"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
«Nous sommes ici en joyeusetés, terrain fleuri... le ciel d'azur... la mer si bleue... Profitez-en, divines lectrices, mutines curieuses, je vous introduis, pour une somme modique, si l'on considère le prix maintenant du faux filet, dans les arcanes du cinématographe..., ses raffinements, ses magnificences... l'éblouissement sous les sunlights..., que je vous gâte enfin, mes fidèles !»
Milo, un vieux truand sur le retour propose à Alphonse de participer à un film du metteur en scène Luc Galano qui n’a d’autre qualification que celle d’être le fils d’un peintre aussi célèbre que richissime. Il s’agirait d’adapter au cinéma l’histoire de sa vie en l’édulcorant un tantinet. Alphonse serait en charge du scénario et des dialogues. Il officierait dans la magnifique villa que Galano possède à Saint-Tropez. Un peu beaucoup en période de vaches maigres, Alphonse accepte sans trop se faire d’illusions sur le résultat. Gloria, la compagne de Galano, pressentie pour le rôle féminin principal, est une « has been » qui n’a eu son heure de gloire que dans des péplums ou des séries Z. Et pour ne rien arranger, leurs deux enfants élevés « à l’américaine », c’est-à-dire sans la moindre contrainte, mènent une telle sarabande que ça ne facilite pas la tâche du pauvre scénariste. Sans parler de toute la ménagerie de Gloria, le boa constrictor, le mainate qui répète des grossièretés à longueur de journée, la mangouste qui fait ses besoins un peu partout et bientôt une jeune lionne pas très compréhensive. Quand un producteur allemand homosexuel pas très fiable y ajoute ses propres caprices et lubies comme une adaptation de la vie de Debussy dans l’esprit de 68 ou un projet de trio amoureux complètement bidon, on atteint des sommets dans la loufoquerie…
« Cinoche » se présente comme un récit parodique totalement déjanté, une charge au vitriol comme le petit monde faisandé du cinéma. Le regretté Alphonse Boudard, en ayant eu une expérience personnelle plutôt douloureuse, se permet une charge caricaturale particulièrement savoureuse avec cette histoire loufoque qui n’a plus grand-chose à voir avec ce qu’il a réellement vécu. Tout est réinventé, retravaillé et réinterprété. Le lecteur a beau essayer de retrouver sous les pseudos des personnages ayant réellement existé, c’est un peu peine perdue tant l’auteur a embrouillé la situation, mélangé les sujets et refabriqué les personnages. Prépare-t-il « Le gang des otages » ou « Flic Story » ? On ne sait trop. Luc Galano représente-t-il Edouard Molinaro ou Jacques Deray ou un mix des deux plus des traits de quelques autres ? Difficile à dire. Milo est certainement Emile Buisson, tout comme Anceny de la Glapaudière, Denys de la Patellière, Loulou Musardin, Audiard, ou Tartemplon, Plon. Plus difficile à identifier sont l’actrice Gloria Sylvène, l’éditeur Rubicond ou le producteur Slimane Chilbik. Mais ce ne sont que détails accessoires. L’essentiel reste un plaisir de lecture énorme encore aujourd’hui dû à la verve, à l’humour ravageur et à la langue verte aussi savoureuse que remarquablement maîtrisée de l'auteur.
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