatement intéressants, que la plume acérée de Verena Hanf rend attachants ou bien odieux… puis elle nuance à plaisir cette première impression.
C’est vraiment bien observé et bien écrit à la fois, d’une lecture facile et prenante, mais sans facilités d’écriture ni clichés.
Roman choral dans lequel toute l'histoire se dévoile petit à petit et à travers tous ses personnages. Adriana, emplie d'une colère qu'elle parvient à dominer à force de volonté. Adriana la froide, la femme dure avec elle et avec les autres, qui a vécu l'horreur et ne vit qu'avec l'espoir de se venger. Nina, sa patronne, psychologue, alcoolique, femme qui ne supporte plus son mari, sa vie, elle-même. Stefan, avocat, père et mari absent, à la vie millimétrée, organisée, rigoureuse. Mathilde, la petite fille délaissée, capricieuse et terriblement seule. Doriana et Mihai qui adorent leur petit-fils Cosmin qui le leur rend bien et qui ont du mal à se faire à son départ, fut-il temporaire. Et Gaston, l'amoureux, tendre et patient qui ne parvient pas à comprendre les réactions et les silences d'Adriana. Toutes ces personnes sont tour à tour les mains avec lesquelles ce roman s'écrit, Adriana étant la personne autour de laquelle tout s'articule. Mis à part Gaston et Cosmin et les grands-parents, ils sont à un moment tous agaçants et attachants. Qu'ils montrent ou pas leurs fêlures, leurs faiblesses. Tous révèlent leur personnalité, parfois la plus profonde dans ces journées particulières, leurs peurs, leurs questionnements, leurs doutes. Pour certains, la pente sera difficile à remonter, pour d'autres ça semble mieux engagé.
J'aime bien cette alternance des personnages qui donne des vues différentes d'une même situation et de la personnalité de chacun. Verena Hanf écrit simplement, son texte est fluide et tout se déroule admirablement. L'on aurait pu se contenter de ce qui se présente au début comme des tranches de vies qui s'entrecroisent, mais elle y ajoute un petit truc, une tension qui monte doucement et l'on subodore, l'on attend le fait, le moment où tout risque de basculer pour l'un ou plusieurs d'entre eux. Et comme ils sont bien sympathiques, l'on espère que ce ne sera point trop grave.
Un très beau roman avec des personnages fictifs tellement réels. De ceux qui laissent des traces dans les têtes des lecteurs, durablement. Et quel beau titre tant on a l’impression qu’ils avancent sur un fil.
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