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« Crétin des Alpes ! » Avant d'être l'une des insultes préférées du capitaine Haddock, l'expression désigne un état prononcé de dégénérescence physique et mentale, éradiqué depuis les années 1920.
Le crétinisme est l'objet d'un débat de santé publique essentiel au XIXe siècle, suscitant une « science de l'Alpe » qui pose exemplairement la question du « grand renfermement des corps » hantant le travail de Michel Foucault. Le crétin est aussi une victime, dont le sacrifice est un scandale silencieux. Il devient le cobaye de toute sorte d'expériences, pédagogiques et chirurgicales, généralement inutiles, et a été longtemps laissé dans un état débile et difforme.
Sa revanche - une forme étonnante de fierté crétine - advient peu à peu par le travail de l'imaginaire collectif, qui en fait désormais l'un des emblèmes paradoxaux de l'identité alpine. C'est ainsi que les crétins ont, de multiples façons, tendu un miroir à la bien-pensance, ce que dévoile ce brillant essai d'histoire sur le pathétique ordinaire des « anormaux ».
Antoine de Baecque, professeur à l'Ecole normale supérieure, a publié récemment La Traversée des Alpes (Gallimard), Les Godillots (Anamosa, Prix Lucien Febvre 2017) ou En d'atroces souffrances. Pour une histoire de la douleur (Alma).
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