L'autrice coréenne nous raconte l'histoire de son pays à travers l’opposition et l’attirance de deux jeunes adolescents que tout oppose
Depuis une quinzaine d'années, Patrick Wateau publie des livres de poésie à la langue heurtée, ascétique, étrangement musicale dans ses ruptures syntaxiques, abrupte dans son agrammaticalité dense. Ces livres thématisent obstinément la question de l'incarnation, et de son défaut linguistique. La question physique, le « corps » et sa violence radicale, ce corps d'un sujet compris comme souffrance d'une présence à soi, comme processus quasiment putride, forme encore le point de gravitation de J'ignore ignore. Mais elle s'y complique d'une interrogation inquiète des formes et des modalités de constitution de ce qui serait une parole de l'ignorance, du non savoir, de ce que serait une parole perdue ne cessant de se vouloir et de persister contre elle-même, créant ainsi la flexion mortelle de deux exigences (« J'ignore » « ignore »). C'est aussi un enjeu historique qui pointe ici, dans le décharné du poème : sait-on l'histoire, sa barbarie, sa façon d'endommager les corps, sa brutale perpétuation ? Qu'en fait-on poétiquement ? Comment l'histoire entre dans les scansions rudes de cette langue ? Par chirurgie, par les fissures, n'imposant rien, pas de panorama, pas d'air épique : disposant un mot, ici, là, posant une chair ancienne et persistante sur les lambeaux de celui qui est encore, sans réconciliation.
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