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La grande illusion : que la guerre de 1914-1918 serait courte et mettrait fin à la position dominante occupée par l'Allemagne depuis Bismarck ; que la France récupérerait les territoires perdus depuis la Révolution française, mais aussi établirait une sphère d'influence de premier rang et une mainmise sur les régions rhénanes, voire remettrait en cause l'unité allemande ; et, pour finir, que les traités de paix réaliseraient au moins les principaux objectifs poursuivis et en tout cas garantiraient la sécurité à long terme. Ces illusions, largement partagées, étaient portées par l'obsession de la sécurité face à l'Allemagne et par l'affirmation du modèle républicain face au « militarisme prussien ». Ceux qui tentèrent d'achever le conflit par la négociation furent écartés. Paris a joué son rôle dans la marche à la guerre et a défini des buts qui ont largement contribué à déterminer le déroulement du conflit et ensuite la paix. Finalement, les dirigeants n'ont pas obtenu ce qu'ils souhaitaient, tout en compromettant, par leurs exigences et par leur vision biaisée des réalités, la restauration du système international. C'est ainsi que la France a perdu la paix.
Georges-Henri Soutou, professeur émérite d'histoire contemporaine à l'université de Paris-Sorbonne et membre de l'Académie des sciences morales et politiques, est l'un des meilleurs connaisseurs européens de l'histoire des relations internationales
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