"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Bernard Pouchèle a un destin hors du commun. Né dans un bistrot à Coudekerque-Branche, il échappe aux bombardements de Dunkerque caché dans un corbillard. Puis tour à tour, élève rebelle en orphelinat, instituteur, employé de commerce médiocre, marin recalé pour cause de mal de mer... De son enfance en Flandre, il garde le souvenir anecdotique, émouvant, qu'il conte ici avec le décalage d'un homme qui en a vu d'autres, appuyé par les photos de Pierre Josse.
De son vagabondage volontaire pendant près de dix ans sur toutes les routes de France, Bernard Pouchèle a tiré un récit devenu un bestseller, L'Etoile et le Vagabond (porté à l'écran par Gérard Darmon et Ludmilla Mickaël). Il publie dans la foulée, Pouch et l'enfance du Vagabond, Les Péchés du Vagabond et La Flamande, récompensés de deux prix littéraires. Aujourd'hui, il prend plaisir à écrire des polars comme Samedi, l'évêque a raté le bus ou Les Porcs de l'angoisse où l'on retrouve son humour sarcastique et ses personnages plein d'humanité.
Il a rencontré sur sa route Pierre Josse, co-fondateur et rédacteur en chef du Guide du Routard, avec qui il a perpétré Paysans sans frontière, Deux vagabonds en Irlande, et bien d'autres où les deux vagabonds honorent de leurs textes et photographies les petites gens des 4 coins du monde.
Bernard Pouchèle l’écrit : « Voilà ce deuxième voyage terminé, et le troisième, le grand, sera pour moi pour bientôt. » « Avant de casser ma pipe, j'ai enfin décidé de parler de moi. Ce livre, c'est mes tripes ».Cher monsieur, je viens juste de faire votre connaissance, alors, s’il vous plaît, attendez le plus longtemps possible.
C’était à ça que je pensais pendant que Pierre photographiait le billard Nicolas et ces vieux meubles pour les ranger quelque part dans son guide. Voilà encore deux vérités pour un même endroit. Ah, la différence entre l’œil qui voit et l’œil qui se souvient.
Cette phrase résume fort bien ce livre. Pierre Josse photographie les lieux insolites et Bernard Pouchèle photographie ces mêmes lieux pour en faire revivre les souvenirs, les parfums, les mots, les noms. Un qui voit et l’autre qui se souvient, quel beau tandem. Bernard Pouchèle, dans les pages blanches est dans sa jeunesse, lui l’orphelin que ses grands-parents ont dû placer à l’orphelinat à Bailleul.
J’aime également les petites phrases sarcastiques qui remettent les choses à leur place.
Parce qu’hélas et encore, un quatre d’heure d’histoire a apporté, avec un film sur les Cht’is, la vérité de la convivialité profonde des gens du Nord, leur sens du partage, de la fête. Il fait quand même manger du maroilles à Bergues, ville d’origine du vieux Bergues, un des meilleurs fromages français.
Pour le tout-venant de nos concitoyens, pour le touriste bac sans lauréat, pour le quidam lambda, le Nord et la Flandre ne sont encore, à part la gare Lille Europe, l’avant-centre belge du Losc et le Paris-Roubaix, qu’un pays noir, sinon gris, un pays gris sinon noir, un pays de friches ouvrières, de cheminées d’usines qui sont tristes d’avoir arrêté de fumer, un pays de mines fermées alors que la plupart des gens ici ont plutôt la mine ouverte.
Que de poésie dans ce petit livre, un régal, je pourrais retranscrire des phrases et des phrases.
Bernard Pouchèle, vous m’avez envoûtée et déjà sensible aux chansons de Brel, vous me donnez vraiment l’envie d’aller faire un tour des Flandres. J’ai aimé votre ton sarcastique, votre humanité, votre amour des Flandres, des gens, des paysages. Vous nous racontez votre histoire qui rejoint la grande histoire.
Un ciel bas. Un ciel flamand. Un ciel lourd comme un repas de Bruegel l’Ancien. Des nuages arrêtés mouillent les pannes d’un beffroi là-bas et éciment une cathédrale de briques rouges au loin sur la plaine noire.
On passa une petite butte et ce fut Pitgam. Pitgam, petit village des Flandres, avec sa mare en carré sur la place centrale, son église de belles briques, près d’un bois, son forgeron dont on entendait tinter l’enclume, une belle ville à vélo, la cuisse blanche dans une robe plissée se signa devant nous, puis partit dans un rire nacré.
Comme dans l’annuaire téléphonique, il y a les pages jaunes, reproduction des pages du guide des routards Nord Pas de Calais.
Parlons des photos de Pierre Josse, traitées en noir et blanc. Des photos qui se jouent des lignes horizontales ou verticales, la lumière, le ciel souvent présent…. Quant à celles des estaminets, le traitement du grain leur donne un air ancien qui leur va bien au teint et l’envie de goûter à cette bière, la «Trois-Monts »
Oui, je suis séduite. Ce livre est aussi bien fait de sa personne à l’intérieur qu’à l’extérieur. La qualité du papier, de l’impression. C’est un vrai guide pour les touristes de la poésie vivante, un réel hommage à sa région et aux gens qui y vivent, merci Bernard Pouchèle pour ce beau moment d’intimité avec vous.
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