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« On ne peut plus écrire aujourd'hui en Afrique, comme si le génocide de 1994 au Rwanda n'avait jamais eu lieu. Ce génocide n'est pas seulement la culmination sur le continent africain du temps de la violence. Il est aussi le symbole d'une idée qui désormais fait corps avec la terre africaine: « l'extermination de masse perpétrée par des Africains sur des Africains ».
Écrire, ce n'est pas seulement raconter des histoires. C'est aussi inscrire ses mots dans la profondeur autant d'une terre que d'un rêve. C'est aussi bien saisir les racines de l'océan que titiller les dieux. Bref, c'est risquer sa vie. Or, si la génération d'auteurs africains d'aujourd'hui est née indépendante, elle a grandi avec les génocides, les violences, les dictatures, le chaos et l'exil.
Il s'agit donc pour nous moins d'inventer un style juste pour dire la tragédie de notre continent que de créer un style d'écriture qui rende cette tragédie dorénavant impossible: c'est ce style d'écriture que nous appelons « écriture préemptive ». Parce que le concept de préemption est usé par le politique, aujourd'hui, nous réclamons le droit de le redéfinir à notre guise; en l'inscrivant dans les logiques tourbillonnantes et parfois si affreuses de l'histoire africaine, et en lui insufflant la vision qui est la nôtre: celle d'un écrivain originaire d'Afrique. »
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