"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
À proximité de Fukushima, un homme en charge de sa mère grabataire, qu'il ne peut pas se résoudre à abandonner, erre dans le village dévasté de son enfance. En conflit avec son passé, il lutte avec ses souvenirs entre la peur de perdre ce qui lui reste et l'espoir de se retrouver à nouveau...
L'auteur nous offre un roman à la fois sombre et lumineux où la douleur et le sentiment de solitude prédominent. Yohei est une figure fantomatique au milieu d'un paysage lunaire. Auprès de sa mère mourante, il éprouve des sentiments vifs et partagés qui ravivent des blessures d'enfance, et une promesse trop lourde à porter.
L'écriture est poétique avec cette plume de paon, fil conducteur, qui renferme un doux-amer secret.
Avec Yohei, on traverse des moments de doute, de confusion, d'attachement et de rejet. Il entame un travail de deuil laconique, furieux et rédempteur. Sa rencontre avec Reiko est importante et salutaire. Avec elle, il peut exprimer ce qu'il n'a jamais dit. J'ai été touchée par la discrétion et la bienveillance de la jeune femme, elle est ce phare qui brille et qui guide dans la nuit.
Ici, on parle d'amour, d'incompréhension et de non-dits. La culpabilité, le ressentiment expriment leur cruauté d'abord, pour laisser place à quelque chose de plus nuancé et de constructif.
L'histoire d'une vie meurtrie par trois décennies de silence et d'un tsunami, la fin d'un cycle et le début d'une résilience bénie.
C'était une petite ville paisible, baignée par l'océan pacifique, au nord du Japon, tout près de Fukushima. Yôhei l'avait quittée pour vivre et travailler à Tokyo mais depuis deux ans il était revenu sur ses terres natales pour prendre soin de sa mère malade. Il servait dans un bar avec le projet de se faire embaucher par la centrale nucléaire, une fois sa mère décédée.
Et puis...la terre a tremblé, le tsunami a déferlé, le réacteur numéro un de la centrale a explosé. Depuis Yôhei est seul dans sa ville. Il a bien essayé de fuir lui aussi, mais cela aurait condamné sa mère à mort. Alors il est resté. Seul avec les chats et les chiens errants abandonnés par leurs propriétaires, seul avec ses souvenirs. La visite d'une maison désertée par ses occupants réveille en lui un secret enfoui depuis trente ans. Dans le jardin, une volière, dans la volière, un chien affamé et Yôhei se revoit enfant devant la même volière et le magnifique paon qui y vivait, devant la même maison et la jolie fille qui y vivait...
Roman du drame, de la survie, de la solitude, de la nostalgie, Quand le ciel pleut d'indifférence est aussi, malgré les évènements, malgré la dévastation, le roman de l'espoir. Alors que tout est détruit alentour, que le paysage n'est plus le même, que s'accumule les vestiges d'un monde qui n'existe plus, les narcisses fleurissent de plus belle, les chevaux s'ébattent en liberté, les oiseaux pépient. Alors qu'il n'y a plus âme qui vive dans la ville, une femme arpente les rues à la recherche des chats abandonnés qu'elle s'est donné pour mission de sauver. Pour l'homme seul, c'est une rencontre, l'esquisse d'un rapprochement, la promesse d'un avenir.
Beaucoup de délicatesse, de sensibilité et d'émotions dans ce roman post-Fukushima qui évoque la catastrophe sans colère mais dénonce tout de même la présomption et l'inconscience des hommes qui ont cru pouvoir dompter la nature et maîtriser le nucléaire et n'ont récolté que la désolation et la destruction.
Un livre sur la vie, sur la mort, sur l'impermanence des choses.
Je voudrais mettre en avant le challenge #varionsleseditions lancé sur instagram par @madame.tapioca et @librairieenfolie dont le but est de mettre en avant de « petites » maisons d’édition. Chaque mois est consacré à l’une d’elle, et ce mois-ci, il s’agit des éditions Picquier.
Ce qui tombe très bien pour plusieurs raisons. La première et principale, c’est qu’il s’agit d’une maison d’édition que j’adore. Grâce à eux, je découvre la littérature asiatique au sens large du terme, autrement que par les mangas ! Car si j’adore les mangas, historiques notamment, on reste centré sur le Japon, et finalement, dans ce que je lis, assez rarement sur l’Asie contemporaine.
La deuxième raison, c’est que j’ai la chance de recevoir régulièrement des livres de chez eux, et que je suis heureuse, du coup, de pouvoir mettre en avant leur dernière parution, qui arrive en librairie aujourd’hui.
Il s’agit d’un court roman, dont le narrateur est un homme qui a choisit de rester dans son village suite au tsunami et à la catastrophe nucléaire de Fukushima. Pourquoi ce choix ? A première vue pour veiller sur sa mère en fin de vie, et lui éviter la douleur d’un déplacement, et de mourir dans un lieu inconnu loin de son foyer. Mais il reste aussi car il a des comptes à régler avec son passé, et avec lui-même. Il a besoin de faire le point, et de se pardonner pour avancer. Y arrivera-t-il ? C’est une autre histoire… (ou plutôt c’est la même mais ne comptez pas sur moi pour tout vous divulgâcher^^). Il est extrêmement difficile de se pardonner ses erreurs, et de pardonner à ceux qui vous ont profondément blessé.
Il déambule donc dans la ville désertée, et rencontre des animaux, pour certains enfermés depuis probablement des jours depuis la catastrophe et l’évacuation. Il se prendra d’affection pour un chien, pas n’importe lequel, et fera quelques rencontres inattendues…
Les descriptions de ses errances en ville et de ses ballades sur la côte ravagée sont à la fois dures et pleines d’amertume, mais aussi et surtout de poésie. Cet homme, qui a choisi sa solitude pour accompagner sa mère, arrive à voir le beau dans ce qui reste de sa région natale. Un arbre, une fleur, un animal… tout est prétexte à rêverie et réflexion.
Je vous laisserai découvrir par vous même où ses réflexions et rencontres vont le mener, et s’il va réussir à avancer malgré les épreuves. Tout ceci est important dans le parcours de cet homme, qui a sur certains points résonné en moi, même si je retiens avant tout la poésie et la douceur avec lesquelles Shiga Izumi aborde le sujet difficile de la vie et de la résilience post catastrophe.
Bien que douce-amère, c’est une très jolie lecture, pleine de poésie.
https://leslecturesdesophieblog.wordpress.com/2019/03/07/quand-le-ciel-pleut-dindifference-shiga-izumi/
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