"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Ce court récit exprime, d'une certaine façon, la quintessence du mouvement décadent anglais. En arrivant devant le Venusberg - la montagne de Vénus - le chevalier Tannhäuser a atteint le but de son voyage. Quand il passe la porte, il est de l'autre côté du miroir, sous la montagne, et lui qui pensait conquérir Vénus va être conquis par elle. Tout ce qu'il voit, les vêtements dont sont revêtus les personnages, de Vénus jusqu'au moindre de ses servants, les nourritures, la sensualité et les caresses que tous se dispensent très naturellement sont d'un luxe et d'un faste grandiose. La passion du détail touche, ici, à la frénésie. La modernité de la mise en scène tient dans la rencontre entre une lascivité ingénue et un goût exacerbé du scandale. On assiste à l'érection d'Adolphe, une licorne, ce qui permet à Vénus de déguster son premier apéritif, tandis qu'un abbé Fanfreluche, tout droit sorti de chez Théophile Gautier (Beardsley, fasciné par le travestissement, comme tous les décadents, avait illustré Mademoiselle de Maupin), est convié à une orgie hors mesure. La préciosité et ce goût du détail, et l'humour qu'ils recouvrent - il suffit pour s'en convaincre de se pencher sur les dessins et les noms des personnages : Priapusa, Clitor et Sodom, etc. -, comme la complexité du style de Beardsley ne sont pas étrangers à l'intérêt que Michel Bulteau porte à ce texte.
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