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"Paul Auster est devenu écrivain parce que son père, en mourant, lui a laissé un petit héritage qui l'a soustrait à la misère. Le décès du père n'a pas seulement libéré l'écriture, il a littéralement sauvé la vie du fils. Celui-ci n'en finira jamais de payer sa dette et de rembourser en bonne prose le terrifiant cadeau du trépassé." Là se trouve , Pascal Bruckner le note d'emblée dans sa lecture , la clef de voûte du système Auster. L'Invention de la solitude est le premier livre du jeune écrivain, c'est aussi le livre fondateur de son oeuvre, son art poétique. Dans les deux parties , Portrait d'un homme invisible (le père) et le Livre de la mémoire , Paul Auster interroge la mémoire familiale et met en place un univers que l'on retrouvera dans chacun de ses romans.
"L'invention de la solitude", premier livre de Paul Auster publié sous son nom, peut être considéré comme la pierre fondatrice de son œuvre. Dans cet essai, on retrouve tous les éléments et thèmes constitutifs qu'il développera tant dans ses romans que dans ses essais.
"L'invention de la solitude" est né d'une urgence, celle pour l'écrivain d'évoquer la mort de ce père étrange qui avait fait de la solitude un mode de vie, un père absent même lorsqu'il était aux côtés de sa famille. Alors que l'auteur peinait à vivre de sa plume, le décès prématuré de son père va paradoxalement lui donner une bouffée d'air salvatrice qui prendra la forme d'un petit héritage. Sans ce cadeau d'adieu, Paul Auster n'aurait peut-être pas connu la même trajectoire. Avec cet essai, il tente d'appréhender la figure fuyante de ce père dont il a vécu la disparition comme un tribut à payer.
"L'invention de la solitude" se décompose en deux parties qui se distinguent à la fois par leur forme et par leur longueur. Tandis que "Portrait d'un homme invisible" se consacre uniquement à la figure du père et assemble pêle-mêle des souvenirs, des sensations et des éléments autobiographiques, "Le livre de la mémoire" prend des atours plus philosophiques, introspectifs et lorgne régulièrement du côté de la psychanalyse à l'image de la narration exclusivement à la troisième personne du singulier.
"Portrait d'un homme invisible" plaira plus volontiers à ceux qui ont lu et apprécié "Le diable par la queue", "Pourquoi écrire" ou "Constat d'accident". "Le livre de la mémoire" est plus difficile à appréhender. Dans cette deuxième partie, Paul Auster s'interroge sur la mémoire et l'on sent à chaque raisonnement développé qu'il est à une époque charnière de sa vie, qu'il est en phase de questionnement perpétuel et surtout qu'il a accumulé une culture littéraire si immense qu'elle l'empêche d'avancer. Dans cet exercice philosophique autour de la mémoire, il pose les bases de ce que sera sa trilogie new-yorkaise à commencer par le thème central de cette dernière, l'enfermement physique et mental qu'il nomme souvent ici claustration.
Comme s'il était perdu dans un cercle, Paul Auster ébauche à n'en plus finir des hypothèses qu'il tente de prouver, une succession de pensées brillantes, de déductions qui en entraînent inlassablement d'autres. Pour parfaire sa pensée, l'auteur convoque des figures extraites de l'imaginaire, de la religion, cite nombre d'auteurs, parle abondamment de la mort, de la perte d'un enfant. Dans ce méandre de pensées, on croise Anne Franck, Pascal, Mallarmé, Beckett, Proust ou Dostoïevski et à l'image de ce "melting-pot littéraire", on passe de la lumière à l'obscurité, on dévore quelques pages avant de peiner sur les suivantes. Étrange lecture que ce deuxième livre dans le livre dont on sort exsangue tant le questionnement de l'auteur, forcément universel, finit par nous contaminer.
Je referme donc "L'invention de la solitude" avec un sentiment mitigé. Si je reconnais l'importance qu'il revêt dans l'œuvre de l'auteur, j'avoue que je me suis un peu perdu dans la deuxième partie qui remue souvent, mais ennuie parfois.
Un des meilleurs livre de cet auteur, court, bref, intense qui reste longtemps dans notre tête.
Ce premier roman subtil de Paul Auster annonçait le CHRONIQUES D'HIVER et les EXCURSIONS DANS LA ZONE INTERIEURE qui boucleront le travail remarquable sur le passé, les souvenirs et leur influence sur un auteur. Paul AUSTER était alors déjà un grand écrivain de l'intime et du labyrinthe. L'éclairage est total à ce jour sur ce qui a fait d'Auster un écrivain. Un Nobel de littérature en puissance.
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