"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
« Je suis laid, depuis le début. On me dit que je ressemble à ma mère, qu'on a le même nez. Mais ma mère, je la trouve belle. » Ressources inhumaines, critique implacable de notre société, a imposé le ton froid et cruel de Frédéric Viguier dont le premier roman se faisait l'écho d'une « humanité déshumanisée ». On retrouve son univers glaçant et sombre, qui emprunte tout à la fois au cinéma radical de Bruno Dumont et au roman social.
Mais au drame d'un bourg désindustrialisé du nord de la France, Frédéric Viguier ajoute le suspense d'un roman noir. Dès lors, l'histoire d'Yvan, un adolescent moqué pour sa laideur et sa différence, accusé du meurtre de son petit voisin, prend une tournure inattendue.
Le Norrrd.
Yvan est un ado complexé, laid, renfermé.
Il vit chez ses parents.
Sa mère, qui sculpte des figurines avec du beurre et qui l'envoie fouiller les poubelles à la recherche de boîtes de Camembert.
Son père, un type borné et réactionnaire.
Non loin de chez eux, un enfant est retrouvé assassiné.
La famille est interrogée.
Un engrenage implacable se met alors en branle.
La mère se perd dans ses déclarations, ment, revient sur ses propos.
Le fils se contredit, sur les mensonges de sa mère s'appuie.
S'ensuivront alors de longs interrogatoires...
Yvan s'accuse. Puis clame son innocence.
Garde-à-vue.
Inculpation.
Détention.
Est-il victime ? Est-il coupable ? ...
Manipulations, retournements de situation, mensonges, doutes...
Un roman court (190 pages) et efficace.
Une misère sociale écrasante.
Une plongée dans les rouages du système policier, du système judiciaire.
De ceux qui préfèrent les aveux aux preuves.
De ceux qui, pour avoir un coupable, font tout ce qu'ils peuvent.
Rédigé à la première personne, le récit nous fait suivre les mécanismes psychologiques d'Yvan.
L'auteur nous balade jusqu'à la toute dernière page, tous derniers mots... Une claque !
.
Je passe aux aveux...
J'ai dévoré ce livre en un rien de temps. J'ai même évité de me re-coucher, à 6H30, un dimanche matin, pour le terminer.
C'est dire ô combien j'ai apprécié !
« Je suis laid, depuis le début. On me dit que je ressemble à ma mère, qu’on a le même nez. Mais ma mère, je la trouve belle. Elle est courageuse, si différente de moi. » Ainsi débute le récit du narrateur, Yvan Gourlet, que Frédéric Viguier met remarquablement en scène dans Aveu de faiblesses.
Nous sommes dans le nord de la France, à Montespieu-sur-la-Dourde, un village qui ne vit que grâce à l’usine qui fait travailler mais qui pollue la rivière. Yvan a 16 ans et sa mère a deux passions : elle collectionne les étiquettes de camembert, la tyrosémiophilie, et sculpte le beurre. C’est assez original mais c’est surtout un problème pour Yvan qui va récupérer des boîtes de camembert derrière l’usine de son père, doit manger beaucoup de matière grasse pour faire plaisir à sa mère et prend du poids…
Yvan subit sans cesse vexations, moqueries et brutalités. Sa mère lui dit qu’il est un génie mais jamais devant les gens. Il est élève au lycée professionnel de Lille : « une demi-heure en voiture et plus d’une heure en car scolaire… » Le frère aîné travaille dans une boulangerie industrielle et vit à Lille où il va bientôt se marier.
Cette petite vie médiocre aurait pu se poursuivre péniblement lorsque la PJ de Lille débarque parce que le petit Barral a été découvert, assassiné, derrière l’usine où travaille son père. Chaque jour, Yvan passe devant la maison des Barral et Romain, avec son frère aîné, se moquent de lui, lui lancent des cailloux. Yvan sait aussi que le père Barral frappe sa femme.
Dès le premier interrogatoire, on sent qu’Yvan est poussé à la faute avec cet inspecteur Grochard, rude et spécialiste des aveux obtenus coûte que coûte. Le récit est poignant, émouvant, prenant aux tripes tellement Yvan se laisse berner par les ruses habituelles de la garde à vue : promesses non tenues, menaces, policier méchant remplacé par un gentil et conditions de détention inhumaines.
Bien sûr Yvan se contredit, ne répond pas aux questions essentielles et se laisse endormir par un avocat « cher » qui ne veut déplaire à personne, ni au juge, ni aux policiers. Il ne pense qu’à ses parents mais se sent « dramatiquement insignifiant, ridicule et misérable. » Ayant avoué comme exigé, il se retrouve devant une cour d’assises.
Frédéric Viguier décortique bien le mécanisme qui consiste à faire croire en la justice alors que ce n’est qu’une institution judiciaire qui mène sa barque comme elle l’entend, faisant défiler enquêteurs et soi-disant experts pour bien renforcer l’accusation.
Suit la prison et la double ou triple peine infligée par d’autres personnes détenues à ceux qui paraissent plus faibles. Grâce à ses talents de menuisier, Yvan se révèle et l’auteur, de rebondissement en rebondissement surprend énormément au final. J’ai cru tomber de ma chaise !
Un roman remarquable qui fait froid dans le dos. C’est froid, c’est cruel, à la limite du soutenable mais tellement bien analysé.
Frédéric Viguier décrit de manière bouleversante la réalité des faibles et les pires dessous du genre humain. Il nous fait vivre une véritable mascarade judiciaire et montre que lorsque la machine judiciaire se met en marche, on peut facilement se faire broyer.
Aveu de faiblesses est un livre qui marque profondément et qu’on ne risque pas d’oublier.
Chronique illustrée à retrouver sur : https://notre-jardin-des-livres.over-blog.com/
Attention : gros coup de cœur pour ce roman qui tient à la fois du genre policier et de la critique sociale.
Yvan Gourlet, seize ans, adolescent très mal dans sa peau, est le narrateur de l’histoire.
Il faut dire qu’à Montespieux-sur-la-Dourde, petite ville tristounette à une demi-heure de Lille, entre un père ouvrier chez Boulonex qui « cherche l’ivresse pour oublier la grisaille », puis urine sous le lampadaire avant de rentrer chez lui et une mère passionnée par la confection de sculptures d’animaux dans des mottes de beurre (oui, oui, vous avez bien lu !) et par sa collection d’étiquettes de boîtes de camembert (la tyrosémiophilie… j’ai appris un mot !), la vie n’est pas bien folichonne.
Et puis, le beurre, après, il faut le manger et les camemberts aussi, alors, évidemment, Yvan n’a pas une taille de guêpe ! Et en plus, il est laid. « Depuis le début on se fout de mon nez, qui est trop long, et de mes jambes, qui sont tordues, et de mon ventre, qui est gros, et de mes cheveux, qui sont trop roux, et de moi, qui ne parle jamais. On me regarde avec dégoût. Plus tard, en plus du regard, il y a eu les mots. Ensuite, en plus des regards et des mots, il y a eu les coups. »
Pas de copains, pas de petite amie, juste une mère aimante, voire étouffante, qui lui répète à longueur de journée qu’il est le plus intelligent du monde et qu’il a des dons qui ne cherchent qu’à s’exprimer… Il faut simplement être patient … Mais Yvan en doute.
Alors pour faire plaisir à sa mère, il fouille les poubelles pour trouver des boîtes de camembert et il mange les tartines de beurre qu’elle lui propose.
Bref, une adolescence plutôt morne et solitaire…
D’ailleurs, son frère aîné l’a prévenu : pars le plus vite possible, tu vas devenir fou dans ce trou. « Il faut que tu fasses comme moi, Yvan, lui conseille-t-il, trouve-toi vite un travail, et dégage de là, sinon tu vas finir comme eux, enfermé sur toi-même. C’est un conseil que je te donne, si tu veux continuer de les aimer, éloigne-toi de papa et maman, sinon tu vas finir par les haïr. Loin des yeux, c’est ce qu’il faut, pour ne pas en vouloir à ceux avec qui on a vécu. »
Mais Yvan reste et continue d’être moqué, harcelé, frappé par les gamins du quartier.
Un bouc émissaire idéal : « J’ai attiré très jeune la haine, le mépris, l’aversion, tous les ingrédients de la passion inversée. » Auprès de ses parents, il se sent protégé et n’a pas envie de quitter ceux qui sont finalement son seul soutien.
Or, un soir, un camion de police se gare devant la maison et la vie d’Yvan va basculer…
Évidemment, je ne vous en dirai pas plus, suspense oblige…
Si vous connaissez les films de Bruno Dumont qui dénoncent la misère sociale et culturelle, alors vous y êtes. C’est bien noir, bien glauque. D’une espèce de huis clos familial étouffant et totalement déprimant, on sombre petit à petit dans un enfer où la justice est un vrai cauchemar kafkaïen. Le tout nous serre la gorge et l’on se demande où cette sinistre affaire va nous mener et, je l’avoue, on n’est pas au bout de nos surprises…
Ce récit à la première personne, second roman de l’auteur après Ressources inhumaines, nous fait suivre de près les mécanismes psychologiques d’Yvan : c’est passionnant et parfaitement maîtrisé.
Noir à souhait, machiavélique et glaçant !
Un régal !
Lireaulit: http://lireaulit.blogspot.fr/
"Je suis laid, depuis le début". C'est ainsi qu'Yvan commence un récit absolument glaçant de réalisme cruel. Moqué, méprisé, repoussé "depuis le début", il met une confiance innocente et entière en sa mère qui, seule, semble l'aimer tel qu'il est. Une mère qui s'occupe à un passe-temps étrange : le modelage de mottes de beurre. Mais ce-faisant, ne modèle-t-elle pas aussi la silhouette de son fils, engraissé à force d'ingurgiter les molles sculptures ? Et la collection maternelle d'étiquettes de boîtes de camembert n'est-elle pas aussi une manière détournée de façonner son fils, de lui attribuer le rôle de la victime ? Une victime qui passe au statut de suspect puis de coupable tout désigné lorsque le cadavre d'un jeune garçon est découvert. Justement l'un de ceux qui lui jetaient des cailloux et le harcelaient... Accusé, Yvan découvre alors le double langage des policiers mais aussi de sa famille. Un double langage qui peut le perdre... ou le fortifier.
Brrr... il fait frissonner ce roman de Frédéric Viguier qui joue de tous les ressorts de la dissimulation et de la perfidie jusqu'à la chute abasourdissante. Il nous emmène aux confins du malaise, de l'inconfort, et nous laisse abusés et pantelants, nous interrogeant sur le mécanisme qui nous a bluffés. On remonte le fil, on rejoue le drame et rien n'y fait : on n'a rien discerné de cet engrenage machiavélique ! Manipulés, nous sommes ! Comme Yvan et comme son entourage. Enfermés dans des idées préconçues qui nous empêchent de voir au-delà de ce qui nous est habituel. Comme Yvan et son entourage. Naïfs présomptueux qui confondent réalité et trompe-l'œil. Comme Yvan et son entourage. Comme tout le monde. Et ça fait franchement un peu peur !
Il n'a pas un physique facile, Yvan : gros, roux, laid, des pantalons trop courts. On sent bien qu'il a le QI au ras des pâquerettes : pas un seul copain au lycée, une maman qu'il vénère et qui réalise des sculptures dans du beurre et collectionne les étiquettes de fromage. Il n'aime pas trop qu'on se moque de lui et c'est ce que font la future victime et son frère.
Alors Yvan devient vite le coupable idéal quand on découvre le meurtre de son petit voisin. D'autant qu'il coopère gentiment : il veut bien tout avouer du moment qu'il croit dormir dans un bon lit et retrouver vite sa maman...Et comme pour le flic qui l'interroge, il vaut mieux des aveux que des preuves, l'affaire pourrait être rondement menée !
Ce roman est malin : à la fois photographie sociale d'une marge de la France (le chômage rôde, l'échec scolaire, la violence familiale), critique des failles de la justice et de l'univers carcéral, il prend des allures de polar et sa narration est addictive : rythme trépidant, suspense latent.
Mais il étonne : on est tour à tour compatissant aux malheurs d'Yvan Gourlet, moqueur (cet anti-héros est une vraie tête à claques !) puis sans doute un peu admiratif jusqu'à cette dernière ligne qui envoie tout valser !
Un excellent roman !!
Dans le Nord de la France , un petit garçon découvert assassiné, à la limite du quartier ouvrier, et de celui des « cadres » . Un gros benêt , pas beau, mais tellement aimé par sa mère, un peu cinglée par ailleurs.
Le décor est posé pour une enquête policière et judiciaire., l'inculpation, et pas possible d'en dire plus quant à l'intrigue elle-même.
Par contre , ce qui m'a retenue et impressionnée dans la lecture de ce roman que j'ai lu d'une traite, c'est l'écriture, précise, glaçante par son réalisme ; je n'ai éprouvé aucune empathie pour ce pauvre débile accusé de meurtre, et j'ai bien fait....
On retrouve dans ce roman tous les éléments qui font le « buzz » à notre époque actuelle.
Et c'est pour ne pas faire dans la demie - mesure je suppose que F.Viguier pousse presque les caractères jusqu'à la caricature.
Epoustouflant !
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