"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Une histoire rythmée, un héros attachant
Rémy, héros sans ambition ni charisme, sans doute trop sensible et sincère pour cette époque, est perdu dans ce qu'il pense être ce que l'on attends de lui en tant qu'homme.
Malmené par son boss, sa fiancé, il se satisferait bien d'une vie de morne et passive mais confortable.
Sa rupture va mettre fin à son immobile observation critique de son monde.
Illuminé par une vision cinématographique de l'homme viril, il se retrouve dans des histoires pas possibles.
En terme de satire, tout y passe: désamour, manque d'ambition, féminisme, psy, coach, machisme,..
Le mal du siècle est-il la difficulté pour un homme de trouver sa place dans cette époque?
Du rythme, de l'ironie et des personnes attachants. On est emporté par l'histoire du début à la fin.
Qu'est ce qu'un vrai mec ? A la fin du livre on en a croisé aucun mais on a bien ri.
Le Cercle des mâles disparus
C’est avec beaucoup d’humour et sur le ton de la satire que Fabrice Châtelain étudie le statut de l’homme d’aujourd’hui. En racontant les déboires du couple que forme Rémy et Charlotte, sa comédie loufoque pose de vraies questions.
Tout commence par un voyage «de rêve» au Nicaragua. Rémy et Charlotte se sont offerts une escapade dans la jungle pour vivre une belle aventure, loin du pavé parisien. Mais Rémy craint les araignées, ne supporte pas leur guide local qui ne cesse de le provoquer et trouve les commentaires des autres touristes particulièrement agaçants. Il ne le sait pas encore, mais ces vacances vont creuser un gouffre entre Charlotte – qui a envie d’un «vrai mec» – et lui.
De retour à Paris, chacun retrouve son train-train et le stress qui va avec, mais aussi le questionnement sur leur relation.
C’est alors que Charlotte décide de prendre les choses en main et prend rendez-vous chez une psy. La thérapeute avait élaboré une méthode d’«écoute active». En faisant s’allonger ses patients, elle cherchait «d'une part un discours plus libre de la part de celui qui s'exprimait et d'autre part à son partenaire d'entendre réellement les choses qui étaient dites.» Une théorie qui va très vite être parasitée par de nouvelles interrogations et par un doute croissant sur leur volonté réciproque d’avancer. D’autant qu’à la banque où travaille Rémy, l’ambiance n’est pas vraiment à la rigolade. On s’observe en chiens de faïence, on est attentif aux moindres rumeurs, on cherche à faire bonne figure, c’est-à-dire dominer le panier de crabes.
L’arrivée du gros Paulo, qui s’installe «provisoirement», ne va pas non plus dans le sens d’une réconciliation. Son modèle d’homme à lui, c’est Gabin, Delon ou Ventura, bien loin de l’image que véhicule Rémy.
Le couple va alors se tourner vers «Love Inclusive», une agence qui offre des services très particuliers: «On fait de la lecture de textes érotiques à domicile, ça marche très fort, c'est notre prestation de base. On propose aussi des séances participatives de pole dance et de striptease non-genré. (…) On effectue aussi des prestations haut de gamme et sur mesure qui consistent à réaliser leur fantasme».
La prestation high level qui est choisie va elle aussi virer au fiasco, signant la fin du couple. Rémy se tourne alors vers le «Cercle des mâles disparus», bien décidé à regagner un statut de «vrai mec».
On l’aura compris, Fabrice Châtelain s’amuse et nous amuse en détaillant cette quête. Il interroge ainsi la place de l’homme dans la société post #metoo. À l’image de cet anti-héros fragile alors qu’il se rêve macho, gentil alors qu’il sent bien les injonctions qui entendent en faire plutôt un tueur, on avance à tâtons dans cette recherche du profil idéal.
Le style alerte et drôle va alors nous entraîner vers une farce loufoque, lorsqu’avec Paulo, Rémy décide d’endosser le costume des tontons flingueurs. N’est pas gangster qui veut ! Un roman qui se lit comme on suce un bonbon acidulé. C’est doux, mais quelquefois amer. Après En haut de l’affiche, un premier roman qui avait dû être décalé pour cause de pandémie, Fabrice Châtelain confirme son talent d’explorateur de notre société.
NB. Tout d'abord, un grand merci pour m'avoir lu! Sur mon blog vous pourrez, outre cette chronique, découvrir les premières pages du livre. En vous y abonnant, vous serez par ailleurs informé de la parution de toutes mes chroniques.
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J'aurais bien aimé une cure d'amaigrissement pour ce roman, notamment en son mitan où les déboires et les mésaventures de Rémy s'enchaînent et sont un peu longues. Néanmoins, j'avoue avoir pas mal ri et souri aux réparties, aux tentatives maladroites et vaines de Rémy pour devenir un vrai homme, un comme Gabin, Delon ou Ventura. J'aime également les portraits des personnages, très stéréotypés et souvent hilarants. Celui de Paulo, mis à la porte de chez lui après une énième tromperie, est très drôle et fera frémir les plus féministes si le discours est pris au premier degré. Cette comédie qui flirte parfois avec le grand n'importe quoi ne manque pas de noter, argumenter et critiquer les travers de notre époque : les coachs, les réseaux sociaux, le harcèlement professionnel et sexuel, la perte de la virilité et la disparition des vrais hommes, les machos sexistes, les émissions de télévision voyeuristes... Si certains personnages sont d'indécrottables machos, beaufs, Rémy est davantage une victime. Pas assez fort pour s'imposer avec sa vraie personnalité, il trouve un dérivatif dans lequel il pense se révéler : ressembler à ses idoles, sans comprendre que le temps des voyous à l'ancienne est dépassé.
Vive, alerte, moderne, l'écriture de Fabrice Châtelain épouse totalement son histoire et son époque. Il n'oublie pas d'être sarcastique, ironique, cinglant. Tout pour plaire pour ce roman qui se lit vite, sur le rythme donné par son auteur.
Premier roman de Fabrice Châtelain qui n'est pas tendre avec les milieux intellectuels, artistiques et cinématographiques. Les ego sont boursouflés au-delà du raisonnable, les ambitions démesurées et certains prêts à toutes les compromissions, les mangers de chapeau, les renonciations voire les tournages de vestes si nombreux qu'on ne sait plus où est l'envers et où est l'endroit tant ils sont usés tous deux, pour avoir leur nom en haut de l'affiche. Vincent, jeune homme peu charismatique, "un type un peu inconsistant et mollasson dont les seules qualités se résumaient à son art de parler de certains livres et de certains films" est plongé dans un monde qu'il ne connaît pas et va de désillusions en déceptions.
Fabrice Châtelain est malicieux et cinglant. Ses portraits sont savoureux, on s'y croirait. On imagine assez bien certains de ses personnages, on les visualise. Et comme il cite, de temps en temps, de vraies personnes, on y croit encore davantage. A part un passage un peu longuet -une petite vingtaine de pages-, j'ai pris beaucoup de plaisir à lire cette comédie. Le chapitre 7, dans lequel l'auteur s'essaye à inventer -ou parodier- des commentaires sur les réseaux sociaux suite à une performance d'artiste au goût douteux, est d'une justesse et d'une bêtise incroyables. L'anonymat de ces moyens de communication permet aux plus crétins de faire preuve de toutes leurs potentialités et l'on est rarement déçu. Il montre également comment certains commentaires font d'un fait anodin un événement sur lequel vont s'écharper partisans et opposants, à coup d'invectives, d'injures, de mauvaise foi, de transformation ou d'invention d'informations, chacun réagissant à chaud sans réfléchir, comme si l'on se devait d'avoir une opinion sur tout.
Un premier roman réjouissant en ces temps moroses, qui fait sourire et même rire aux dépends des gens connus ou qui se voient comme tels et qui pour certains n'auront que le warohlien quart d'heure de célébrité, pas toujours grâce à leur talent.
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