"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Tiré d'un poème de l'auteure, ce titre souligne à la fois la charge érotique du texte et la rebellion extraordinaire d'une femme face à l'ambiance étouffante qui règne en Tchécoslovaquie d'après-guerre.
Probablement écrite en 1962, cette lettre est un véritable manifeste pour la liberté individuelle.
Dans les années qui précèdent le Printemps de Prague, Jana ?erná livrait dans cette lettre à Egon Bondy sa volonté de révolutionner les codes de conduite, de rechercher de nouveaux " possibles " dans la vie privée, les rapports sentimentaux et la sexualité. En refusant de se soumettre à la primauté masculine, elle affirme aussi son souhait d'une sexualité non séparée des sentiments et de l'activité intellectuelle.
Ce n'est ni un manuel sur la s*d*mie, ni même un texte er*otique... Enfin, pas tout à fait. Pour tout dire il y a une poignée de pages à la fin qui sont un peu olé-olé (c'est quand même assez cru) mais c'est loin d'être le plus important. L'autrice le dit au tout début du livre : "je suis face à une lettre d'amour', et c'est vrai. Certes il y a une forte liberté de ton, mais ça parle surtout d'amour et de désir, de bonheur, du manque de l'être aimé, mais aussi de philosophie et d'art, de poésie.
En plus la préface est parfaite, Jana Cerna était une autrice que je ne connaissais pas du tout et je trouve ça merveilleux de refaire un petit point sur elle et sur sa vie, parce-que ce n'est pas n'importe qui, elle faisait partie des milieux underground / artistes de Prague (et c'est à sa maman que Kafka écrivait des super lettres que j'ai AUSSI envie de lire, voilà.
Lien : http://www.livresselitteraire.com/2018/05/pas-dans-le-cul-aujourdhui-de-jana-cerna.html
Cette lettre écrite au début des années 60 est celle de la pragoise Jana Černá – fille de la journaliste et résistante Milena Jesenská – à son amant Egon Bondy que la vie tient éloignée d’elle. Cette lettre ardente est celle d’une femme libre de corps et d’esprit qui assume ses choix, qui comble l’absence de l’autre par des mots enflammés d’une passion qui ne se définit pas uniquement par l’attrait des corps. C’est beaucoup plus puissant, beaucoup plus profond. Cette passion résulte d’une communion absolue entre le corps et l’esprit. Elle l’aime, elle l’aime pour son intellect, elle le désire pour son intellect. Pour elle l’un et l’autre sont indissociables. Ce sont les deux, ensemble, qui procurent la jouissance infinie.
Alors elle le lui écrit, sans aucune retenue ni concession, elle couche sur le papier – comme elle se coucherait pour lui présenter ses cuisses – ces mots tantôt philosophiques, tantôt érotiques, féroces et tendres. Plaisir de la chair et de la provocation mais de la belle provocation, celle qui se dresse pour la liberté, pour l’affirmation de soi. Celle qui fait la nique à la convenance, à toutes ces pensées étriquées, à toutes ces façons d’aimer polies par la société. Elle couche sur quatre-vingt pages l’audace d’une femme qui souhaite briser tout conformisme qu’il soit d’ailleurs sexuel ou intellectuel.
À la lire, je l’imagine taper sur sa machine avec la force d’une femme aux abois, une femme qui réclame chaque infime partie du corps de son amant. Dans une frénésie presque orgasmique. L’appeler, fantasmer chaque toucher, chaque baiser, chaque acte sexuel. Comme une prière.
Pas une page dans cet ouvrage ne donne lieu à une intensité décroissante, au contraire, elle monte crescendo comme un désir endormi qui ne demande qu’à jaillir et qui finit d’ailleurs par jaillir d’une intensité comme j’en ai rarement lu. Exit l’érotisme politiquement correct, Pas dans le cul aujourd’hui offre des pages à faire rougir les plus timides.
Le sexe telle une création artistique, intellectuelle et indomptable. Spontané, irraisonnable, au-delà des frontières que l’on pourrait soi-même dresser, voilà ce qu’est Pas dans le cul aujourd’hui : la contemplation de l’autre dans son ensemble pour parvenir à ce moment où les corps et les esprits ne font plus qu’un et à l’unisson jouissent. Lorsque Jana s’adresse à Egon elle lui dit vouloir le voir créer une « œuvre sans censure, crue, brute et monstrueuse, mais absolue. […] une œuvre sans limites et qui ne se laissera imposer de limites par rien et à aucun moment. », je ne sais pas si son l’amant l’a fait mais je pense que c’est ce qu’à créer Jana Černá avec cette œuvre.
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