"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Deux nouvelles qui s’emboîtent, telles des poupées gigognes.
L’expression même de la vulnérabilité de la vie.
Les existences meurtries, anonymes, sur l’asphalte des jours.
Scènes déchirantes, dévorantes de solitude.
L’écriture de Cassiopée Brûlart est sublime d’attention à l’autre.
Elle ne se désolidarise pas un seul instant. Elle rassemble dans un vertige implacable, presque spectrale, les faillites sociétales.
La quête d’amour dans la seconde nouvelle.
Siamoises et douloureuse, les rêves blessés, la chute d’Icare.
« La Caisse » suivi de « Journal d’une nécrosée » est le summum évocateur des souffrances existentielles. L’impuissance d’atteindre l’idéal.
Le basculement à folle allure dans la tragédie pour « La Caisse ». Le feu prend vite. Les murs tremblent immanquablement. Il y a une frontière poreuse entre la puissance et la gloire et la déchéance dans « La Caisse ».
« J’ai vingt-neuf ans. Dans une société digne de ce nom, on ne laisse pas un individu surdiplômé de mon âge végéter trop longtemps ainsi que je fais actuellement. Je considère ma vie présente comme une parenthèse qui me paraîtra plus tard bien dérisoire. M’en souviendrai-je seulement ? Si un jour j’ai des enfants, leur raconterai-je cette période chaotique ? Rien de moins sûr. Parfois je me dis que je vis des mois « off »...Je ne bouge pas de mon enclos. Je regarde juste passer les gens et le paysage qui m’entoure est bien au-delà du désespoir. »
Les portes se ferment les unes après les autres. Malgré une qualification la plus pointue, il va se heurter au Rocher de Sisyphe. D’un studio, il va vivre dans sa voiture, jusqu’à l’ultime amende. Sa caisse reste statique, sur un parking pourtant isolé. L’ubuesque d’une société qui est à mille mille d’une fraternité vénérable et d’une solidarité d’excellence.
SDF devenu, il suit le fil noir d’une précarité insoutenable. Lui, brillant et si jeune encore. Un fantôme urbain devenu.
« La Caisse » symbole d’une barbarie prégnante. L’enfermement sans vision d’avenir.
Écrire pour se sauver lui-même. Compenser par des mots, les lâchetés d’un monde violent avec ses enfants.
« J’ai besoin de dormir la nuit. La nuit abolit la fatigue, tout. »
« Journal d’une nécrosée » est celui d’une jeune femme qui se meurt à petits feux. Seule, solitaire, l’ultime bovarysme, elle se heurte à ses fantasmes, ses désirs, ses rêves.
Dos à dos avec « La Caisse », on ressent cette même douleur. Cette solitude, l’allégorie de la sauvagerie du manque.
La dépendance amoureuse pour un homme marié. La constance effacée du tableau des jouissances. Elle a faim et soif de caresses. Nécrosée, symbole d’une mort lente. L’agonie frigorifiée. Le sang à l’instar d’une déportation physique et mentale.
L’ensevelissement des joies glorieuses, des étreintes d’épiphanies grandioses.
« Mal d’être seule avec moi. Je n’ai jamais été si près de la torpeur totale. Quand aurai-je enfin réglé mes comptes ? »
Livre incandescent, les perditions Géricault. L’extrême difficulté des résistances face à la cruauté humaine. Les indifférences sont à l’instar du buvard qui dégorge de honte.
Cassiopée Brûlart œuvre à l’évocation des vérités. Sans antidote, engagé et lucide, ce livre avec un point virgule entre ces deux textes, est l’intime, notre prochain, celui ou celle que l’on frôle dans la vie.
Grave est le prisme politique dans cette littérature qui donne le plein pouvoir aux sociologies humaines.
Un livre d’urgence, crépusculaire, qui élargit notre regard.
Publié par les majeures Éditions Antidata.
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