"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Personne pour mettre aujourd'hui´hui en cause l´importance de Robert Frank dans l´histoire récente de la photographie, à preuve la rétrospective qui lui est consacrée à Paris, avec l´intégralité de Les Américains exposée au Jeu de Paume. On peut d´ailleurs la visiter en compagnie de Philippe De Jonckheere.
Mais l´histoire de la photographie est trop récente pour n´avoir pas à être aujourd'hui´hui écrite. Même pas 30 ans depuis La Chambre claire de Roland Barthes, et qu'on voit le chemin parcouru, à lire La photographie d´André Rouillé (Folio Essais, 2005). Voici comment André Rouillé présente Frank :
Réorienter ainsi la photographie, et engager son évolution du demi-siècle à venir, va consister à inventer de nouvelles visibilités, grâce à une machine singulière, et à élaborer un nouveau régime d´énoncés photographiques - les énoncés étant inséparables de régimes comme les visibilités le sont de machines. Cette machine, grâce à laquelle Frank va extraire des visibilités, « fendre les choses » et ouvrir la vue, est apparemment rudimentaire, puisqu'elle ne se compose guère que d´un Leica, de la bourse de la Fondation Guggenheim, et de la route américaine des années 1950. Combinés, ces trois éléments forment, avec Frank lui-même, les rouages de ce qu'on pourrait appeler la « machine Robert Frank de la photographie expression ».
La force et l´intérêt de ces 120 pages d´essai de Philippe De Jonckheere, c´est de partir de la pratique même. Comme le jeune Suisse Robert Frank arrive en Amérique, De Jonckheere, jeune étudiant aux Arts Déco, ira découvrir l´art contemporain à Chicago, travaillera avec Robert Heineken.
En suivant les étapes biographiques de la formation de Robert Frank, on le suivra d´abord dans son expérience cinématographique, puis dans son rapport à Kerouac, Amram et Ginsberg lors du mythique Pull my daisy.
Et puis, des utilisations du Polaroid aux premières expériences photo, le travail du grain, de la vitesse (la problématique du flou, liée à l´utilisation de vitesses lentes sur grains très fins), se rétablira peu à peu le geste proprement artistique de Robert Frank et ce qu'il questionne, très loin de la photographie reportage, ou témoignage. Mais dans un geste qui renvoie brutalement au monde, et nous y renouvelle.
Enfin, et jusqu'à sa fin surprenante, cet essai est aussi le chemin de l´auteur vers Robert Frank, à travers les esthétiques du cinéma, de la photographie, et jusque dans les rues de New York, tout en nous familiarisant avec le versant technique sans lequel il n´y a pas d´invention en art.
FB Pour son diplôme de l´école nationale supérieure des Arts Déco, en 1990, Philippe De Jonckheere choisit pour thème de son mémoire Robert Frank photographe, chemin de Robert Frank vers la photographie, et la photographie questionnée par l´usage qu'en fait Robert Frank. En 2001, à 10 ans de distance, photographe lui-même, Philippe De Jonckheere reprend ce texte une première fois, et en voici une nouvelle version pour publie.net, dans le regard actuel, approfondi, éclairci, que nous portons à Robert Frank.
On rappelle que Philippe De Jonckheere est le fondateur de l´expérience Internet Désordre et de son blog. Il fait partie de l´équipe fondatrice de publie.net et en assure la direction graphique.
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