Leur très ancienne amitié n'a jamais eu à souffrir des guerres que se faisaient leurs peuples. Hamid Barrada était le plus juif des Arabes, Guy Sitbon le plus arabe des Juifs. Jusqu'à la dernière Intifada. Depuis, le dialogue a laissé place à deux monologues avant que les deux anciens amis ne se parlent plus du tout. Ils étaient à leur tour devenus ennemis. Ils se sont retrouvés dans ce livre pour régler leurs comptes et en finir avec les non-dits. "Les tiens se conduisent avec une violence barbare envers les Palestiniens. Le droit et la justice, vous vous asseyez dessus" (Barrada). "Et les kamikazes que tu dépê-ches dans les autobus, tu trouves ça humain, toi ? Vous autres, Arabes, vous êtes la plaie du monde"(Sitbon). Des racines du conflit aux raisons de la guerre actuelle, de Sharon à Arafat, du voile islamique aux blessures de la colonisation, Barrada et Sitbon, canalisés par Philippe Gaillard, ne s'épar-gnent rien. Tous deux journalistes et écrivains, tous deux ex-révolutionnaires marxistes, ils possèdent à fond le dossier. En les entendant échanger leurs arguments comme des obus, parfois pour se faire mal, ces deux frères ennemis nous font comprendre enfin tout ce qui les sépare. Négociations, projets de paix, serments de réconciliation ne semblent pas pouvoir avoir raison de la totale incompréhension, par-fois de la haine, qui les opposent. Chacun reste enfermé dans sa certitude. Combien de siècles encore leur faudra-t-il pour s'entendre ? On ferme ce livre en se demandant si un seul de nos contemporains vi-vra assez longtemps pour voir la paix en Terre maudite.
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