"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
A la fin de l'année 2002, Jean Rolin a passé deux mois en Palestine (Bethléem, Jérusalem, Ramallah, Gaza, etc... -dans le dessein de rencontrer des chrétiens palestiniens là où ils vivent, de partager dans toute la mesure du possible leurs conditions d'existence (poussant même cette attitude jusqu'à être hébergé par des religieuses ou des prêtres), et d'essayer, à travers cette démarche, de se faire une idée de ce qu'ils sont et de ce qu'ils pensent réellement. Le projet lui avait été inspiré par de précédentes rencontres avec des chrétiens arabes ou proche-orientaux généralement à l'occasion de reportages -en Turquie, au Liban, en Syrie, en Irak -et, plus récemment par son étonnement devant l'obscurité ou la confusion ayant environné un événement d'une haute teneur symbolique, à savoir l'occupation par des combattants palestiniens de la basilique de la Nativité en avril-mai 2002, et le siège consécutif de ce sanctuaire par l'armée israélienne.
A cette occasion, la manière dont la presse avait rendu compte de l'événement, et dont les porte-parole de l'Eglise de Palestine s'étaient eux-mêmes exprimés à ce sujet, en laissant délibérément de côté certains de ses aspects les plus troublants avait illustré l'extrême inconfort et l'extrême ambiguïté de la position des chrétiens palestiniens, comme de toutes les minorités chrétiennes en terre d'Islam. Le dessein de Jean Rolin, lors de ce séjour en Palestine, était de lever un peu de cette ambiguïté et de percevoir quelque chose de cet inconfort.
Il y est parvenu grâce à cette "méthode" inimitable que vous connaissez depuis "La Clôture", faite d'un grand talent descritptif, tout en nuancd, qui sait inscrire chaque détail à sa bonne place dans une phrase à la fois discrète et extraordinairement construite, structurée.
En se promenant chez les bouquinistes, on peut faire des rencontres inattendues :
Ce livre en est la preuve. Un auteur que je ne connaissais pas du tout. La main n’a pas failli lorsqu’elle a touché ce livre !!!
Suite au siège l'occupation par des combattants palestiniens de la basilique de la Nativité en avril-mai 2002, Jean Rolin, décide d’aller à la rencontre de ces chrétiens de Palestine. Souvent logé chez les sœurs franciscaines il nous narre son séjour.
« Cet épisode avait également fait ressortir l’ambiguïté des relations islamo-chrétiennes en Palestine, même si cet aspect n’en avait été que rarement et timidement souligné ».
Cette dernière partie de phrase est importante car, tout au long de son périple. Les chrétiens rencontrés ne parleront jamais autrement, mais étaient trahis par leurs gestes, une phrase, ou un seul mot lors d’un repas commun.
« Qu’est-ce que vous voulez savoir des chrétiens ? Vous ne comprenez pas qu’ils ne peuvent rien vous dire parce qu’ils sont menacés de tous les côtés ? » lui dira un type d’un air goguenard.
Ce livre nous livre toute l’ambiguïté des chrétiens. Ainsi un professeur de l’université lui dira devant l’abandon de vestiges chrétiens « je ne m’indigne pas en tant que chrétien, insiste-t-il, mais en tant que Palestinien : ce pays n’a-t-il pas été chrétien plusieurs siècles avant de devenir musulman, et ce monument, oui ou non, fait-il partie de son histoire » Cet attachement viscéral à leur terre fait que certains refusent d’émigrer vers les USA comme tant voudraient le faire
Ce livre n’est pas un reportage. En premier lieu, l’atmosphère plombée, donne le « la » au bouquin. Les relations intra-palestiniennes entre islamistes et chrétiens, sorte de jeux de chat-souris vénéneux où la souris est le chrétien.
Mais, comme dans les relations ambigües, le double opprimé donne tort au Juif et soutient le Palestinien, va même jusqu’à l’excuser, le protéger de l’ennemi commun. « Israël a privé les Palestiniens de leurs droits politiques et de leur liberté de mouvement ; désormais, l’islam prive les chrétiens de leur liberté de vivre comme ils l’entendent » « Plus le style de vie des musulmans s’aligne sur les prescriptions des islamistes, plus celui des chrétiens est montré du doigt. »
Jean Rolin ne se place ni dans un camp ni dans l’autre et essaie de rester neutre bien que, en dernière page, il écrive « … je passai une partie de la nuit à me demander si je n’avais pas fait fausse route depuis le début : si je ne m’étais pas mêlé indûment de quelque chose qui, au fond, ne me regardait pas. … »
Son écriture suinte l’ennui, la peur et la tension qui existent chez les chrétiens palestiniens mais sans être ennuyeux et instructif pour moi.
Il n'y a pas encore de discussion sur ce livre
Soyez le premier à en lancer une !
"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
L'auteur se glisse en reporter discret au sein de sa propre famille pour en dresser un portrait d'une humanité forte et fragile
Au Rwanda, l'itinéraire d'une femme entre rêve d'idéal et souvenirs destructeurs
Participez et tentez votre chance pour gagner des livres !