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« Soudain une lumière bleue inonda la pièce, un formidable éclair. «Couchez-vous ! Restez où vous êtes, dit-il sans s’affoler. La table va être contaminée. » »
Ce pourrait être un excellent roman d’espionnage avec tous les ingrédients du genre : un meurtre, des savants isolés dans une base militaire, un énorme secret, des espions, un enquêteur, une femme mariée beaucoup trop séduisante. De quoi passer un bon moment.
Mais c’est bien plus que ça. La possibilité de passer trois mois aux côtés du général Groves et de Robert Oppenheimer, les patrons de l’opération Manhattan, de vivre à Los Alamos comme si un laissez-passer vous était tombé du ciel.
Santa Fé, avril 45, dans un parc de la ville, un cadavre est découvert dans une position scabreuse. Il ne porte aucun document d’identité et personne ne semble le connaître. La police locale conclut à un rendez-vous sexuel ayant mal tourné.
A une trentaine de kilomètres de là, à Los Alamos, la surprise fait rapidement place à la prudence. On connaissait la victime, agent de sécurité, mais pas ses goûts sexuels. Alors, sait-on jamais, l’armée n’aimant pas les surprises, on y dépêche un enquêteur chargé d’enquêter sans laisser penser qu’il enquête. Pas question de distraire le quarteron de nobélisés et l’escouade de nobélisables du « gadget », comme ils l’appellent, sur lequel ils s’apprêtent à effectuer les derniers réglages. Il doit s’assurer que la version de la police, qui arrange bien des choses est bien la bonne, parce que sinon…
Joseph Kanon est un excellent écrivain (j’en suis à mon cinquième roman avec toujours le même plaisir et celui-ci est le meilleur), il sait fort bien décrire la vie quotidienne de la base, les états d’âme ou les certitudes des savants qui mettent au point une arme terrifiante. Il dépeint aussi très bien le souci du secret, la crainte des fuites et l’obsession de terminer au plus vite, pour prendre de vitesse les nazis. Ses personnages sont consistants et crédibles.
Il vous emmène dans le désert voisin, sait vous décrire ces lieux désolés et superbes, vous parler des habitants précolombiens de la région, les Anasazis, disparus un jour sans explication comme pour défier les anthropologues. Bien sûr, il ménage le suspens jusqu’à la fin, jusqu’au moment où un monde nouveau, vertigineux et terrifiant nait d’un éclair prodigieux. Magistral !
« Oppenheimer se tourna lentement, étonné. « Vous croyez ? Prométhée ?
_ Non. Le feu était un cadeau. Ceci est une malédiction. »
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