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Fantômes

Couverture du livre « Fantômes » de Kiefer Christian aux éditions Albin Michel
Résumé:

Coup de coeur - Sélection les 20 lectures de l'été - TéléramaÉté 1945 : lorsque le soldat américain d'origine japonaise Ray Takahashi rentre du front, personne n'est là pour l'accueillir en héros sur les terres de son enfance, dans le nord de la Californie. Ses parents, après avoir été expulsés... Voir plus

Coup de coeur - Sélection les 20 lectures de l'été - TéléramaÉté 1945 : lorsque le soldat américain d'origine japonaise Ray Takahashi rentre du front, personne n'est là pour l'accueillir en héros sur les terres de son enfance, dans le nord de la Californie. Ses parents, après avoir été expulsés et enfermés au camp de Tule Lake, vivent désormais à Oakland. Mais Ray veut comprendre pourquoi leurs anciens voisins et amis ont coupé les ponts avec eux, et surtout revoir leur fille Helen, sa petite amie. C'est à ce moment-là qu'il disparaît sans laisser de traces.
Printemps 1969: de retour du Vietnam, et hanté par les fantômes de la guerre, John Frazier cherche son salut à travers l'écriture d'un roman. En s'emparant accidentellement du destin de Ray, le jeune écrivain ignore tout des douloureux secrets qu'il s'apprête à exhumer.
En revenant sur l'histoire méconnue de dizaines de milliers de Nippo-Américains internés dans des camps après l'attaque de Pearl Harbor en 1941, Christian Kiefer tisse un drame familial poignant et lumineux, qui interroge notre rapport intime à la mémoire et au passé.« Fantômes est un roman qui chante, magnifique et nécessaire. » Jesmyn WardUn roman bouleversant Télérama

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Avis (5)

  • 1945, Ray Takahashi revient de la guerre, il a combattu aux côtés des alliés, lui l’américain d’origine japonaise. Il retourne dans la ville où sa famille et lui vivaient avant leur expulsion pour le camp de Tule Lake, on s’étonne de sa présence ici, on l’ignore ou on s’en inquiète. En tout cas,...
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    1945, Ray Takahashi revient de la guerre, il a combattu aux côtés des alliés, lui l’américain d’origine japonaise. Il retourne dans la ville où sa famille et lui vivaient avant leur expulsion pour le camp de Tule Lake, on s’étonne de sa présence ici, on l’ignore ou on s’en inquiète. En tout cas, il ne passe pas inaperçu. Seulement voilà, un jour, il disparait et plus personne n’a de nouvelles.

    1969, John Frazier revient de la guerre du Viet-Nam, hanté par ses fantômes, il cherche à s’en sortir par l’écriture mais finalement, il s’intéressera au destin de Ray dont il écrira l’histoire, celle que nous lisons…

    Christian Kiefer met en lumière un fait mal connu de l’Histoire : le sort des américains d’origine japonaise pendant la seconde guerre mondiale. Je ne savais pas qu’on les avait parqués dans des camps. Je ne savais pas qu’on leur vouait une telle haine. Mais cela ne m’étonne guère. C’est simplement que je n’avais jamais pris le temps d’y réfléchir. On est au lendemain du bombardement de Pearl Harbour, les japonais sont les ennemis numéro 1.

    Décidément, les américains ont fort à faire avec leur Histoire, avec leur manière de traiter leurs minorités, de la maltraitance des Indiens que l’on parquera dans des réserves, à l’esclavage des Noirs qui auront bien du mal à survivre dans un milieu hostile et raciste, aux japonais parqués eux aussi pendant la seconde guerre mondiale…

    Ce roman a une construction qui le rend captivant. Mené comme une enquête, il nous révèlera les tenants et les aboutissants de cette énigme, au compte-gouttes, au fur et à mesure des révélations des uns et des autres. Le lecteur s’intéresse aussi bien au narrateur qui se débat avec ses démons, qu’au destin du jeune japonais. C’est un livre sur le poids des secrets, des secrets bien lourds et bien pesants qui paralysent la vie de ceux qui les portent et de ceux qui les ignorent.

    J’ai vraiment trouvé ce texte brillant, intelligent, dense. Christian Kiefer à travers ces destins croisés parvient à nous livrer un texte d’une grande émotion, il ne mise pas sur les rebondissements à outrance mais sur la profondeur des sentiments humains. Le poids de la culpabilité est analysé avec finesse, c’est celle d’un soldat qui a permis le massacre de femmes et d’enfants au Viet-Nam, c’est celle aussi de cette femme qui a caché la vérité… C’est un roman extrêmement documenté qui met aussi l’accent sur le poids de la peur et ses conséquences sur tout une société.

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  • 1945. Après la guerre, Ray Takahashi revient à Newcastle, la ville où il a grandi. Il découvre assez brutalement à quel point ce n'est plus chez lui, car l'Amérique a été odieuse avec ses citoyens d'origine japonaise, jusqu'à les interner dans des camps. Il s'en va, blessé. Personne ne le...
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    1945. Après la guerre, Ray Takahashi revient à Newcastle, la ville où il a grandi. Il découvre assez brutalement à quel point ce n'est plus chez lui, car l'Amérique a été odieuse avec ses citoyens d'origine japonaise, jusqu'à les interner dans des camps. Il s'en va, blessé. Personne ne le reverra.

    Ce roman raconte la tragédie des japonais qui avaient fait le choix de s'installer aux États-Unis. Ce pays qu'ils avaient choisi devint pour eux une terre de douleur et de honte, traités comme des ennemis, puis effacés des mémoires de ceux dont ils avaient été les voisins et peut-être les amis.
    C'est plus précisément le drame des Takahashi et des Wilson qui nous est narré, des vies et des amitiés détruites par des dirigeants imbéciles, sectaires et étroits d'esprit parce qu'effrayés par tous les japonais, quels qu'ils soient.

    Il y a de la beauté malgré tout dans ce récit, des amitiés sincères et immédiates, et sans doute des remords, racontés par une écriture magnifique. Cette écriture qui nous fait si bien ressentir toute la beauté des sentiments, de la vie, et sa lourdeur parfois aussi.

    Que c'est difficile de parler d'un tel roman ! Il contient des émotions d'une telle densité que je me suis demandé si j'allais pleurer ou hurler de rage. Rage face à la bêtise, lorsque le qu'en-dira-t-on prend le pas sur le respect, la dignité, la vie, les élans du cœur, pour ne laisser qu'un trou béant.
    Un roman où chaque mot est le bon, à la bonne place pour exprimer la profondeur des sentiments et de la douleur, pour nous permettre d'étreindre des concepts impalpables tels que le temps qui passe et à jamais perdu, l'injustice, la peur, la souffrance et les faire notre.

    Cette histoire nous immerge aussi dans l'horreur de la guerre, dans ce qu'elle a d'absurde et d'injuste, à travers la mort de tous ces jeunes, sacrifiés, au nom de quoi ?.. Par le récit de John Frazier, originaire de Newcastle, revenu du Vietnam en 1969 avec ses démons intérieurs, - qui s'intéresse au destin de Ray Takahashi -, et dont les silences et le refus d'y retourner même en pensées sont bien plus forts que des descriptions détaillées. Par contre, les représentations minutieuses des carnages dans la jungle vietnamienne m'ont donné l'impression d'appartenir à une espèce furieuse et dénaturée.

    Au fil des pages on va découvrir le terrible secret d'Evelyn Wilson…
    Humiliation, trahison, honte, chagrin, désespoir, peur, c'est tout cela qui nous est raconté ici, mais aussi dignité, amour et fidélité. Hélas, l'ampleur de la connerie humaine nous saute à la figure tout au long de ce récit.

    Ce roman est une énorme claque, et dans ce cas j'adore les claques ! Il m'a fait traverser dix milles émotions, bonnes ou mauvaises, et m'a permis de découvrir un auteur extrêmement talentueux dont la prose est sublimement poétique.

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  • Fantômes repose sur les destins croisés de Ray Takahashi et de John Frazier.
    Le premier, Ray Takahashi, a quitté sa terre californienne pour se battre en France et en Italie et, à son retour en 1945, bien des choses ont changé. Ses parents, après avoir été enfermés au camp de Tule Lake en...
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    Fantômes repose sur les destins croisés de Ray Takahashi et de John Frazier.
    Le premier, Ray Takahashi, a quitté sa terre californienne pour se battre en France et en Italie et, à son retour en 1945, bien des choses ont changé. Ses parents, après avoir été enfermés au camp de Tule Lake en raison de leurs origines nippones, suite à l'attaque de Pearl Harbor et à l'entrée en guerre des Etats-Unis, ne sont jamais revenus dans la petite bourgade où leurs enfants ont grandi. Ray croise quelques connaissances et doit encaisser des remarques désobligeantes, mais il se heurte surtout à l'animosité de Mrs Wilson, la voisine et amie de la famille qui, accompagnée de son mari, avait pourtant accueilli avec une grande bienveillance les parents de Ray bien avant que la guerre n'éclate.
    Le deuxième, John Frazier, a vécu une autre guerre, celle du Vietnam, et, en 1969, il en revient bouleversé au point de vouloir retranscrire les événements auxquels il a participé. Il ne le sait pas encore, mais c'est une autre histoire qu'il va raconter, entraîné sur les routes par sa tante Evelyn qui semble décidée à se débarrasser d'un fardeau qui l'entrave depuis de nombreuses années.
    Ils sont deux des fantômes qui hantent ce roman.
    Je n'irai pas par quatre chemins, j'ai adoré ce texte que j'ai trouvé absolument brillant. L'histoire, bien sûr, est passionnante. Je m'attendais à plus de détails historiques mais j'ai assez rapidement compris que la petite histoire allait prendre le pas sur la grande, et que les destinées individuelles allaient raconter, de manière plus puissante que ne l'aurait fait n'importe quelle précision historique, la réalité de ces familles mises au ban, considérées comme des ennemis et injustement internées. le destin de Ray m'a profondément touchée, c'est un personnage pour lequel j'ai eu une tendresse spontanée, et il en va de même pour John, son double, son miroir, que la guerre a également arraché à sa jeunesse et qui m'a immédiatement paru intéressant et sympathique. Mais surtout, c'est la narration qui m'a subjuguée. Tout y est absolument parfait, chaque phrase semble être exactement à sa place, constituant un morceau du puzzle qu'est l'enquête déclenchée par le secret de la tante Evelyn. Les analepses, les effets d'annonce, toutes les allusions - par le personnage-narrateur qu'est John - au dévoilement progressif de l'histoire de Ray, à sa compréhension profonde, toutes les émotions qu'il laisse délicatement filtrer sans jamais trop en dire, sont une véritable réussite !

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  • A sa démobilisation en 1945, l’Américain d’origine japonaise Ray Takahashi est accueilli avec défiance dans sa région natale, en Californie du Nord. Sa famille, expulsée et enfermée au camp de Tule Lake après l’attaque de Pearl Harbor en 1941, a dû s’exiler à Oakland après sa libération....
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    A sa démobilisation en 1945, l’Américain d’origine japonaise Ray Takahashi est accueilli avec défiance dans sa région natale, en Californie du Nord. Sa famille, expulsée et enfermée au camp de Tule Lake après l’attaque de Pearl Harbor en 1941, a dû s’exiler à Oakland après sa libération. Stupéfait du changement d’attitude de leurs anciens voisins et amis, désespéré de revoir leur fille Helen, sa petite amie, Ray s’attarde sur les lieux, puis disparaît sans laisser de traces. Vingt-quatre ans plus tard, John Frazier rentre traumatisé de la guerre du Vietnam et se lance dans l’écriture. Tombé par hasard sur l’histoire de Ray, il lui faut plusieurs décennies pour reconstituer les faits et découvrir ce qu’il est advenu de cet homme.

    Près de 120 000 Japonais et Américains d’origine japonaise furent déportés en 1942 dans des camps de concentration aux Etats-Unis. Les deux tiers étaient des Nisei, des Japonais de seconde génération et donc de nationalité américaine, dont une partie s’engagea sous la bannière étoilée. Après plusieurs années de détention dans de pénibles conditions, leur libération s’accompagna de grandes difficultés de réinsertion. Beaucoup avaient tout perdu, mais ils restèrent aussi longtemps en butte à l’agressivité et à la discrimination. Il leur fallut attendre les années quatre-vingt pour que l’État américain commence à reconnaître ce préjudice et ses causes raciales, dans une nation depuis longtemps en proie au fantasme du péril jaune, et rendue paranoïaque par la guerre.

    Fort d’une impressionnante documentation, l’auteur s’est inspiré de ce drame historique pour nous livrer une histoire romanesque, si habilement construite qu'elle prend toutes les apparences d’un récit autobiographique. En totale empathie avec des personnages plus vrais que nature, le lecteur est d’autant plus happé par la narration qu’il se retrouve bluffé par son absolue authenticité apparente, dans un exercice de parfaite illusion littéraire. Bâti autour d’une thématique historique déjà dramatique en soi, le récit crée une spirale infernale de plus en plus poignante, tandis que le narrateur découvre pas à pas, la plupart du temps quand ils semblent perdus à jamais, les secrets portés leur vie durant par les autres protagonistes. Tous les personnages sont restitués avec une grande finesse psychologique, leur logique et leurs motivations ne s’éclairant que progressivement, à mesure que le temps passé, la disparition des uns et des autres, et le poids des doutes et de la culpabilité, favorisent enfin la prise de recul et la libération de la parole.

    Enchanté par la perfection architecturale du récit, par la profondeur des personnages et par la vérité de la restitution historique, c’est avec émotion que l’on se plonge dans cette narration addictive aux effets dramatiques en cascade. Rares sont les créations romanesques suscitant une telle impression de réalité. Coup de coeur.

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  • J'aime lorsque la littérature s'immisce dans les angles morts de l'Histoire. Christian Kiefer choisit ici de mettre en lumière un fait plutôt méconnu ( également traité par Julie Otsuka dans l'excellent Quand l'empereur était un dieu ) : le terrible sort des nippo-américains durant la Deuxième...
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    J'aime lorsque la littérature s'immisce dans les angles morts de l'Histoire. Christian Kiefer choisit ici de mettre en lumière un fait plutôt méconnu ( également traité par Julie Otsuka dans l'excellent Quand l'empereur était un dieu ) : le terrible sort des nippo-américains durant la Deuxième Guerre mondiale après Pearl Harbor, basculant dans l'effroi lorsque paraît l'ordre exécutif de Roosevelt, le 9066. Plus de 110.000 citoyens américains d'origine japonaise, pourtant bien intégrés à la société, sont immédiatement internés de force dans des camps comme celui de Tule Lake en Californie, évoqué dans le livre.

    A partir de cette toile de fond, Christian Kiefer tisse une structure narrative assez éblouissante, complexe par les chemins empruntés sur trois arcs temporels ( deuxième guerre mondiale, 1969 et 1983 ). Plutôt que d'alterner classiquement des chapitres distincts sur chaque période, l'auteur choisit de superposer passé et présent pour raconter deux familles qui cherchent à faire la paix avec leur passé, une blanche, une nippo-américaine.

    Tout commence, superbe chapitre, avec le retour de Ray Takahashi, été 45, dans sa ville natale. Jeune GI, il revient du front d'Europe de l'Ouest. Il a combattu pour un pays qui a contraint sa famille à abandonner sa maison pour un camp d'internement, mais il veut revoir celle qu'il aime, sa voisine Helen Wilson. Il n'est pas le bienvenu, loin de là. Comme tous les Nippo-américains, il n'a plus sa place chez lui. On comprend assez vite que le narrateur ne connait pas Ray mais il enquête sur sa disparition durant ce même été à la demande d'une tante éloignée qui est la mère d'Helen. le narrateur, lui, revient de la guerre du Vietnam. Il ne découvrira la vérité sur Ray qu'en 1983, suite à la confrontation entre deux féroces matriarches, la mère de Ray et la mère d'Helen.

    La façon dont l'auteur lève le voile sur la couche de secrets, déterre les trahisons, les mensonges et les traumatismes enfouis, brise les mythes et les silences est admirable. On comprend petit à petit personnalité, motivation et dynamique de chacun. L'histoire tragiquement imbriquée de ces deux familles est peuplée de fantômes ; tous, personnages, principaux ou secondaires, sont hantés, à commencer par le narrateur, tourmenté par les civils vietnamiens qu'il a tués ou fait tuer en appelant à la rescousse les avions F-4 Phantom qui ont bombardé sans relâche des villages.

    En fait, s'il désarçonne au départ et peut agacer par sa façon d'annoncer qu'il va y avoir une révélation, le procédé narratif qui consiste à entremêler dans un même chapitre passé / présent prend progressivement tout son sens en mettant en lumière les cycles qui semblent piéger les personnages et plus largement les Etats-Unis : cycles de racisme, cycles de guerres, cycle de culpabilités et de peurs. Fantômes est un grand roman sur la culpabilité lié à un passé obsédant. Il fait réfléchir sur la façon que nous avons d'essayer, chaque jour, d'effacer des crimes passés, grands ou petits, qui ont durablement infléchi nos idéaux et valeurs ; ou comment nous prétendons les oublier alors qu'ils façonnent notre respiration même.

    Un roman qui brise le coeur, à la rupture, mais dont on retient aussi la lumière du dernier chapitre, bouleversant, celui de l'apaisement avec soi et son passé. Magnifiquement romanesque.

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