Comment les individus sont-ils constitués comme différents les uns des autres ?
Quelles sont les opérations à l´oeuvre dans la définition, l´imposition et la modification des identités - de " classe ", de " genre ", de " race " ou " sexuelles " ? Et quels rôles jouent, dans la production historique des sujets et des groupes, la politique et les mobilisations collectives, l´économie et le social, mais aussi le langage, le symbolique et l´inconscient ?
Joan W. Scott entreprend de poser, dans ce livre, la question des identités et des catégories. Elle s´interroge sur leur construction et leur articulation.
Elle discute par exemple les grands historiens marxistes (Eric Hobsbawm, E.P.
Thompson, etc.) et la manière dont ils définissaient la notion de " classe sociale " en faisant totalement l´impasse sur le genre ou la race. Mais elle insiste aussi particulièrement sur le fait que les identités ne cessent de se transformer : l´histoire est pleine de discontinuités. L´historien ne peut jamais parler des " ouvriers ", des " femmes ", des " Noirs ", des " homosexuels ", comme s´il s´agissait de réalités évidentes et permanentes. Il doit au contraire continuellement soumettre ces concepts à l´examen, les historiciser : reconstituer les significations particulières et variables qu´ils prennent dans le temps et l´espace.
Plus largement, Joan W. Scott montre que c´est tout l´édifice classique de l´Histoire qui est ébranlé par l´interrogation contemporaine sur les identités.
Elle propose de renouveler la pratique historique en la mettant au contact des instruments les plus radicaux issus notamment de la psychanalyse, des études littéraires et postcoloniales, des travaux sur le genre et la sexualité, de la pensée de Michel Foucault ou de Jacques Derrida, etc. Contre la tendance actuelle à promouvoir un type de travail centré sur les " faits " et l´approche " empirique ", se prétendant débarrassé de tout cadre théorique et se réclamant des valeurs d´impartialité et de neutralité, Joan W. Scott appelle à une Histoire résolument politique. À la traditionnelle éthique de l´objectivité, elle propose de substituer une " éthique de la critique ".
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