"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
DES ANGES SUR LE BITUME.
Une journaliste qui décide de franchir un océan, d’aller s’installer au delà de sa bourgade. Fuir Paris pour y retrouver une ville dense. Los Angeles. Le voyage semble être une excuse, une raison pour aller mettre museau dans les affaires policières. Retracer l’histoire d’un tueur en série. Ou plutôt, retracer la vie des victimes. Comprendre. Qui étaient-elles. Pourquoi elles. Black Out propose la traque d’un tueur quand celui-ci est déjà identité et menotté. C’est un retour en arrière, des pas dans les traces des enquêteurs et familles.
Roman.
Réalité.
Fiction.
Vérité.
L’OIE PRIVILEGIEE.
De Los Angeles, elle en ignore les quartiers bobos chics, préfère s’aventurer à ceux qu’on ne lui recommande pas. Retrouver les familles, retracer l’itinéraire d’un quartier où des centaines de femmes noires ont été assassinées. Des femmes oubliées, des filles ignorées. Meurtres balayés des dossiers. Cadavres qu'on met au tiroir du crack, de la prostitution. Les paupières de la police sont closes. La belle affaire pour les serial-killers.
Rendre justice.
Leur rendre un nom.
Ce n'est pas le serial-killer qui intéresse, ce sont les femmes, ces corps dépiautés, abandonnés aux décharges. Femmes à qui elle souhaite rendre une identité, et surtout une dignité. Reconstituer les pièces d'un puzzle trop longtemps laissé aux ordures de la police.
LES PAGES NOIRES.
On oscille entre roman et enquête, créant une distinction floutée, un voile qu’on franchit et retraverse sans arrêt. Black-Out n'est pas un polar, pourtant, il aurait de quoi s'ériger comme tel. Meurtres ignorés, assassin retrouvé des années après, une journaliste sur la trace des bouches silencieuses et des souvenirs calfeutrés. Black-Out, c'est une enquête, la vérité sur ces populations noires ignorées, bafouées.
Un élément, toutefois, qui m'a perturbé durant ma lecture ; les phrases directement retranscrites en anglais, puis ensuite traduites, créant un doublon légèrement désagréable à la lecture.
Tout comme son titre, ce livre renvoie à plusieurs compréhensions :
Enquête sur un serial killer américain glaçant, le Grim Sleeper.
Enquête sur le travail d’une police de quartier « chaud » ayant un budget moindre que les autres. Sur les policiers, travailleurs sans relâche ou pour d’autres, racistes et violents. Sur leurs coups de chance, sur leurs affaires jamais résolues qui les hantent jusqu’après leurs retraites.
Enquête sur une Amérique et son évolution inquiétante, de Barack Obama à Donald Trump…
Cécile Delarue jette ses impressions sur le papier et les trois sujets s’entremêlent, terrible fratrie indénouable.
Le sujet principal c’est cette violence faite faites aux femmes noires, celles dont on ne parle pas, ces tueurs qui ne connaissent pas la prison car les enquêtent n’avancent pas, ces hommes et ces femmes qui ne sont pas blancs et le paient jour après jour. Le Grim Sleeper, ce tueur de femmes noires, (et ses acolytes, en effet plusieurs serial killer (de femmes noires) ont sévi durant la même longue période dans le quartier Sud de LA, sans être inquiétés plus que ça), est un prétexte pour envisager et tenter de comprendre une politique crachant sur ses pauvres. Car il n’est question presque que de cela, la pauvreté d’un quartier qui renvoie à une police pauvre.
Presque car l’autrice parle aussi des victimes. Elle en parle, elle se fout du Grim, elle se fout de ses motivations, elle désire juste que l’on se souvienne des victimes. Qu’elles aient été prostituées, accro au crack, mère ou nullipare. Cela reste des victimes. Le meurtre d’une femme noire, prostituée et accro est tout aussi épouvantable que le meurtre d’un employé de banque blanc. Ce n’est pas si simple et ça en est effrayant !
J’ai quitté cet essai le cœur serré, toutes ces femmes dans ma tête. Victimes de violeurs, de tueurs. Mais fortes, si fortes. À Enietra, qui a survécu. Malgré tout.
#Blackout #NetGalleyFrance#éditionspleinjour
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