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« Le poids des choses » de Marianne Fritz est un livre socle. Un classique né de sa force, à peine troublé par les émotions qui fusionnent et déforment l’atmosphère de ce très beau livre.
1963, toile d’ombre et de compassion, Berta est internée et Wilhelm son ex-mari lui rend visite. L’égrégore est une passerelle. Rien n’est figé et bien au-delà de la visite conventionnelle, il y a la teneur sentimentale, ce qui résiste au vent des douleurs et des psychoses infinies. On ressent de suite la latitude de ce qui ne peut mourir à la vie. Wilhelm s’est remarié avec la meilleure amie de Berta, Wilhelmine.
« Un homme te fait une promesse et tu es perdue. » La litanie de Berta, son regain et ses déceptions immanquables. Berta dans la chambre 66, le poids des choses sur sa poitrine et la parole perdue, égarée dans les limbes intestines.
Le récit est un kaléidoscope qui refoule le temps, résurgence du passé où Berta vivait avec les siens, ses enfants, Berta : le même prénom et Rudolf. L’âpreté relationnelle, Berta est en proie à la lassitude de la grisaille. Elle rêve haut, somme ses enfants du poids des choses.
« Le poids des choses, la vie même n’ont plus aucune prise sur elle quand elle dort. Voilà. Le sommeil éloigne tout. Tout et tout le monde. »
Wilhelm, la guerre encore sur ses épaules, lui qui a fait la promesse à son alter-égo mort en pleine guerre, un enfant de lui dans le ventre de Berta. Rudolf qui en jouera jusqu’au bout de la nuit, grincements de dents. Ici, pas d’amour pour une mère, mais des paroles acides, le poids des choses. Berta (fille) « bercée dans le royaume du silence « , pourtant rebelle et assassine.
« C’est ça. Nous sommes trop futiles tous les trois, trop superficiels. C’est cette intériorité qui nous fait défaut, nous n’avons pas la foi. »
Ce récit d’une beauté inouïe est vif et serré comme un café fort. La décadence d’une famille abîmée et meurtrie par la violence d’une quête de sérénité qui n’advient pas. Marianne Fritz délivre un roman sur la folie et les douleurs infinies. Superbe dans son écorce, saisissant par son intrinsèque, « et deux cas désespérés, décida Berta au cours de cette longue nuit, c’est deux fois plus lourd à porter. »
« Le temps de la guerre » creuse son sillon, et son symbole souffle des murmures sur les lèvres de Berta. Lumineuse, le poids des choses, l’incomprise qui conversait avec ce qui ne peut se voir au grand jour. Ce livre admirable, acide et bouleversant est un chef-d’œuvre avéré. Le premier roman d’une romancière de renom autrichienne (1948-2007) doté du prix Robert Walser (-19678) et le prix Franz Kafka (2001). Avant-gardiste, décalé, libre, ce grand livre est une gageure littéraire. Berta et son aura immense et inoubliable.
Traduit à la perfection de l’allemand (Autriche) par Stéphanie Lux, les Éditions Le Quartanier éditeur viennent de mettre au monde un roman boréal, inestimable.
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