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Avec la pandémie de la Covid-19, la représentation de la hiérarchie sociale des métiers a été symboliquement ébranlée, puisque des activités et des services méprisés et dévalorisés comme les caissières, les aides à domicile, les aides-soignantes, les personnels de nettoyage se sont révélés être indispensables pour la survie de nos sociétés.
L'articulation des rapports sociaux permet de comprendre pourquoi ces travailleuses se trouvent reléguées au plus bas de la hiérarchie dans la division sexuée et raciale du travail. Cette position qu'elles subissent est parfois renversée par les femmes elles-mêmes pour dénoncer des conditions inhumaines d'exploitation du travail, le racisme et le sexisme, et revendiquer dignité et application de leurs droits. D'ordinaire frappées d'invisibilité, les travailleuses racisées comme leurs mobilisations marquent temporairement l'espace de leur présence. Élaboré aux États-Unis, à partir des années 1970, par des théoriciennes se revendiquant du « black feminism », le prisme de l'intersectionnalité a produit un profond renouvellement sociologique et historiographique dans les recherches anglo-saxonnes portant sur le travail et les migrations. En France, l'approche intersectionnelle a été importée, débattue et mise en pratique plus tardivement - à partir des années 2000 -, principalement autour de la question des migrantes, pour éclairer la situation de personnes « dominées » dans la division du travail.
L'enjeu de ce dossier est de mettre le concept d'intersectionnalité à l'épreuve du réel en proposant des contributions de différentes disciplines (histoire, sociologie, science politique) qui s'appuient sur des enquêtes ou des archives se rapportant à des terrains d'investigation variés allant de la France métropolitaine à la Réunion, en passant par Dubaï et les États-Unis. Il s'attache à aborder les processus de racialisation en tant que rapport de pouvoir à l'oeuvre dans le monde du travail et la manière dont ils s'articulent avec les rapports sociaux de sexe et de classe, en particulier. En d'autres termes : comment les processus de racialisation segmentent- ils la main-d'oeuvre et comment les personnes réagissent-elles à ces inégalités ? Il questionne également l'usage du concept pour aborder la position des dominant·e·s tandis qu'une nouvelle génération de chercheur·e·s analyse la blanchité comme un avantage structurel pour les classes supérieures. Enfin, dans une acception large du travail (productif, domestique, militant, etc.), il ambitionne également de montrer comment l'intersectionnalité est un concept critique qui peut renouveler les stratégies et modes d'organisation des mobilisations sociales.
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