"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
- Nouveaux contes cruelsUn jeune garçon est brutalement livré à l'angoisse et à l'impuissance depuis que sa mère a sombré dans la dépression ; un père divorcé, traité en paria par sa belle-famille, passe une dernière journée avec ses deux fillettes avant que la garde ne lui soit retirée ; une femme aime de façon dévorante sa petite fille sur laquelle elle reporte tous ses rêves contrariés de réussite musicale. Frédérique Clémençon nous raconte huit histoires où les adultes empêchent, pour leur bien, les enfants de rêver, d'aimer ou les forcent à se conformer à leur propre désir, abusant, pour leur bien toujours, de leur statut d'adulte. Et finalement chacun, adulte, enfant, adolescent, tente de survivre, de grandir, cherche à comprendre ou au contraire s'y refuse, non sans cruauté.Ces histoires ont des allures de contes. Elles en ont l'écriture, somptueusement classique, la cruauté, l'apparent réalisme et, enfin, la portée morale : car au fil de ces nouvelles où les personnages voient sans cesse leur intégrité menacée s'impose l'idée que la résistance - résistance à l'ordre des adultes ou à l'ordre du monde-, est avant tout une question de survie. Et gare à ceux qui, trop " petits " ou trop fragiles ne savent pas résister et se laissent manipulés.
- Frédérique Clémençon est née en 1967 et vit à Poitiers. Elle a publié trois romans qui ont connu un véritable succès critique : Une saleté (1998) et Colonie (2003) aux Éditions de Minuit, et Traques (2008) aux éditions de L'Olivier.
Après avoir lu et aimé « Les méduses » j’ai voulu me plonger dans ce recueil de nouvelles de Frédérique Clémençon, et bien m’en a pris car j’ai retrouvé dans chacune de ces histoires courtes le regard fureteur et parfois impitoyable de l’auteure.
Dans ces 8 nouvelles, les parents ne se montrent pas tous à la hauteur, loin s’en faut, allant parfois jusqu’à une indifférence cruelle comme cette mère qui met fin aux cours de piano de sa fille, pourtant douée, ou ce père qui emmène ses deux fillettes à la plage sans se soucier de la marée qui monte brusquement.
Il est parfois difficile de grandir auprès d’adultes absents ou indifférents, et certains enfants seront se montrer résilients comme Adèle dans « Le rêve de Lazare » qui s’invente des rêves auprès d’un marginal installé dans une cabane au bord du fleuve. Les enfants, tout comme les adultes, savent aussi se montrer cruel, et c’est le cas, dans « La guerre », de ce garçon sans nom – il restera l’enfant tout au long de l’histoire- qui, pendant le cours du professeur de français, prépare sa vengeance contre l’un de ces élèves trop lisses et disciplinés qu’il déteste. Le lecteur pénètre dans les pensées de l’enfant qui ne se sent pas à sa place et c’est saisissant de justesse.
« Deux tu l’auras » évoque la différence qui peut mener au harcèlement sexuel, c’est une histoire d’une grande violence.
Les enfants que l’on croise portent parfois des histoires trop lourdes pour leurs épaules, comme dans « Les mains de maman » qui nous raconte Paul. L’enfant vit avec une mère qui s’enfonce dans la dépression et il voit la gravité de son état à travers ses doigts mutilés.
Les phrases sont ciselées, chaque mot choisi, comme toujours chez Frédérique Clémençon, et ces destins de mères, pères et enfants se découvrent avec bonheur ou frayeur à chaque nouvelle histoire.
Ces “petits” là ne sont pas ceux de la sulfureuse Christine Angot mais de la plus modeste et moins déjantée (j’imagine) Frédérique Clémençon. J’avais apprécié son avant-dernier livre, Traques, roman qui m’avait cependant laissé un goût d’inachevé. Les Petits, recueil de huit nouvelles, apporte une explication : l’auteur aime terminer ses récits sur des points suspendus. Sur sept textes consacrés aux vrais petits, les enfants, cinq évoquent leurs relations aux adultes, aux grands et deux illustrent leur cruauté. Au vrai, c’est la huitième et dernière nouvelle qui m’a le plus réjoui ; elle met en scène une tribu de bobos intellectuels attirés par la lumière des médias où ils trouvent matière à combler leurs envies de notoriété et d’argent (suivez mon regard…). S’oppose à leur arrogance et suffisance l’épouse de l’un d’entre eux, qui n’est qu’une “petite” prof. de collège de banlieue. La caricature, digne d’une chronique de Philippe Muray, est délectable… Et me fait regretter comme à chaque fois avec les nouvelles, que telle ou telle d’entre elles (la dernière, au hasard…) ne s’étire pas en un récit appelé roman. Y triompherait le style affirmé de Frédérique Clémençon, fait de mondes ordinaires où se débattent au quotidien des personnages contemporains en proie à la comédie (tragi-comédie) des relations humaines, le tout rapporté à la pointe sèche d’une écriture acérée et juste. Il y a du Simenon dans cette femme !
Il n'y a pas encore de discussion sur ce livre
Soyez le premier à en lancer une !
"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
L'auteur se glisse en reporter discret au sein de sa propre famille pour en dresser un portrait d'une humanité forte et fragile
Au Rwanda, l'itinéraire d'une femme entre rêve d'idéal et souvenirs destructeurs
Participez et tentez votre chance pour gagner des livres !