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Prendre le métro, soupeser un nom, regarder une vidéo en streaming, rendre visite à un proche, où que cela soit, surveiller les enfants comme les mères le font, boire un verre, allumer une cigarette, vouloir rire, essayer de parler, toutes ces actes quotidiens qui s'enchaînent dans les poèmes en prose de Dawn Lundy Martin sont ceux que nous sommes amenés à faire, ceux dans lesquels on peut se reconnaître.
Mais dans la succession des scènes dont l'ordinaire laisse souvent place au malaise, on ne reconnaît personne définitivement : la narratrice ou les narrateurs ne sont pas identifiables, ils semblent absents à eux-mêmes et au monde. Voilà peut-être la traduction que fait Dawn Lundy Martin de L'homme invisible de Ralph Ellison, l'homme noir que l'on ne voit jamais. La femme noire n'est jamais vraiment visible dans Discipline, son corps ne cesse de se heurter au monde et de s'y abîmer, de se dégrader, de fuir. « Un homme est piégé comme les mots sont piégés dans le défaut du corps » :
Les corps sont défectueux dans Discipline, ils ne tiennent pas et sont remplacés page après page ; le corps fait défaut, il est absent à lui-même. C'est ce qui précipite l'écriture poétique de Dawn Lundy Martin, comme pour redonner substance au corps, comme pour le remettre en ordre.
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