"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Emouvant, ce futur grand classique est œuvre. Retenir des yeux la première de couverture, chaleureuse, incitative. Les larmes du duvet telles des plumes abandonnées.
« Avant le repos » est un récit de vie. Pas n’importe laquelle. L’heure est grave. L’incipit : « Parmi les lieux dans lesquels s’est déroulée et conclue l’existence d’Italia Donati, celle qui m’interpelle le plus fortement et avec le plus d’insistance est Cintolese son village natal. »
Nous sommes en Italie aux prémices du XXème siècle en Toscane au milieu des chapelles endormies. Dans une aube de senteurs, de chaleur, d’extrême pauvreté. Les ruelles se signent. Les regards lourds, insistants chassent les nuages à coup de rancoeurs, de jalousies. Les oliviers murmurent telles des portes qui grincent, sournoises et malhabiles. Les enfants épuisés, alourdis de contraintes cherchent des yeux ce qui pourrait changer dans ce quotidien gorgé de latrines nauséabondes. Ecoutez l’histoire qui advient, elle est véritable, elle se mérite. Elle ne pourra plus vous lâcher.
Dignement, sobrement menée par Elena Gianini Belotti, italienne qui a dirigé de 1960 à 1980 le centre pour l’enfance Montessori. Ce n’est pas un hasard. L’autrice est habitée par ce souffle de l’éducation. Par ses convictions et l’importance du tracé mémoriel qui lézarde les murs de Pistoria de honte. L’autrice est là. Altière, sur la plus haute marche. Ecoutez le chant de Porciano et les refrains rendant hommage à Italia Donati. Nommée institutrice dans ce village. « Sa pensée est assaillie par l’unique paire de chaussures qu’elle possède, plusieurs fois ressemelées, déformées à l’empreinte usée…Elle soupire, humiliée par tant d’indigence. Elle n’est plus une paysanne qui peut s’habiller de loques, elle est une institutrice qui doit faire preuve de bienséance, et le respect des gens, leur considération se fondent aussi sur la correction des vêtements et la dignité de l’apparence extérieure. Elle se sent peu sûre d’elle-même, déplacée, exposée aux jugements d’autrui.
Elle, la pauvre, la belle, l’humble, la sage, la femme vierge, l’institutrice. La littérature rayonne. Chaque mot est une note de musique triste dédiée à Italia Donati. Nous sommes en plongée dans l’idiosyncrasie d’une époque. Ecrasée par l’habitus d’un village où le maire est celui qui a tous les pouvoirs sur le corpus enseignant et ses fragiles brebis. Porciano imprégné de cabales, d’hostilités, de dénonciations calomnieuses. Il y a un adage qui dit « Quand on veut tuer son chien, on dit qu’il a la rage. » Italia est prise au piège. L’école, le village sont des proies. Elle, si pure, si intègre. Le mal enfle, sournois. Le manichéen est immense. D’un côté Italia. Marianne abandonnée à son sort, victime de l’emprise des hommes, de ces femmes soumises aux mensonges et aux certitudes trompeuses. Un maire arrogant, vil, patriarche d’un village sous son emprise. Italia est une femme libre. Elle veut vaincre les démons qui insistent et l’encerclent. Elle veut rétablir son honneur au fronton de son école et en elle-même. Et là, les amis on pleure sous la beauté des lignes, sous l’écorce d’un mal qui ronge insidieusement Italia. Elle est le bouc-émissaire d’une époque qui broie les femmes savantes, ces pauvresses des campagnes où le travail se doit d’être labeur et reins courbés en plein champ. Italia reste digne. L’épingle à nourrice, sceau de ce livre est rédemption et abandon. Ce récit qui encense le courage et la vertu est majestueux, touchant, triste comme un ruisseau qui n’en peut plus des pierres jetées à son insu dans le limpide du pur qui s’écoule. « Avant le repos » est d’une beauté immense car véritable. J’entends les pas d’Italia, encore, maintenant. Et je pleure. Traduit à merveille par Christine Lau. Les majeures Editions DO viennent de mettre au monde un livre culte.
Permet de mesurer l'influence des conditionnements sociaux sur la formation du rôle féminin dans la petite enfance, dans les années 1970.
L'auteur mesure l'attente fondée dans la petite fille bien avant sa naissance et jusqu'au bout de sa vie. (hostilité envers le sexe féminin, appartenance à un sexe, le rôle des jeux et des livres, la soumission des filles même à l'école).
Thèse qui ne laisse pas de marbre.
A lire ensuite : Quoi de neuf chez les filles? de C. Baudelot et R. Establet, qui partent de ce livre pour faire un point de nos jours.
thèse très convaincante, que je cite souvent, mais qui laisse souvent perplexe mes contradicteurs
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