"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Deux adolescentes confrontées à la violence et à la misère, tentent de survivre dans le Brésil de la fin des années 70. Contraintes de quitter l'orphelinat, elles doivent retrouver leur mère absente à la vie chaotique. Elles sont livrées à elles-mêmes, terrorisées et affamées dans une ville sucrière où une pluie de cendres tombe sans relâche sur les habitants. Elles partent dans un long périple pour retrouver un père qu'elles n'ont pas connu. Proies faciles pour les prédateurs qui peuplent les routes, elles sont emportées malgré elles dans des situations risquées. La vérité finira par se faire jour pour Smiley qui décidera de prendre sa vie en main.
Dans ce roman - déclaration d'amour blessé -, chacune s'accroche à l'autre comme à une bouée de sauvetage. La rage de vivre n'a d'égal qu'une dignité émouvante. À la fois roman social et roman d'initiation, "Saisons des feux" s'inscrit dans des problématiques très actuelles, à l'intersection de l'écologie et des différentes oppressions subies par les filles et les femmes, les personnes racisées et les personnes en situation de précarité.
Divine surprise que ce premier roman publié en France d'une autrice d'origine brésilienne. Ses deux héroïnes ont vécu tellement longtemps dans l'orphelinat, protégées du monde extérieur, Porcelaine, petite et insouciante et Smiley concentrée sur la protection de sa sœur, qu'elle n'en ont aucune connaissance. Puis, petit à petit, Smiley se souvient : la violence de son père envers sa mère, la fuite de celle-ci avec ses deux filles...
Roman social et d'initiation puisque les deux jeunes filles, Smiley surtout, celle qui est présente à toutes les pages, vont découvrir le monde, comme si elles naissaient adolescentes. La violence ambiante, celle du pouvoir qui réprime toute forme de protestation, les harcèlements et agressions des hommes envers les femmes, la haine et le mépris des hommes envers les prostituées qu'ils fréquentent pourtant assidûment dans des bordels sordides, envers les homosexuels, envers tous ceux qui ne sont pas comme eux, le travail harassant et mal payé, la pauvreté, la grande différence entre riches et pauvres... Tout cela dans une petite ville pour s'éveiller à la vie en douceur, car il en serait différent à São Paulo par exemple où tout est exacerbé mais aussi où il est plus facile de vivre incognito.
Smiley avance pendant les quelques mois racontés par Naná Howton : elle fait le point sur sa vie, tente de comprendre les raisons de ses difficultés : "La vie de Smiley était devenue un flot constant d'amertume. Elle était bien consciente que c'était aussi de sa faute, parce qu'elle se refusait à exprimer de l'amour, le plus effrayant de tous les sentiments. C'était trop dur parce que s'il y avait le moindre risque de ne pas être aimée en retour, elle n'aurait plus qu'à aller mâcher une feuille d'une de ces plantes toxiques qui poussaient sous le figuier et se laisser mourir." (p.194/195)
Smiley et Porcelaine sont attachantes, fortes, elles subissent, se relèvent, luttent. Naná Howton décrit des jeunes filles réalistes et son roman assez conséquent est passionnant de bout en bout. Pas une seule ligne en trop. Fort bien écrit, donc fort bien traduit, il sera bien difficile à un lecteur de le poser pour passer à autre chose.
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