Hors des sentiers battus, des ouvrages étonnants pour assouvir votre soif de découvertes
Refusant de rester dans la très aseptisée Salve, une jeune femme part pour rejoindre l'Île, la cité qui se construit vers le ciel et à l'ombre de laquelle elle a grandi.
Parvenue au sommet après l'Ascension, elle intègre une nouvelle génération de Bâtisseurs et rejoint les Sculptrices. C'est ici, là où les êtres humains sont cernés par la pierre et marchent au bord du vide, qu'elle pense trouver un sens à sa vie. Pendant des années, elle va s'oublier dans le travail alors qu'autour d'elle certains disparaissent sous des décombres. Mais que cache l'acharnement des Bâtisseurs et d'où vient la pierre qui leur sert à repousser les limites de leur rêve d'Absolu ? Avec ce premier roman, Sarah Serre questionne nos relations à la communauté, nos croyances et dans le même geste, notre aveuglement.
Hors des sentiers battus, des ouvrages étonnants pour assouvir votre soif de découvertes
Un premier livre étonnant avec une écriture simple qui ne dessert pas l'imagination de l'auteure. Un récit qui peut avoir de multiples interprétations. Ce récit serait un excellent support de court pour amener les élèvent à réfléchir sur divers sujet comme: les croyances, l'ambition, le statut dans la société, etc...
Ce n'est pas un livre que j'aurais acheté de prime abord, mais j'ai pris plaisir à le découvrir, d'où l'intérêt des concours de Lecteur.com.
« Vue de loin, l'Île ressemble à une gigantesque montagne de pierre. Elle s'élève, énorme, au milieu d'une plaine ratissée par le vent. Son ombre assombrit tout le pays. La terre située dans cette zone est incultivable, car plongée trop souvent et trop longtemps dans l'obscurité glaciale de l'Île. (…) On dit que cette montagne phénoménale a surgi de la terre en une seule journée, que les pierres y grandissent d'elles-mêmes, que ses habitants dansent sur des ruines, accompagnés du tambourinement de leurs dieux souterrains, on dit que c'est en punition que Dieu l'a fait sourdre de la terre. »
Cette Île, la narratrice en rêve ardemment, adolescente qui s'ennuie dans la conformiste ville du dessous. En quête d'absolu, elle brave l'interdit familial et part rejoindre le flot des Bâtisseurs qui construisent inlassablement l'Île.
Dans cette relecture du mythe de la tour de Babel, Sarah Serre a composé un monde imaginaire très bien pensé, cohérent. On voit cette Île, imbroglio architectural très bien décrit, amalgame de coupoles, mosquées, arches, colonnes, dômes, ponts, cathédrales, arcades, tours, toujours en chantier, en perpétuelle mutation. On comprend les interactions sociales entre les différentes guildes de métiers, entre les nombreuses sectes qui chacune explique à sa façon l'Élévation et la nécessité de construire toujours plus haut dans le but de devenir la Génération faîtière, celle qui atteindra la Ciel.
« Le Vide est infini et c'est en cela qu'il est terrifiant, mais nous avons eu le génie de fabriquer un labyrinthe, simulacre d'infini, rassurant parce qu'humain et donc limité ; il propose une solution. le Vide n'offre aucune solution, il est là, présent et absent, angoissant. »
Ce roman est avant tout une expérience philosophique et esthétique. Cette Île se construit sur une quête existentielle quasi prométhéenne face à l'absurdité de la vie, un défi pour fuir le vide intérieur, quitte à oublier son corps tant bâtir le ciel impose sacrifices et souffrances physiques, allant de la mutilation à la mort d'épuisement ou suite à une chute. Un défi lancé aux dieux tel un antique hybris.
« La douleur est exaltation du corps, mais avec les autres, elle se mue en quelque chose de plus grand. Ensemble, nous formons une pourriture un peu moins rance, une âme qui se compose de corps en miettes, mais desquels doivent surgir le puissant et le phénoménal. »
Il y a quelque chose de terrifiant, voire cauchemardesque, dans l'acharnement de ces bâtisseurs, d'autant qu'ils n'échappent pas aux doutes du bien-fondé de leur quête. Cela, on le sent à travers les mots de Sarah Serre dont l'écriture précise et imagée fonctionne à merveille.
Mais étonnamment, alors que le corps est très présent dans le récit, j'ai trouvé que ce dernier manquait d'incarnation. Impossible de m'attacher à la narratrice dont j'ai suivi en surplomb le pathétique parcours pour tenter de s'intégrer dans la logique insensée de l'Île . Même chose avec l'arc narratif secondaire autour d'un architecte parmi les pionniers. En fait, avec le recul, je pense qu'il m'a manquée du romanesque, avec une trajectoire humaine plus identifiable qui m'aurait touchée.
Malgré un épilogue désenchanté très réussi, cette fable très originale est restée trop minérale pour que j'y adhère totalement. Je salue cependant le travail de l'autrice qui propose une expérience de lecture très différente de ce qu'on lit actuellement, surtout chez les primo-romanciers, et ça, c'est précieux.
L’imaginaire dans sa plus vive exaltation. « Bâtir le ciel », l’élégance d’un récit d’amplitude .
L’Île, une montagne de pierre. Les fantasmes et les rêves, des constructions mentales au summum.
Ici, le regard est déjà voyageur, mendiant et envieux.
La contemplation dans une gloire phénoménale. La beauté d’une montagne où transite les désirs.
Une jeune femme vit dans le monde d’en-bas , dans la ville de Salve. Les habitus dans un ordinaire figé. Elle est attirée par l’Île.
Le panoramique magique, tel un aimant, est puissant et magnétique.
Elle va partir. La transhumance intérieure, fouler avec foi et ténacité, virulence et empreinte, la montée salvatrice, peut-être.
Sa transmutation en advenir, elle ne le sait pas, pas encore.
Le récit est riche de signaux, de métaphores, dans une douceur de ton qui rend hommage à la trame, d’aventure, de quête et de rencontres fortuites ou pas.
L’ascension singulière, l’empreinte dans les sillons spéculatifs. Rien, ici, n’est le hasard. Tout est mythe et mystère, double-fond et métaphysique.
« Car le sommet se déplace irrésistiblement vers le Ciel, et c’est là que nous allons. »
« Je vais voir, me dit-il, une fois là-haut, des palais d’or et d’émeraudes, hein ? Il fait des clins d’œil aux autres et je ris volontiers de mes rêves d’enfant. »
« Je fatigue, j’ai l’impression de marcher depuis des années, de dormir, de geler, et de devoir encore marcher. »
La progression à l’instar d’une initiation. Dans ce hors-temps où les Bâtisseurs prennent les pierres d’en bas. Tout s’écroule immanquablement. Le vide attire ces êtres dans cet espace-monde où resplendit l’innommable. Elle est Sculptrice devenue. La volonté altière de vaincre ses démons. Croire à ce château de cartes, miroir où l’homme ne voit que ses défaites et ses mensonges.
« Là, comment décrire cette lumière. À croire que j’ai vécu dans le brouillard toute ma vie sans connaître les couleurs. »
« Il est agité par l’idée qu’il v connaître la « Renaissance » dans sa vingtaine. Il est à deux doigts de se croire l’élu, le premier à atteindre la génération Faîtière. »
« Mais la pierre a force d’être travaillée, disparaît, s’épuise et nous nous affaissons subrepticement. »
L’émancipation comme une preuve de militantisme, et plus loin encore, à l’instar d’un acte de résistance et de bravoure.
Quitter le monde d’en bas et ce conformisme pâle et morne. Elle est d’efforts et de sculptures, de douleurs et de joies aussi. Le chantier parfait, métaphore d’une renaissance intérieure. « L’absolu en valeur suprême . »
Ce conte philosophique est une pierre de lune qui brille dans la nuit. Ésotérique, dans les cimes macrocosme, tout est ordonné, précis et démontré.
La marche, telle une introspection dans les ténèbres intérieures. « Cherche et tu trouveras », tel est l’adage de ce livre bâtisseur.
L’Île, métaphore sublime. Les Bâtisseurs sont l’emblème de l’apogée créatrice. Entre la pierre et le liant, la concorde qui fait saillir le chantier des intériorités .
Ce livre est l’homme achevé. La morale de la vie, du bien et du mal. L’empreinte cartésienne des réalisations intimes.
« Bâtir le ciel », les migrations intérieures allouées.
Ce livre est un hymne à l’Art. Sensuel et hypnotique, hors du commun.
« L’Île n’est pas un espace géographique, mais une idée, une passion, sans doute une folie : construire plus, plus haut, toujours plus haut. »
Ce serait comme le mythe de Jonas. Une double lecture riche d’enseignements.
L’apothéose du travail parfait.
Sarah Serre nous invite dans une déambulation où l’homme devient matière, l’éternel recommencement.
Ici, règne ce qui ne voit pas dans le grand jour. Bâtir l’Alcazar !
Publié par les majeures Éditions Le Mot et le Reste.
Monter tout là-haut
Pour son premier roman Sarah Serre s’est souvenue de sa fascination de banlieusarde pour Paris. Avec «Bâtir le ciel», elle imagine l’attirance ressentie par une jeune femme par une île et son architecture en perpétuelle mutation. Une fascination qui n’est pas sans risques.
La narratrice de ce conte éprouve, comme nombre de ses contemporains une fascination pour l'île qu'elle aperçoit de sa fenêtre et pour laquelle certains sont prêts à tout sacrifier. Une île mystérieuse, une île qui est aussi terre de légendes et destination maudite, comme l'indiquent les affiches appelant les plus téméraires à la prudence, comme celle qui proclame «Y aller, c'est ne pas en revenir».
Mais, comme souvent, les jeunes ne rêvent que braver les interdits. Alors, forte de ses certitudes, «je crois avoir toujours su ce qu’elle était: une ville qui n'a jamais cessé de se construire, et toujours vers le haut. Ceux qui l’habitent n’en finissent jamais: une pierre sur une pierre sur une pierre, comme des fourmis. Voilà tout ce que j’ai réussi à apprendre en dix-sept ans», elle va à son tour braver l'interdit.
Elle rejoint un groupe d'hommes et de femmes assez intrépides pour gagner l'île et entamer son ascension. Dans cet univers minéral, elle se rend très vite compte de la difficulté de la tâche. Plus elle grimpe et plus elle souffre.
Et quand, après des jours éprouvants, elle dépasse le sommet de nuages, c'est un paysage insensé qui s'offre à elle: «des échafaudages absolument partout, qui recouvrent des centaines de bâtiments, une ville sur la ville, se soulèvent, se bousculent, tournoient au-dessus du vide et menacent de rompre. Jamais je ne pensais voir ce que je vois : un dôme qui pourrait abriter une vallée, tangue de gauche à droite comme un métronome. Des immeubles dont je ne perçois même pas la base, cachés derrière d’autres immeubles, derrière d’autres tours, coupoles, escaliers, ponts, temples, tout ce désordre architectural semble fait de papier et non de pierre tant il est ballotté.»
Persuadée qu'en participant à ce geste architectural, à l'édification de ces bâtiments, elle va réussir à se dépasser, à gagner le ciel, elle se joint aux ouvriers avant de devenir sculptrice. Elle entend, au sens premier du terme, apporter sa pierre à ce projet qu'une secte a nommé L'Élévation.
Comment ne pas voir dans cette quête une métaphore du progrès, de cette idée qu'en avançant dans la maîtrise des techniques et des savoirs, on laisserait derrière soi un monde meilleur. C'est fort de cette idée que jour après jour des milliers de personnes poursuivent inlassablement leur mission, même lorsque des accidents se produisent, lorsqu'un bâtiment s'effondre...
Personne ne prend le temps de faire une pause, de réfléchir. Qui se demande si les pierres vont suffire pour pouvoir atteindre le ciel? Qui s'occupe de savoir si les fondements de l'île sont assez solides pour supporter toujours davantage de constructions? Sarah Serre a choisi le conte pour nous mettre en garde. Face à un monde de plus en plus fragile, l'acharnement n'est-il pas coupable? Et au-delà, n'est-il pas déjà trop tard?
La chronique de la genèse de ce projet, que la romancière a choisi d'insérer entre les chapitres, laisse penser que tout était déjà écrit, mais qu'on n'a pas vraiment pris garde à cet avertissement. Nous sommes désormais aux portes de l'apocalypse. À force de jouer les apprentis-sorciers, de vouloir toujours davantage nous éloigner de la nature, on construit finalement un monde qui n’a plus d’attaches. Les éboulements et les disparitions sur l’île sont symptomatiques d’une humanité qui part à la dérive.
NB. Tout d'abord, un grand merci pour m'avoir lu! Sur mon blog vous pourrez, outre cette chronique, découvrir les premières pages du livre. En vous y abonnant, vous serez par ailleurs informé de la parution de toutes mes chroniques.
https://urlr.me/PzBym
Premier roman minéral, entre littérature blanche et imaginaire, écrit tout en simplicité mais doté d'une
profondeur insoupçonnée. "Bâtir le ciel" fait penser au mythe de Babel, en interrogeant la vanité humaine mais il a quelque chose de plus moderne et de plus générationnel dans le traitement. C'est une sorte de rêve, tout est très onirique et inspiré. Étrangement cependant ce rêve a quelque chose de lucide et la chute de l'histoire de la protagoniste nous révèle quelque chose d'évident.
Un premier roman atypique, rafraichissant, qui a le mérite de nourrir notre imagination !
L'histoire d'une ascension réelle ou imaginée, métaphorique sans conteste. Un peu mythe de la tour de Babel, un peu Le château de Franz Kafka, une cité où l'on n'arrive jamais, où la chute peut être brutale. Un livre étrange que j'ai terminé mais je n'ai que moyennement apprécié. Il m'a manqué une clé pour comprendre cette histoire.
Déroutant mais néanmoins bien écrit.
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