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Promenade avec les dieux de l'Inde. " Quel que soit le lieu de leur naissance, j'aime raconter les affaires des dieux. Leurs généalogies, leurs disputes, leurs amours me passionnent comme s'ils étaient de ma famille et puis, comment ne pas s'intéresser à des êtres capables de se transformer en nuage, taureau, serpent ? Désormais, je dispose d'une grande famille de dieux dont j'ai les portraits, dont je connais les tics, les préférences alimentaires, les phobies, les colères. En Inde, les dieux ne gênent pas l'immense démocratie à laquelle ils s'intègrent paisiblement. Ils ne sont pas exigeants. Une banane, une fleur, du sucre, parfois, une chèvre, et tout va bien. Chacun s'arrange avec eux comme avec le climat, le manque d'infrastructures et ce qui reste de pauvreté. Ce sont ces arrangements que je vais raconter. "
« En Inde, écrit Catherine Clément, trois cents millions de dieux et de déesses forniquent et combattent avec une joyeuse frénésie. » Voilà, le ton est donné. En effet, un livre ayant pour sujet l’hindouisme et tout particulièrement son panthéon, peut paraître au premier abord bien rébarbatif. Mais la philosophe (et romancière) Catherine Clément, bien au contraire, le rend passionnant de bout en bout, car elle a su insuffler un élan épique aux aventures de tout ce petit monde. Elle ne nous cache rien de leurs « personnalités » : séducteurs, violeurs, cruels, rancuniers mais également généreux, tolérants, protecteurs. Si bien que ces dieux à plusieurs têtes et/ou bras, se révèlent terriblement proches de nous, tellement humains, en fin de compte. Les dieux de l’Inde ne sont pas la perfection élevée au rang de modèle. Et surtout, la plupart sont ambivalents. Krishna, la divinité suprême à l'origine de toutes les autres, connaît des représentations diverses : un bébé joufflu, un adolescent à peine viril et légèrement bleuté, un adulte mâle et guerrier qui meurt d’une flèche dans le talon. Et que dire de Shiva qui est un amant doux et compréhensif, mais peut faire preuve de la mesquinerie la plus vile ?
Mais, très vite, le lecteur comprend que, de la création du monde jusqu’au chaos final, tout est lié au bon vouloir et aux prouesses physiques (et sexuelles) de ces êtres surhumains, aux corps parfaits, aux attributs appétissants. Ce n’est pas pour rien que le Kamasutra émane de ce pays ; ce recueil des pratiques sexuelles tient son origine très probablement des amours divines et, du coup, très libres. Ce qui n’empêchent pourtant ni les accès de cafard ou de colère, sans parler de la jalousie qui sourd parfois. Et là se trouve le sel même du Ramayana, une épopée mythologie et un écrit fondamental de l’hindouisme.
Catherine Clément fait preuve d’une verve particulièrement haute en couleur pour tirer le portrait de Ganesh (mon préféré), de Kali, de Brahma ou de Vishnou. Et, avec un humour incomparable, elle nous rend tout ce petit monde surpeuplé si familier, si accessible. Ce qui est dû au fait que ces textes sont, en réalité, les transcriptions de chroniques sur les antennes de France Culture. Ce livre est donc avant tout initiatique. Et il parle de religion sérieusement mais sans jamais se prendre au sérieux.
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