"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
L'imaginaire pour transcender la guerre.À bout de forces, un groupe composé de soldats et de civils russes s'éloigne péniblement du front. La première guerre mondiale s'étire et si cet ignoble conflit meurtrit les corps, il épuise aussi les esprits les plus sains. Pour soulager le moral des troupes, le soldat Zvoga, ancien capitaine de son état, préconise une halte dans un manoir isolé près duquel ils passent. Ce n'est pas du goût de son lieutenant, mais ce sera l'occasion pour le « Doc. » de soigner les blessés et d'offrir à ses filles qui l'accompagnent, Natalia et Irina, un peu de repos. La Baronne qui vit dans ses lieux avec les siens les accueille malgré elle, mais leur dissimule un secret. En effet, vit caché dans les murs de sa propriété un groupe d'enfants qu'elle tente de préserver de la guerre et de ses ravages. Une nuit, Natalia les découvre mais ces derniers la prennent tout de suite en amitié grâce aux histoires merveilleuses qu'elle leur conte et qui allègent leur souffrance et les tourments de la guerre. Mais la barbarie n'est jamais loin; une mutinerie se prépare au sein du groupe de soldats et des rumeurs inquiétantes circulent... On aurait vu la dernière ombre roder en ces lieux... Premier tome d'un diptyque inspiré dans ses ambiances par le Labyrinthe de Pan, La Dernière Ombre met en scène les tourments de la guerre et comment la puissance de l'imaginaire peut permettre d'oublier la violence humaine.
L'intrigue de ce premier tome est assez simple, sa linéarité temporisant l'émergence d'une véritable tension dramatique. Si l'on nous présente rapidement une intéressante galerie de personnages tout à fait identifiables (l'officier froid et martial, l'adjoint rebelle, le médecin idéaliste et ses deux filles, le groupe d'enfants,...), le mystère peine à s'installer malgré quelques visions fantastiques dont nous n'aurons l'explication que dans la conclusion du diptyque. En dévoilant trop (les enfants) ou trop peu (les créatures), Denis-Pierre Filippi semble partir sur un tempo de série longue alors qu'il devra résoudre ce qui a à peine commencé dès le prochain tome. On est du coup un peu sceptique sur les possibilités d'accroche sur le seul volume deux...
Reste une atmosphère feutrée loin de la fureur des tranchées, un monde des rêves que l'on soupçonne au travers de ces quelques visions fantasmagoriques non expliquées et des personnages nombreux qui permettent une avancée rapide et au lecteur de rester au contact en savourant chaque case. Ayant la forme d'un préambule, La dernière ombre ne convainc pas totalement (comme le récent Elecboy) tout en évitant de nous ennuyer, grâce à des dessins superbes, un art du dialogue très pro de Filippi et une once de mystère qui suffit à nous donner envie d'attendre les révélations du prochain opus.[...]
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