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En 1962, à San Quentin, prison de l'Etat de Californie, sur les bords de la baie de San Francisco, un spectacle a lieu le samedi soir. Le directeur a convié plusieurs dizaines d'invités à assister à un « show » monté par les détenus. Un grand orchestre assure les transitions entre les numéros de comiques, acrobates, ou magiciens qui défilent sur une estrade. Les musiciens sont vêtus de smokings, confectionnés dans la toile de jeans de leurs uniformes. Parmi les membres de l'orchestre, quelques uns des jazzmen les plus brillants de la côte Ouest. La plupart sont en prison pour usage ou trafic de drogue. Ils jouent le samedi soir, ou pendant leurs moments de liberté dans la grande cour de la prison. Présentons-les un à un, comme on le ferait au début d'un concert : Au saxophone alto, Art Pepper, enfant prodige du jazz de la côte ouest, ancienne star du grand orchestre de Stan Kenton. Le seul blanc de notre jazz band. Quand commence sa vie de prisonnier, il a déjà produit quelques albums qui ont marqué l'histoire de cette musique. A la trompette, Dupree Bolton, comète géniale et éphémère, qui finira, trente ans plus tard, musicien faisant la manche dans les rues de San Francisco après avoir laissé quelques enregristrements épars. A la trompette aussi, Nathaniel Meeks, un de ces membres anonymes des grands orchestres de Californie, honnête exécutant dont l'histoire du jazz n'a gardé qu'une trace rapide. Au piano, Jimmy Bunn, soliste raffiné et exigeant qui, au moment de son incarcération à San Quentin, a déjà accompagné les plus grands, comme Charlie Parker ou Dexter Gordon. Il finira sa vie dans l'anonymat. Au saxophone alto, Earl Anderza, sorti de prison pour enregistrer un disque unique et fulgurant en 1963, avant de retourner à l'obscurité. Au saxophone alto encore, Frank Morgan, seul survivant aujourd'hui de cet orchestre théorique, perdu pour la musique après son premier disque en 1955, émergeant comme ressuscité trente ans plus tard, talent intact, après avoir passé l'essentiel de sa vie adulte en prison. A la contrebasse enfin, Frank Washington, qui passa vingt ans à San Quentin, où se déroula toute sa vie de musicien. Ce livre est leur histoire. Concentrée autour des quelques mois de 1962 où ils jouèrent ensemble cette musique évanouie. Enfermés à San Quentin, pénitencier surpeuplé, prison de mort où la chambre à gaz exécute régulièrement l'un des leurs, déchirée par les tensions raciales et les soubresauts qui agitent l'Amérique au dehors.
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