"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Il s'agit d'un roman, avec des personnages fictifs, mais inspiré d'événements historiques qui se sont peut-être, voire certainement, déroulés ainsi en 1944.
L'auteur commence par mettre en scène certains des aviateurs dans des relations sentimentales, ce qui parait judicieux pour donner une dimension humaine à l'histoire avant de basculer vers le récit de guerre. Mais j'ai trouvé qu'il n'excellait pas vraiment dans cet exercice, privilégiant le passionnel au détriment du romantique, son style manquant quelque peu de finesse à mon humble avis.
Le récit prend vraiment toute sa dimension lorsque la mission est annoncée pour une escadrille de bombardiers Avro Lancaster de la Royal Air Force basée à Waltham, Angleterre.
Débute alors un voyage au bout de la nuit, depuis le briefing avant le décollage jusqu'au débriefing au petit matin pour ceux qui seront revenus, vivants et pas trop mal en point.
Tous les avions réquisitionnés, avec 7 personnes à bord, rejoignent en vol le reste des appareils, plus de 800 bombardiers, Lancaster, Halifax, Stirling, escortés par des chasseurs de Haviland Mosquitos. C'est une véritable armada qui s'en va donc de nuit – les américains bombardant de jour – vers l'objectif, Essen, situé dans la vallée de la Ruhr, une des régions les mieux défendues d'Allemagne.
La narration se concentre sur une partie de l'escadrille de Waltham - dont deux équipages partent pour leur 38ème mission et un pour sa toute première - ainsi que sur quelques chasseurs allemands d'un groupe de chasse de nuit basé en Hollande.
Les descriptions sont très réalistes et très précises. Parfois techniques, notamment en ce qui concerne les équipement radars et l'armement des avions allemands - Messerschmitt BF-110, Heinkel-219, junkerr-88. Puis impressionnantes d'intensité lors des scènes d'affrontements, les dégâts occasionnés par les dévastatrices munitions allemandes sur les machines et leurs occupants étant détaillés sans fioriture.
L'auteur nous fait partager de manière particulièrement tangible la peur, insidieuse ou brutale, omniprésente compagne de route pour ces aviateurs conscients qu'ils vont participer à une terrible loterie mortelle. Avec le risque de collision au sein du «stream», à la cohésion hasardeuse mais garantissant la sécurité du groupe, celui d'être touché en traversant les nombreux tirs de DCA frappant au hasard les malchanceux, celui enfin d'être pris pour cible par un des redoutables bimoteurs ennemis lourdement armés, la survie résidant alors dans le sang-froid, la réactivité, l'adresse des mitrailleurs et pilote du bombardier, l'intervention salvatrice d'un Mosquito, ou, plus aléatoire, la chance d'avoir affaire à un adversaire novice et pas à un as de la Lutwaffe à qui manquent quelques victoires pour obtenir une distinction supplémentaire.
La nuit est longue pour ces jeunes gens, certains n'ayant pas 20 ans. le froid, le bruit, la peur, les dangers innombrables, tout est bien rendu par l'auteur qui connait parfaitement son sujet et en maîtrise toute la dramaturgie, nous plongeant dans cet enfer nocturne de façon tellement réaliste qu'on ne peut que rester littéralement scotché dans cette lecture passionnante.
Bien qu' ayant beaucoup apprécié ce livre, je me sens un peu obligé de signaler un nombre assez important de «coquilles» qui font légèrement désordre dans la mesure où l'exemplaire reçu n'était pas annoncé comme non corrigé. Si comme moi vous vous interrogez sur la définition de l'étrange verbe «amaster» rencontré dans la deuxième phrase de la page 228, je peux au moins vous faire profiter de l'info obtenue auprès de l'éditeur : il s'agit en fait du verbe «asmater» signifiant en argot «frapper; tirer sur quelqu'un».
Lorsque je lis un récit de guerre, qui plus est d'aviation, j'ai une pensée émue pour mon père, affecté dès 1939 dans un régiment de DCA, avant d'être brièvement mitrailleur sur un avion de reconnaissance, puis prisonnier de guerre ( ayant eu la chance de pouvoir utiliser son parachute ).
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