"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Le Scénar, c'est l'histoire _ mais est-ce bien une histoire? _ de quelques personnages qui ont découvert le texte anonyme d'un scénario de cinéma. Quand on découvre le manuscrit d'un «scénar», que peut-il se passer ?
Roman allégorique qui explore la relation que nous avons avec la réalité et la fiction, Le Scénar est aussi une déclaration d'amour au road movie..., nourri d'inspirations fantastiques, politiques, philosophiques...
Léo et Théo, deux jumeaux étudiants, ont trouvé une clé USB oubliée sur un ordinateur de la salle informatique de leur faculté. Celle-ci contient le manuscrit d’un scénario qu’ils s’empressent d’imprimer et de présenter à leur amie Lola, réalisatrice en herbe elle-même. Tous trois se retrouvent dans un parc public où Lola en commence une lecture à haute voix. Le titre du texte « Scénar » les intrigue tout comme le dernier mot, « Cali ». S’agit-il du nom de l’auteur ? De sa ville de résidence ou de celle où il a écrit ce script ? Est-ce Cali en Colombie ? Ou l’abréviation de Californie ? Quant au titre du projet de film « Velorex », il renvoie au nom d’un bizarre tricycle à moteur plus que rudimentaire fabriqué en Tchécoslovaquie dans les années 50 et 60 avec un habitacle rustique, mais décapotable et un petit moteur de deux roues. Cette lecture va se poursuivre en divers lieux dont la salle informatique du départ non sans moult commentaires des jumeaux et de quelques autres usagers des lieux…
On ne peut pas vraiment parler de « roman » au sens classique du terme à propos de l’ouvrage de Philippe Pratx, mais plutôt d’une narration un peu narcissique, l’auteur se plaçant finalement comme personnage principal nous gratifiant de nombre de commentaires sur un peu tout et n’importe quoi, et de digressions diverses et variées qui ralentissent le rythme d’une histoire qui n’en est pas vraiment une. Il s’agirait plutôt de la mise en abyme du scénario d’un film style road-movie à travers l’Europe. Dommage qu’il ne s’y passe pas grand-chose en dehors de la promenade estivale de deux amoureux, Alena et Olivier, qui roulent dans leur antiquité encore plus laide qu’une Trabant, campent, pique-niquent, visitent quelques villes dont Venise. De simples touristes dont la seule originalité reste leur véhicule. Faiblesse de l’intrigue, manque de consistance des personnages, style décousu, explicatif et complaisant. Certains pourront vite sentir l’ennui monter. Pourtant, quelques développements sur le communisme, idéal rêvé mais jamais atteint, sur la condition humaine, ou sur le rôle du narrateur peuvent parfois raviver l’intérêt. Dommage que l’auteur se soit en plus lancé dans un essai aussi raté qu'inutile d’écriture inclusive et n’ait développé ni sur la révolte des gilets jaunes ni sur la crise sanitaire, toutes deux à peine évoquées sur la fin. On se demande d’ailleurs pourquoi celle-ci est si dramatique.
Merci à l'auteur ,Philippe Pratx ,de m'avoir permis la lecture de ce roman inclassable.Deux étudiants jumeaux ont trouvé une clé USB oublié sur un PC d'une salle informatique qui contient un scénario où l'on va suivre Aléna et Olivier qui font un rallye en Velorex ,un véhicule à trois roues fabriqué en Tchécoslovaquie.Les jumeaux vont proposer leur trouvaille à Lola ,une jeune scénariste ,et ensemble ,ils vont suivre le périple d'Aléna et Olivier.Un roman atypique truffé de références cinématographiques agréable à lire.
« Mais franchement, celui qui a écrit ça...
— Ou celle...
— Ou celle, d'accord... Non mais quel bin's ! »
Ou quand les personnages m'ôtent les mots de la bouche !
Alors voilà, ça commence plutôt paisiblement, sur le banc d’un parc « Vert. Métal et lattes de bois, vous voyez le genre » avec trois amis, Théo, Léo et Lola. Dans la salle informatique 230 de leur fac, les jumeaux Théo et Léo ont trouvé une clef USB qui contient un scenar anonyme : Velorex. Ils ont contacté Lola, une amie jeune réalisatrice, pour le lui donner à lire et recueillir son avis.
Me voilà donc embarquée à leur côté dans la lecture de ce scenar (sans accent, s'il vous plaît !) : un road-movie en Velorex, curieux véhicule à mi-chemin entre la voiture et le vélo, construit dans les années 1950 dans ce qui était encore la Tchécoslovaquie. Je fais la connaissance des personnages principaux, Alena, jeune professeure tchèque et Olivier venu d'Occitanie, et pars avec eux sillonner les routes, de Prague à Ljubljana, à Venise et j’en passe, ayant assez vite relégué en queue de convoi la vingtaine d’autres participants à ce week-end assez particulier.
À l’évidence, l’auteur s’amuse. Avec ses personnages, avec ceux du scenar, avec un art consommé de la mise en abyme.
« Ils essaient tous les trois [Lola, Léo, Théo]– et je pourrais même ajouter le chat [Emo] – de construire quelque chose avec moi. Pour moi. Quelque chose qui ressemble à une histoire. Mais avec moi, ils n’ont pas de bol. Ils sont pas tombés sur l’auteur le plus coopératif. Alors bon, d’accord, je vais leur laisser quand même un peu la parole, mais va pas falloir qu’ils abusent. »
C'est sûr que pour ce qui est de laisser la parole... ! J'y reviendrai.
L'auteur s’amuse aussi avec ses lecteurs, qu’il interpelle dès le début en les invitant peu à peu à s’interroger : qu’est-ce qu’être lecteur ? spectateur ? lecteur et spectateur ?
« Ils vont pas tout de même nous refaire le coup du film dans le film ! »
Écrire que le roman de Philippe Pratx est truffé de références cinématographiques est très en-dessous de la vérité. Je suis certaine d’en avoir manqué une bonne moitié (je me vante, j’ai dû en rater bien plus !) Je vous rassure, nul besoin d'être aussi érudit que lui pour prendre plaisir à la lecture. C’est amusant et ça tombe plutôt bien puisque l’auteur a pris soin de m'avertir que « Ce livre n’est pas très sérieux. Je m’y propose surtout de m’amuser. » Alors, amusons-nous ! Ça ne se refuse pas !
Je ne vous mentirai pas, Le Scénar est un roman qui se mérite, de ceux dont on émerge sans trop savoir ce que l'on a lu. Est-ce vraiment embêtant ? Non, car si ce livre commence comme un roman somme toute banal - des étudiants ont trouvé un scénario anonyme sur une clef USB - oui ? et alors ? -, il ouvre sur d'autres lignes de fuite plus complexes.
Le Scénar est un roman efficace dans sa forme qui rappelle les matriochkas. L’auteur omnipotent, omniscient
« Eh bien savez-vous ce que j’ai envie d’en faire, de ces braves jeunes gens ? Savez-vous ce que je vais réellement en faire ? »
écrit une fiction où Théo, Léo, Lola lisent un scenar qui pour eux est une fiction. Alena, Olivier, leur famille respective, vivent leur vie de personnages du scenar… sans savoir qu’ils sont des personnages du scenar dans Le Scénar. Le lecteur, lui, lit le roman que l’auteur écrit qui est pure fiction qui contient une autre fiction qui...
Vous suivez, ou faut-il que je vous laisse plus de temps pour ouvrir les poupées russes ?
Le roman de Philippe Pratx est percutant aussi dans son propos qui interroge facétieusement la relation auteur-personnage-lecteur
« Je dis « nous ». C’est un peu bête. Il y a même des chances pour que ce soit très bête. Mais on dit parfois « nous », comme ça, dans les livres. Comme si on était copain copain : l’auteur, les personnages, les lecteurs... »
et celle qu’entretiennent la fiction et le réel, souvent avec un clin d'oeil à peine appuyé à son roman à lui
« par nature, « réalité » et « fiction » ne sont pas fondamentalement différentes, et, tout bien pesé, on aurait foutument tort de se priver d’une petite toile ou d’un petit roman... »
Tout cela est rondement mené et pourtant, comme Alena et Olivier qui se retrouvent à un moment privés de GPS, j’avoue que moi aussi j’ai eu du mal à m'orienter une fois parvenue aux ¾ du livre. Trop de chemins buissonniers, de bifurcations ont manqué émousser mon intérêt ; trop de voix (off ou pas) se sont enchevêtrées brouillant le propos. D’autant que l’auteur est un incorrigible bavard. N'allez surtout pas le croire quand il vous promet « Je vous passe les détails », parce que, les détails, vous n'y couperez pas ! Confortablement calée dans mon canapé, j’ai eu plus d’une fois envie de lui siffler « chut ! » pour qu’il ne m'embrouille pas plus que je ne l'étais déjà. Parce que c’est facile de perdre le fil, tant le roman, après des débuts sages et mesurés, se dévergonde, s'égaille dans tous les sens, multiplie les apartés et les digressions, devient un grand bazar où la parole bavarde d’un Woody Allen s'acoquine avec l’art de la répartie d’un Michel Audiard
« Je ne veux pas finir en vulgaire personnage de film ! » Vous imaginez ? Et encore, je ne parle pas d’un film de Rohmer ou de Linklater. Vous imaginez l’enfer ? Rien ne se passe. On parle. On parle encore. Et toujours rien qui se passe. On disperse. On ventile. Deux intellectuels assis, qui éparpillent leur conversation aux quatre coins de la ville, façon puzzle (prière de bien prononcer le -u- à la française), et qui fatalement vont beaucoup moins loin qu’une brute qui marche... »
et la mise en scène d’un Dennis Hopper ou d'un Michelangelo Antonioni.
Alors, ce récit remuant, hyperactif même, qui lorgne vers le film d’espionnage ou le thriller
« il y a ce zigue avec un chapeau marron, un col d’imperméable remonté jusqu’au haut des oreilles, avec des lunettes de soleil. Il observe attentivement ce qui se passe en contrebas, avec son flegme sournois... Il va finir par nous foutre un peu les jetons, celui-là. »
(même si le zigue en question m'évoque plus le cocasse Étienne Dorsay qu'un espion patibulaire !)
tout en faisant une embardée du côté du cinéma fantastique
« Exactement, et donc là, il y a ces fantômes... Mais on les voit, nous aussi, ces fantômes ! Alors est-ce que ce sont vraiment des fantômes ?
— C’est Alena qui les voit.
— D’accord, mais nous aussi. Qui nous dit que ce n’est pas réel ?
— Les fantômes ?
— Oui... Parce que bon, entre une simple vision et des fantômes qui, réellement, passent en faisant la causette...
— De toute façon, on est dans la fiction là. Et de la fiction fantastique, en plus.
— Justement. Elle nous interroge sur le réel, la fiction.
— Okay, si tu veux, elle peut toujours nous interroger, mais ça ne change rien. C’est Alena qui voit les fantômes. Olivier ne les voit pas.
— Évidemment, il sort de la tente trop tard. Les meufs sont parties. »
j'ai craint, oui, j'ai craint qu'il ne s'éparpille pour ne mener finalement à rien, ou presque. Et certaines questions restent en suspens : pourquoi cette équipée en Velorex ? Peut-il y avoir une fin s'il n'y a pas de dénouement ?
Vous l’aurez compris, j'ai un sentiment bigrement flottant sur ce roman. Je lui reconnais d'être très bien écrit, et donc très plaisant à lire. C’est vif, alerte, on ne s’ennuie pas un instant. Mais ça court à toute vitesse, en tous sens, c’est bavard plus que de raison, si bien que j'ai eu l'impression qu'il lui manquait une structure même si, je le concède, Philippe Pratx a été très clair quant à ses intentions dans son Avertissement :
« Défier les capacités du lecteur à se soumettre à des conventions artificielles, à adhérer à l’illusion romanesque, à l’illusion artistique... Je parle donc de conventions artistiques... mais en me souvenant que la vie humaine en est pleine, aussi, de conventions. Et donc d’illusions ? »
Ai-je su relever son défi ? Ai-je été une lectrice à la hauteur ?
Si je n’ai eu aucun mal à adhérer à l’illusion romanesque, si j’ai pris un plaisir certain à partir sur les routes en Velorex, à traquer les références cinématographiques tout en ayant dans les oreilles une très bonne bande-son, j’ai eu plus de difficultés avec les bavardages de l’auteur qui bridaient mon imagination, l'empêchant de monter dans les tours et de fonctionner à plein régime. J'aurais aimé qu'il ménage des blancs pour que je puisse les remplir car, contrairement à ce qui est écrit, je ne crois pas du tout que « l’imagination, c’est bien ce qu’il y a de plus surfait, de plus oiseux et, finalement, de plus pathétique. » J'aime, comme André Gide, que « mon imagination ne chôme pas. »
Je tiens à remercier chaleureusement Philippe Pratx qui m'a offert de lire son Scénar. Je suis à peu près sûre que sans cela je serais passée à côté de cet agréable moment qui m'a sortie de mes habitudes de lecture.
Sur mon blog : https://www.calliope-petrichor.fr/2020/10/19/le-scénar-philippe-pratx-éditions-de-l-harmattan/
Dès le début, j’ai été séduite par le style vif, parlant.
Le fait de prendre le lecteur à témoin est très sympathique.
Théo et Léo, deux jumeaux universitaires, trouvent une clé USB oubliée dans une salle informatique.
Elle contient un étrange scénario.
Or il se trouve que Lola, leur amie est réalisatrice débutante.
A trois au début, puis avec quelques autres ensuite, ils lisent le fameux scénario.
C’est un « road movies politico-fantastique » peu commun.
Ce qui est sûr, c’est que c’est original et atypique.
Et puis il y a l’adorable chaton Emo, un personnage à part entière.
En fait il y a trois histoires en une :
celle des étudiants en salle informatique
celle de l’épopée en velorex avec Olivier et Alena
celle de l’auteur qui met souvent son grain de sel et s’adresse souvent à nous lecteurs.
Et ces trois histoires s’imbriquent à merveille avec un naturel qui semble couler de source, ce qui prouve la parfaite maîtrise de l’auteur.
Les références cinématographiques et musicales sont nombreuses.
Originalité, humour, poésie, fantaisie, érudition,, philosophie, richesse du vocabulaire, beauté du style…… que de bons éléments pour un roman qui sort complètement du schéma classique et des sentiers battus.
Et ça c’est une rareté inestimable dans la profusion de livres plus ou moins bons que l’on peut lire.
Le site mentionné dans l’épilogue est un complément génial du livre et prolonge cette ambiance surréaliste qui imprègne le lecteur tout au long de sa lecture.
Bref, ce livre est une superbe surprise et je remercie infiniment Philippe Pratx de sa confiance.
Dite que sans son intervention, j’aurais pu passer à côté !
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