"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Dans un style elliptique qui survole sans approfondir et pourtant touche juste, l'autrice relate une histoire d'amitié puissante .
Le temps d'une année scolaire, par le jeu de rencontres improbables, un lien fort unit une européenne venue enseigner le français à l'université, un garagiste amateur de concerts et de spectacles et une esthéticienne qui a le pouvoir de remettre âme et corps au diapason le temps d'une manucure !
Ils sillonnent ensemble la ville de Chicago, toile de fond et 4ème personnage du roman.
Vraiment, une lecture qui m'a plu !
Le lecteur découvre Ramona, une jeune femme venue d’Europe pour enseigner à Chicago. Elle est solitaire, a du mal à s’adapter et s’intégrer. Elle va rencontrer un jeune homme lors d’un concert à l’opéra, Jon.
Jon est garagiste, lui aussi est enfermé dans sa solitude et sa difficulté à aller vers les autres, sorte de timidité. Il va faire la connaissance de Suzanne, esthéticienne, la cinquantaine.
Et puis les trois personnages vont sortir ensemble un soir et ensuite passer tous leurs week-ends ensemble. Ramona et Jon pourrait être amoureux l’un de l’autre mais sans la présence de Suzanne ils n’arrivent pas à se parler, à être ensemble.
On les suit donc tous les trois dans leur découverte de la ville de Chicago pendant un an, jusqu’au jour où Ramona retourne dans son pays et où Suzanne part sans prévenir, rattraper par son secret qu’elle ne veut pas révéler à Jon et Ramona.
J’ai bien aimé aussi le personnage de Josepha, une cliente de Suzanne, qui se sent revivre après chaque manucure. Les mains de Suzanne ont une « chaleur guérisseuse ».
Un roman sur l’amitié, très court (135 pages), tout en délicatesse, avec des personnages attachant. A découvrir !
C’est l’histoire d’une ville où plutôt d’une fille qui débarque dans cette ville. Professeure de français à l’université, Ramona saisit vite que cette ville n’est pas aussi lisse et proprette que l’image qu’elle renvoie. Mais comment sillonner cette mégapole sans risquer une agression ?
Plutôt timide, elle se risque un soir à aborder Jonathan qu’elle a déjà aperçu à plusieurs reprises à l’opéra. Cette fois il est accompagné de Suzanne.
D’ailleurs, ce n’est pas tant l’histoire d’une ville que celle d’une amitié entre trois solitaires : une professeure, un mécanicien et une esthéticienne.
C’est un roman très court mais tout en nuance, en subtilité où l’évidence est acquise et ne nécessite aucun superflu ... comme cette relation amicale. Il y a une certaine poésie dans cette histoire (la manucure de Jonathan par Suzanne en est un bon exemple) qui nous permet d’effleurer en douceur le mystère de ces trois êtres.
«En sortant du taxi, la première chose qu’elle sent, c’est la moiteur de l’air sur sa peau. La première chose qu’elle entend, c’est le sifflement continu des insectes, cachés dans les branches, qui n’en finissent pas d’expirer leur stupeur d’avoir si chaud. Ramona a soif, déshydratée par ces heures d’avion où l’on n’offre pas d’eau comme en Europe. Le chauffeur réclame cent dollars. Tout le long du trajet, Ramona avait tantôt étudié le reflet renfrogné de cet homme dans le rétroviseur, tantôt admiré la skyline qui défilait à sa droite, élévation soudaine des tours sur la terre étale du Midwest. Sur sa gauche, le grand lac Michigan n’en finissait pas.»
Ramona, une prof de français, part enseigner une année dans la plus grande ville du Midwest. Un prénom qui dissimule le côté autobiographique du séjour qui aura permis à Marion Richez de faire ses premiers pas de romancière.
En effet, dans un entretien accordé au journal Le Populaire du centre (la famille de Marion Richez s’est installée dans la Creuse) en septembre 2014, au moment où sortait son premier roman L’Odeur du minotaure, elle expliquait qu’elle rêvait de devenir écrivain ou journaliste, avant d’ajouter «J'ai écrit mon premier roman en 2009 à Chicago lors d'un échange universitaire. J'avais besoin pour écrire de cette distance avec l'Europe. Ici, on est écrasé. Ce texte n'a pas été publié mais il m'a permis d'être remarquée par Sabine Wespieser». Achevé en janvier 2012, le voici retravaillé et publié.
Pour une française qui débarque dans la troisième ville des États-Unis, l’adaptation n’est pas facile, même quand on a l’esprit ouvert et qu’on est prête à s’adapter à l’American Way of Life. Il s’agit d’abord d’appréhender la géographie, l’espace, les dimensions, oublier qu’il n’existe pas comme en France une topographie basée sur un centre-ville autour duquel on peut s’orienter, mais plutôt quelques points de repère, le campus, le centre historique, le lac Michigan, les gratte-ciel de Downtown, le Loop. Et si on imagine à première vue qu’un plan en damiers est aisé à appréhender, il faut pouvoir relier distance et durée pour évaluer qu’entre la 10e et la 20e rue il faut compter une bonne demi-heure. Passés les premiers jours, Ramona s’enhardit et découvre aussi bien les faces sombres, les gamins noirs appréhendés par la police, placés en ligne les mains dans le dos, que la richesse culturelle et cette superbe représentation du Faust à l’opéra lyrique. Au fil des semaines, elle va se confronter au blizzard, se jurer que cet hiver sera le dernier qu’elle aura à affronter, avant de découvrir le soleil du Wisconsin qui fait oublier le froid. Mais elle va surtout faire une rencontre capitale. Jonathan, ce grand jeune homme qui est tout autant passionné qu’elle par la musique, va partager ses émotions avec Ramona, lui présenter son amie Suzanne. Très vite, leurs affinités électives vont en faire un trio de plus en plus proche. «Tous les trois attendant de se revoir, le samedi suivant ; et le souvenir des deux autres, la semaine, ressemble au printemps logé secrètement dans l’hiver.»
Une belle histoire d’amitié qui transforme ce séjour et qui rend difficile l’idée de partir. Quand Ramona rejoint son père à Londres pour les fêtes, c’est une déchirure. À son retour Suzanne et Jonathan «lui offrent cette ivresse d’un présent brut, vécu à plein, sans rien sacrifier aux regrets, aux remords, sans non plus se consumer en projets d’avenir.» Car ils savent que désormais le temps est compté, que le départ est programmé.
Marion Richez fait de cette parenthèse américaine un récit sensible, qui balance entre le bonheur d’une expérience enrichissante et la nostalgie d’une rencontre lumineuse, enrichissante.
https://urlz.fr/bQb4
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