"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Le Conte du Graal recèle deux discours cryptés, hétérogènes mais apparentés : l'un émane d'un imaginaire archaïque de la mort encore vivace dans la culture chevaleresque ; l'autre reflète une christologie façonnée par la Croisade et le culte des Saintes Reliques. Le Roi Pêcheur incarne simultanément un mort tué déloyalement et endurant ses blessures dans l'Au-delà, et la figure familière du Christ ressuscité portant les stigmates de la Passion. Sous le signe ambivalent de la Lance qui saigne, Chrétien de Troyes détourne le « fils de la veuve » de la vengeance programmée par le schème légendaire, pour lui inspirer les questions salvatrices. L'accès à ces deux « métatextes » symétriques est guidé par un réseau d'allusions et par des liens analogiques entre certains personnages du Conte, ainsi qu'entre les quêtes respectives de Perceval et Gauvain. Il présuppose une familiarité avec les références culturelles du public originel de Chrétien, mais aussi avec le Chevalier de la Charrette, construit sur le même principe avec d'autres matériaux.
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