"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Nous sommes en 1994, cinq ans après la chute du Mur de Berlin, quatre ans après la disparition de la RDA. Rudy W., historien spécialiste de l'empire romain, est invité à un colloque à Leipzig pour parler du limes, cet autre « Mur » qui, pendant près de quatre siècles, a matérialisé la frontière entre l'empire romain et le monde barbare. Pour l'historien cependant, ce qui devait n'être que la calme séquence d'un colloque savant déraille presque immédiatement. Il apprend que son ex-femme, Clélia, avec laquelle il partage un passé d'activiste gauchiste, a disparu. Aurait-t-elle été enlevée par les anciens camarades du groupuscule terroriste auquel elle appartenait ? Et qui sont toutes ces personnes qui abordent Rudy pour lui parler du député Max Leroy, avec qui il a travaillé autrefois? Le politicien est impliqué dans une affaire de corruption à la suite du rachat d'une raffinerie de pétrole de l'ex-RDA. Il aurait omis de payer les rétro-commissions à d'anciens agents de la Stasi, aujourd'hui reconvertis en mafieux, qui avaient servi d'intermédiaires. Parmi ces personnages de l'ombre qui surissent, Bettina, véritable femme fatale, enjôle Rudy tout en le menaçant. L'historien se trouve ainsi pris entre le présent immédiat, ses rencontres successives - largement alcoolisées - et des réminiscences du passé : la rencontre avec Clélia, militante d'extrême gauche à Milan, leur séjour à new York, son amitié avec un certain Dieter, à Paris, et enfin la séparation avec Clélia, qu'il ne parvient pas à oublier.
Histoire d'amour, de mort et de revenants, Bettina Eisner est avant tout un brillant roman noir, qui convoque habilement les codes et les clichés du genre pour les mêler au matériau historique. Un roman dans la veine du film La vie des autres, qui avait su combiner suspense et dévoilement de certains pans peu avouables de l'histoire récente.
Bettina Eisner est aussi le roman d'une génération - la génération qui avait vingt ans en 1968 et qui voulait changer le monde (le gauchisme, la tentation de la lutte armée, les années soixante-dix en Italie...). Intercalant trois registres de discours, le narrateur fait état du conflit intérieur et des tensions qu'instaure cette inéluctable concurrence entre souvenirs, mémoire et Histoire. Avec ce personnage de Rudy W., constamment tiraillé entre des accès de confusion intérieure et de lucidité, Michel Deutsch fait le récit d'une dérive, d'un mouvement de la mémoire à travers diverses topographies, des intrigues politiques et policières. L'atmosphère qui s'en dégage rappelle l'univers des films de Wim Wenders, Rudy W. oscillant entre confusion intérieure et lucidité.
S'il questionne beaucoup l'Allemagne, la question du retour possible, de l'identité, et la recherche de la mythique Germanie, Michel Deutsch déploie un questionnement plus large avec ce roman : il interroge les frontières, le prix qu'il faut payer pour limiter le divers du monde. Le temps des murs, qu'on a cru révolu avec la chute de celui de Berlin, semble renaître. Le barbare, l'étranger qui va submerger l'Occident. La peur panique qu'inspire l'autre. Il faut ériger des murs, le limes, construire un mur sur les rives de la Méditerranée...
Ne surtout pas s'arrêter à la première page (trop de bla-bla qui se veut poétique)! J'ai failli le faire et cela aurait été dommage.
Ce roman raconte l'histoire d'un universitaire français en déplacement dans l'ex-Allemagne de l'Est de 1993 pour donner une conférence lors d'un colloque sur les frontières. Il est spécialiste du limes, mur érigé par les Romains pour protéger l'Empire des invasions barbares.
A un dîner chez l'ambassadeur de France, il rencontre la fameuse Bettina qui s'avère vite être une ancienne de la Stasi. Leur rencontre n'est pas fortuite. Elle a besoin de lui pour une sombre histoire de rétrocommissions. L'universitaire se trouve vite happé dans un jeu qu'il ne comprend pas.
Pour être honnête, l'histoire pourrait être plus courte, la fin plus compréhensible mais j'ai beaucoup aimé la description de cette nouvelle Allemagne, triste et en reconstruction et où la passé ne passe pas. Il y a plusieurs niveaux de lecture: l'intrigue principale, des flashbacks de la vie du professeur (New York dans les années 80), des bouts de conférence sur le limes et les invasions barbares. Tout cela s'entre-mêle sans ordre précis, il faut être attentif mais cela vaut le coup !
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