Bringuebalée. C'est un peu ce que l'on estime avoir ressenti lorsque l'on achève la lecture de ce premier roman singulier. California dream oscille entre roman autobiographique et destin fantasmé d'un jeune soldat enrôlé dans une guerre, celle des Balkans, violente presque fratricide. California dream c'est l'histoire d'un homme qui a perdu ses points de repère, que l'exil a presque rendu fou, il hésite, se perd entre deux identités, celle de celui qui a fui Tuzla et celle de celui qui a choisi de vivre à Los Angeles ; celle d'Ismet ce passionné de théâtre et d'écriture qui, poussé par son médecin le Dr Cyrus couche son ressenti, ses souvenirs sur le papier et celle de Mustafa ce soldat qui ne se remet pas des violences de la guerre.
Ismet Prcic embarque son lecteur entre deux mondes, il fragmente son récit, perd son lecteur pour mieux le retrouver. Ce roman bouleversant, drôle souvent, tendre parfois, c'est le chant douloureux de ces exilés qui ont fui pour sauver leur peau. Celui de ces apatrides, de ces déracinés qui ne savent plus vraiment qui ils étaient et qui ne savent pas non plus ce qu'ils deviendront.
Il faut se laisser porter par ces éclats de vie, de pensées, de fantasmes proposés par l'auteur, ne pas chercher à lutter, ne pas se laisser rebuter par ses penchants ubuesques. Pour apprécier à sa juste valeur ce roman plein de suspens il faut juste écouter la voix d'Ismet Prcic et laisser les sentiments affleurer.
California dream est un formidable roman aussi sensible qu'étrange aussi beau que tortueux et torturé. Un texte qui permet de rire, de s'émouvoir, de pleurer, de s'indigner. L'un de ces romans qui permettent tout simplement de se sentir bien vivant...
Ismet s'est installé aux États-Unis, en Californie. Mais il demeure encore en Bosnie ("Une face (A)méricaine et une face (B)osniaque."), pour toujours et n'oublie pas la guerre ("Je compris que celui qui allait se lever pour monter dans l'avion à destination de Los Angeles serait un homme en route pour son avenir, tandis qu'un certain Ismet de dix-huit ans resterait dans une ville assiégée, prisonnier d'une guerre sans fin."). Son récit tant dans sa forme que dans son contenu le démontre. Cet exil ("...les régimes se succèdent, aucun ne dure, mais tous poussent à la fuite.") restera douloureux, mais il saura nous le livrer avec humour et fougue. Il revient sur sa rencontre à Zagreb avec Asmir, ce fou, qui lui ouvre un peu involontairement les portes du théâtre et d'une autre vie, loin des cigarettes de sa mère mais surtout lui donne les clés pour rejoindre la Californie. Un texte à la structure inventive et rythmé sur la guerre, l'exil mais aussi dans ce cadre, le long chemin d'un jeune vers le monde adulte.
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