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Les abominations du nazisme sont-elles le fruit d'un tragique enchaînement de circonstances, ou bien la culture politique allemande les portait-elle, fût-ce en germe, depuis des décennies ? A ce débat qui n'en finit pas de rebondir, le présent livre apporte une contribution décisive.L'Allemagne au-dessus de tout : le slogan ne date pas des lendemains de la défaite de 1918, mais bien de ceux de la victoire de 1871... A partir des années 1890, se développe dans les milieux intellectuels et les classes dirigeantes un puissant groupe de pression, la Ligue pangermaniste, qui entretient inlassablement dans l'opinion et les sphères politiques la peur et la frustration. Créatrice du nationalisme bourgeois moderne, elle prône la méfiance à l'endroit de toute population réputée allogène, réclame sans relâche la réorganisation de l'Autriche-Hongrie, revendique la construction d'un empire colonial cohérent et d'une marine surpuissante, elle exige une protection militante des minorités allemandes d'Europe centrale, la germanisation forcée en Pologne ou en Lorraine occupée, l'annexion ou la vassalisation de territoires multiples, invente le concept de déportation en masse.Ses chefs ont enraciné les complexes d'infériorité et/ou de supériorité d'une nation fragile encore, beaucoup plus fraîchement constituée que ses voisines anglaise et française, et l'ont lancée dans des rêves de puissance que Bismarck lui-même n'avait pas osé caresser.A l'issue de la Première Guerre mondiale, les obsessions pangermanistes empêcheront les Allemands et leurs élites de surmonter la défaite et ouvriront la voie à une nouvelle révolution, menée par des groupes plus radicaux encore, qui ne craindront ni de se salir les mains ni d'opérer au grand jour. En ce sens, même si elles ne l'ont pas directement enfanté, elles ont rendu le nazisme possible.Professeur de langue et civilisation germaniques à l'université de Marne-la-Vallée, co-directeur de la revue franco-italienne de géopolitique Limes, spécialiste de la géopolitique allemande, Michel Korinman a publié en 1990 chez Fayard Quand l'Allemagne pensait le monde. Grandeur et décadence d'une géopolitique.
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