"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Nous sommes en Amérique et le calendrier affiche 1973. Par ici, la modernité vient tout juste d'arriver. Pourtant, il suffit de s'éloigner de la ville de quelques centaines de kilomètres pour reculer de plusieurs décennies. Tout est contraste, tout est neuf ou inexploré, tout semble possible. C'est dans ce contexte que deux jeunes parents quittent la ville avec leurs deux fils pour s'installer en campagne dans le but avoué de fuir la modernité.
Cependant, rien ne se passe comme prévu et le climat familial se détériore rapidement. La seule option pour les deux frères est de fuir. Fuir chaque jour les violences parentales vers les champs et les bois, pour s'inventer une autre existence. Dans ce petit village perdu, à force d'aventures, de mauvais coups et d'amours d'été, c'est toute la vie qui leur sera révélée.
Voici la deuxième BD éditée chez Rue de Sèvres, par ce talentueux illustrateur canadien qu'est Yvon Roy.
On lui doit notamment le splendide ouvrage sur l'autisme "les petites victoires" mais aussi l'adaptation en bande dessinée (en collaboration avec Jean-Blaise Djian) du célèbre roman "Agaguk" de Yves Thériault.
Ce nouveau récit se veut aussi autobiographique.
Le scénario de "Graines de bandits" :
Voilà un extrait de vie, d'une jeunesse qui n'est certainement pas des plus envieuses au coeur d'une Amérique profonde.
Yvon Roy a le chic pour nous présenter cette histoire de manière simple, légère, presque innocente, à travers les yeux de ces deux frères, mais qui cache de dures réalités d'adultes qui les dépassent.
Ainsi les deux enfants constatent, bien malgré eux, une dégradation dans la relation de leur parents. Et ils ne peuvent que subir.
Leur mère, étant allée de désillusions en désillusions, supporte difficilement sa condition et devient violente.
Leur père, de son côté, ne semble pas aller dans la bonne direction pour apaiser sa moitié.
Bien au contraire, sous prétexte d'intégration et probablement aussi pour fuir ses échecs successifs, il s'oriente vers une radicalisation religieuse.
Bref comment vivre son bel âge dans de telles conditions ? Et bien en s'échappant quotidiennement et en s'éloignant le plus possible du foyer familial...
Et ces évasions se feront évidemment avec toute l'insouciance et la créativité juvénile, quitte à multiplier les bêtises...
Ce scénario est superbement construit, bien cadencé et rythmé, et ne se veut en aucun cas moralisateur.
C'est une époque décrite presque basiquement avec les souvenirs qui ont marqué l'auteur.
Aucun parti n'est pris en regard de la responsabilité de la mère ou du père... Juste des faits.
Yvon Roy laisse élégamment le soin au lecteur de se faire sa propre opinion.
Du bel art !
Le dessin de "Graines de bandits":
Le dessin de cet opus est dans la droite lignée de ce que l'artiste a déjà réalisé avec "les petites victoires".
C'est à dire un trait très élégant, souple et régulier.
L'ensemble est stylisé, épuré et propre.
Malgré cela les arrière-plans sont d'une grande efficacité. Ils sont travaillés au juste nécessaire pour bien poser l'ambiance.
Le choix des nuances de gris pour la colorisation s'imposait de facto pour évoquer du vécu et des souvenirs.
Cependant le travail des ombres et lumières, les dégradés et les aplats, est incroyablement bien réfléchi et maîtrisé pour donner cette sensation presque palpable de liberté, d'insouciance et de fraicheur de la nature environnante comme si nous le vivions à l'instant présent.
Le découpage est bien varié, alternant tantôt sept vignettes et à d'autres moments seulement trois, avec des cases de tailles et formes différentes mais superbement agencées pour maintenir une impression d'espace.
Les différents plans se succèdent merveilleusement bien et permettent de focaliser sur l'essentiel.
Les effets et artifices graphiques sont discrets et efficients.
Du bel art encore et toujours !
Ce récit est fort poignant et sensible bien que je sois resté sur ma fin.... J'en espérais encore... Vivre une autre jeunesse....
C'est bien, c'est vivant, c'est beau et ça ne laisse surtout pas indifférent.
Bravo !
Canada, 1973, un couple avec deux enfants, deux jeunes garçons, décide de quitter la ville et de s'installer à plusieurs centaines de kilomètres. Tout est à y faire, mais rien ne se déroule comme prévu. Sauf pour les deux garçons qui trouvent là un domaine vaste, un espace pour jouer et tenter moult aventures et inventions. Si la découverte de la nature et des grands espaces de jeu et la confrontation-amitié avec les autres enfants du coin les comble, le climat familial se détériore très vite.
Yvon Roy que j'ai découvert avec Les petites victoires, un roman graphique sur l'autisme, en grande partie autobiographique, continue dans la veine de l'autobiographie en racontant un été de son enfance, l'un de ceux qui transforment. Il est l'un des deux garçons qui fuient l'atmosphère pesante et hurlante de la maison pour s'inventer des histoires.
Le dessin est en noir et blanc, il exprime à la fois la dureté et la violence des crises dans le couple et la tendresse pour les deux garçons qui découvrent, inventent, rencontrent. Les personnages sont mis en valeur, leurs émotions et sentiments, la manière dont les rencontres et les faits les changent. C'est une très belle bande dessinée sur l'enfance et la découverte du monde des adultes. Un livre tout public qu'il serait dommage de ne laisser lire qu'aux enfants.
Il n'y a pas encore de discussion sur ce livre
Soyez le premier à en lancer une !
"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
L'auteur se glisse en reporter discret au sein de sa propre famille pour en dresser un portrait d'une humanité forte et fragile
Au Rwanda, l'itinéraire d'une femme entre rêve d'idéal et souvenirs destructeurs
Participez et tentez votre chance pour gagner des livres !