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De la comédie antique au cinéma italien, le personnage du fanfaron manifeste une vitalité remarquable. Ce type humain, caractérisé par l'outrance et l'ostentation, par le contraste entre les propos et les actes, entre la réalité et les prétentions, se trouve déjà défini chez Théophraste (« le hâbleur », alazôn), avant La Bruyère (« le glorieux » qui « a du goût à se faire voir », ou « le fanfaron » qui « travaille à ce qu'on dise de lui qu'il a bien fait », Caractères II, 14 et 16). On souhaite ici mettre en perspective diverses incarnations du fanfaron, dans la littérature et les arts du spectacle. On s'arrêtera particulièrement sur la figure bruyante et haute en couleur du « soldat », aussi bravache que poltron et coquet, dans la comédie grecque et latine (Aristophane, Plaute et Térence), et Shakespeare (Parolles, Pistol ou Falstaff), chez Ruzante (Retour de guerre) et dans la Commedia dell'Arte (Scaramouche, le Capitan), dans le théâtre des XVIIe et XVIIIe siècles (chez Calderón, Cyrano de Bergerac, Corneille, Andreas Gryphius ou Carlo Gozzi). Mais on songe, dans des récits aussi bien, à d'autres personnages de « menteurs » gonflés d'eux-mêmes, se flattant de mérites, d'exploits et de succès plus ou moins réels.
Libéré du « type » théâtral, le fanfaron réapparaît ainsi au XIXe et XXe siècles comme un personnage désinvolte, vantard, immature, mais souvent généreux et bon vivant : du Capitaine Fracasse (1863) de Théophile Gautier jusqu'au Vantone (1963), pièce de Pier Paolo Pasolini, la figure évolue selon les époques et les littératures et trouve sa place dans de nombreux films parmi lesquels Il sorpasso (1961) de Dino Risi, traduit en français par Le fanfaron.
Personnage ridicule dans son principe, souvent victime de l'illusion même qu'il veut créer, le fanfaron intrigue cependant par sa complexité (acteur d'un rôle, il ouvre une dimension de théâtre dans le théâtre, de récit dans le récit), par son ambivalence et ses failles (égocentrique mais secrètement inquiet du jugement d'autrui, sottement vaniteux ou travaillé par un complexe d'infériorité, conscient de ses mensonges ou dupe de lui-même ?) ; il peut même émouvoir par sa naïveté ou son désir de se faire admirer et aimer, et passer du burlesque au tragique. Cet être de paroles (comme le dénonce l'étymologie), qui veut exister à travers son discours, qui construit sa propre fiction et dont l'inanité même est spectaculaire, excite en tout cas la verve de l'auteur et la performance de l'acteur.
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