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Ce livre commence avec la première vision de la Vita Nuova, où le coeur de Dante est mangé par une Béatrice nue, enveloppée dans un drap sanglant. Le travail sur ce sang féminin, qui apparaît davantage comme un sang sexuel que comme un sang christique, permet de s'interroger sur la nature de la courtoisie dantesque. L'auteur se démarque ainsi rapidement d'une tendance de la critique moderne à ne concevoir l'amour et les femmes chez Dante que selon une vision théologique réductrice, qui repose sur l'opposition entre amour-passion et amour-vertueux, ou amour terrestre et amour céleste. La courtoisie dantesque ne peut en effet être comprise en suivant le schéma du dépassement d'un amour inférieur, proche de la luxure des Pères de l'Eglise, vers un amour supérieur, purifié, qui correspond à la représentation d'une Béatrice idéale, trop « théologique ». Si l'amour chez Dante doit être compris comme une quête du savoir, alors la question de la sexualité ne peut être évitée sous prétexte de préserver l'image d'une Béatrice angélique. C'est aussi en ce sens que la question de l'union sexuelle, mais aussi de la division, apparaît comme essentielle pour comprendre la fonction des amants maudits de l'Enfer, Paolo et Francesca, dont le sang teint la terre : plutôt qu'une condamnation de la luxure, il faut voir dans cet épisode célèbre de la Divine Comédie une étape essentielle dans le parcours qui mène au centre de la terre.
Dante résout ainsi un des noeuds fondamentaux de la pensée occidentale de l'amour, le lien entre l'amour et la mort, puisque c'est à l'Enfer que conduit désormais l'amour, mais un Enfer qu'il faut considérer comme un lieu de connaissance. La courtoisie dantesque, à laquelle l'auteur donne le nom de « courtoisie sanglante » ou de « courtoisie infernale », recouvre ainsi des formes initiatiques qui expliquent l'importance des figures féminines dans cette quête du savoir. Mais si la différence sexuelle se décline d'abord sous la forme d'une union qui préside à la formation du livre, on rencontre aussi dans l'oeuvre un pouvoir féminin hostile à l'initiation du poète, ce que l'auteur démontre à partir de l'importance, chez Dante, du mythe de la mort d'Orphée, lapidé par les femmes thraces. A partir de la figure pétrifiante de la Dame Pierre, et de Méduse, une des gardiennes de l'Enfer, l'auteur montre alors l'importance de la symbolique de la pierre et de la pétrification, avant de conclure, en partant d'une allusion de Dante aux monts Riphée, situés dans les contrées hyperboréennes, avec une symbolique des vents du Nord et du Sud qui permet d'éclairer la nature des métamorphoses dantesques, l'importance de la descente aux Enfers et les reproches de Béatrice à la fin du Purgatoire.
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