"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Il y a plus de cent cinquante ans, un publiciste méconnu mais disposant d'un important réseau de notables, Émile Boutmy, fonde l'École libre des sciences politiques. Après la défaite de Sedan et la Commune de Paris en 1871, il veut créer l'élite qui, « de proche en proche, donnera le ton à toute la nation », et convoite ainsi de « refaire une tête de peuple ». Ce projet élitiste est toujours dans l'ADN de Sciences Po, rebaptisée ainsi après une nationalisation en trompe-l'oeil en 1945, qui lui procure un statut dérogatoire, entre le public et le privé.
Alors que l'École nationale d'administration (ENA) est souvent qualifiée d'école du pouvoir, Sciences Po est celle d'une domination idéologique diffuse. Depuis sa fondation, ce n'est plus seulement au nombre de hauts fonctionnaires qu'elle forme qu'on mesure son influence. Aujourd'hui, alors que 70 % des diplômés de l'école de la rue Saint-Guillaume décident de travailler dans le privé, cette influence s'étend aux médias, aux grandes entreprises, aux cabinets de conseil... Cet essai propose d'analyser l'histoire de Sciences Po sous l'angle de cette domination, et de sa résistance aux velléités de la briser. Cet essai entend sortir de la légende dorée, et d'une histoire longtemps écrite de l'intérieur.
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