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Picasso, le plus grand génie du siècle, vu à travers les yeux d'une enfant, Marina, sa petite-fille. En 1973, à la mort du peintre, elle a vingt-deux ans. Pendant trente ans, elle se tait. Il lui aura fallu toutes ces années pour mettre des mots sur sa souffrance, pour caresser avec une émotion infinie et pleine de pudeur cette cicatrice. De la manière la plus intime, la plus terrible, Marina Picasso écrit jusqu'au-delà de la douleur, là où se trouve aujourd'hui sa liberté : ses enfants et ceux du bout du monde.
Ce livre semble faire partie de la thérapie suivie par Marina PICASSO, petite fille de Pablo. Il agit comme un exutoire de ses souffrances et conduit le lecteur dans l’intimité de la famille. Son enfance s’est déroulée en l’absence d’ancrages solides, et les conditions de vie de sa famille (mère et frère) sont liées exclusivement à l’argent que va quémander régulièrement le père de Marina auprès de Pablo. Leur vie est orchestrée par cet homme caractériel, grand artiste et génie de son siècle.
Pour avoir déjà lu des documents et notamment le livre de Françoise Gilot, je connaissais l’artiste ! Je n’imaginais pas que son nombrilisme affecte à ce point tout son proche entourage, femmes, enfants et petits-enfants, et diffuse autant de tristesse et d’humiliation.
Je me limiterai toutefois à ces jugements car je pense que Pablo Picasso était atteint d’une sorte de syndrome de la célébrité capable d’annihiler toute humanité. Quel contraste entre sa célébrité et l’admiration que lui vouait son immense public et ses agissements ! Décidément, génie n’est pas synonyme d’humanité…
Quelle déception pour quelqu’un comme moi qui aime les œuvres de Picasso de découvrir un homme tel qu’il est décrit dans ce livre ! Même si l’idée générale du livre n’est pas vraiment quelque chose de nouveau pour moi, puisque j’ai eu l’occasion d’écouter des reportages sur Picasso ou d’autres dans lesquels intervenait Marina Picasso.
Mais alors que l’on imagine que les gens qui ont de l’argent doivent faire le bonheur autour d’eux, en fait ici on se rend compte qu’au contraire ils détruisent les autres.
Est-ce un besoin inconscient du créateur qui ne peut réaliser son œuvre qu’en détruisant ceux qui l’entourent, auprès de qui il puisse sa source, son énergie, son inspiration peut être aussi.
On ne peut que souffrir de ces souffrances vécues par les enfants et les petits enfants du maître. Mais on peut s’étonner aussi de leur manque de réaction. En fait, ici j’ai l’impression que l’artiste à un tel charisme que nul n’ose s’en séparer, s’en détacher, tout en sachant qu’il détruit ceux qui l’aiment, ceux qui on aussi besoin de lui que lui à sans doute besoin d’eux. Impossible de s’éloigner, tout en sachant que Picasso détruit leur vie et celle de leurs proches. Et puis j’ai aussi l’impression qu’il exerce une telle attraction sur les êtres que chacun cherche à le garder pour soi, au risque de le détruire : N’est-il pas obligé lui aussi de se construire une personnalité insensible, dure, pour pouvoir poursuivre sa création, mener à bien son œuvre envers et contre tous.
Impossible pour un géant de vivre normalement ?
Impossible s’il décide aussi de vivre de cette façon, au mépris des sentiments, des besoins, des autres.
Il semble bien difficile de vivre à l’ombre de Picasso, comme elle nous le dit, presque tous ceux qui l’ont côtoyé et tant admiré, aimé, sont morts dans la douleur de sa perte ou bien ont été détruits par sa présence, mais aussi et surtout par son absence dans leur vie.
On dirait que Marina avait besoin de ce livre, au même titre que de son analyse, pour faire son deuil de ce grand-père si présent, si exclusif, pour renaître de sa douleur, de la perte de ceux qu’elle aimait tant.
J’ai eu l’impression qu’elle avait également besoin du regard des lecteurs pour finir son travail de deuil, un peu comme si nous étions là pour donner un sens à sa douleur, pour l’excuser puisque la puissance du maître est si présente que nul n’aurait pu y échapper, alors pourquoi elle ou Pablito auraient-ils pu y arriver mieux que les autres : le lecteur devient témoin, mais aussi celui qui valide les faits, qui leur donne leur raison d’être.
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