"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Brasserie parisienne, restaurant étoilé, auberge gourmande, bistrot gastronomique, taverne mondialisée, cantine branchée, Mauro, jeune cuisinier autodidacte, traverse Paris à vélo, de place en place, de table en table. Un parcours dans les coulisses d'un monde méconnu, sondé à la fois comme haut-lieu du récit national et comme expérience d'un travail, de ses gestes, de ses violences, de ses solidarités et de sa fatigue. Au cours de ce chemin de tables, Mauro fait l'apprentissage de la création collective, tout en élaborant une culture spécifique du goût, des aliments, de la commensalité. À la fois jeune chef en vogue et gardien d'une certaine idée de la cuisine, celle que l'on crée pour les autres, celle que l'on invente et que l'on partage.
Court texte de Maylis de Kerangal sur la cuisine, à travers le parcours d'un jeune homme qui ne s'y destinait pas particulièrement. Elle s'empare de son sujet et nous voilà véritablement avec Mauro dans les cuisines. Le vocabulaire est soigneusement choisi mais point trop technique. Il sait dire à merveille la beauté et la difficulté de ce travail. Les coups de stress lorsque Mauro veut faire bien et bon avec des produits sains et de qualité, les semaines de 70 heures pour un salaire pas vraiment en adéquation, la fatigue, les plats à inventer en fonction des arrivages du jour, mais aussi la satisfaction des clients qui reviennent, qui conseillent, qui félicitent.
Mi-roman mi-documentaire, c'est la collection initiale au Seuil : Raconter la vie, qui veut cela, mais c'est aussi un genre dans lequel l'auteure excelle. Son style est toujours élégant, soigné, de belles phrases, parfois longues, qui donnent le rythme, qui sait prendre le temps, contrairement à un cuisinier en plein rush. Bref, ce livre donne envie de fréquenter les bons restaurants, pas forcément les chers, mais ceux qui travaillent des produits frais, pour se faire plaisir et encourager et remercier tous les Mauro.
"Mauro passe l'examen en candidat libre un an plus tard. Ce jour-là, il revêt la tenue de cuisine qu'il doit porter pour les épreuves, une tenue achetée chez Monsieur Veste pour 68 euros et qu'il choisit blanche : pantalon et veste de cuisine, mocassins spéciaux, tablier demi-chef (longueur aux genoux), calot -il défile à travers le petit jardin, silencieux, le torse étroit moulé dans le tablier, ses longs bras fins, puis me regarde, dubitatif : ça va ? j'ai l'air d'un clown ou pas ? Je souris, il n'est pas mal du tout et totalement crédible." (p. 56/57)
Ce texte est publié dans la collection "Raconter la vie" des Editions du Seuil. L'objectif de cette collection est de donner la parole aux "invisibles", aux gens ordinaires.
Dans ce livre (de commande), Maylis de Kerangal nous relate la vie de Mauro, cuisinier trentenaire au parcours atypique.
Tombé, enfant, dans un livre de cuisine dont il avait réalisé toutes les recettes, il a suivi des études d'économie tout en cuisinant pour ses potes des plats roboratifs et bon marché (pas plus cher qu'un fast food, mais tellement meilleurs), tant à Paris qu'en Erasmussien au Portugal...
Au retour de son semestre Erasmus, il alternera jobs en cuisine , balades européennes et master d'économie avant de passer le CAP cuisine en candidat libre et de se lancer dans cette profession.
Une histoire intéressante, mais un objet littéraire étrange ...
Pas un roman, vu la collection qui héberge cet ouvrage,
Pas une biographie pure, dans la mesure où la narratrice se pose en amie de Mauro, dès le début de sa vie ...
Et c'est cette (fausse) amitié qui m'a posé problème au cours de ma lecture, car elle pollue le regard factuel nécessaire à toute biographie, y incorporant une part d'affect qui brouille le parcours de ce jeune homme
En tout état de causes, le cursus suivi par Mauro était passionnant, ses choix de cuisine, construits un peu au hasard de ces différents jobs, étaient bien dans l'air du temps, au point où je le verrais bien participer à Top Chef !
Mais ce livre ... ?
Bref, je suis déçue car j'attendais tellement mieux de l'auteur au vu de ses écrits précédents, que ce soit Naissance d'un pont ou Réparer les vivants !
Mauro est un jeune comme on en rencontre beaucoup : il fait des études supérieures qui ne l'intéresse pas vraiment. En revanche, il aime une chose : cuisiner, il a toujours aimé cuisiner pour sa famille, pour ses amis. Alors il se lance, il fait des extras, puis il est commis et il passe son CAP, puis il ouvre un restaurant, le ferme. Il commence autodidacte, apprend la cuisine familiale, la cuisine traditionnelle, la cuisine gastronomique : l'important est d'apprendre, de manipuler, de créer, de partager.
Ce livre est court mais il est ancré dans la réalité. et là, on retrouve la patte de l'auteur : décrire des métiers, des situations, des évolutions des êtres humains enrichis par leurs expériences.
Après « Naissance d’un pont » où elle s’attachait à la vie d’un chantier et « Réparer les vivants » où elle nous plongeait au cœur de l’activité d’un chirurgien en cardiologie, c’est le métier de cuisinier que Maylis de Kérangal explore cette fois dans « Chemin de tables ».
Deux heures sur un banc au soleil m’ont suffi pour me régaler de ce petit récit de 100 pages aux confins du documentaire, du reportage et de l’œuvre littéraire. L’auteur suit le jeune Mauro, la vingtaine, hésitant entre ses études de sciences économiques, ses voyages Erasmus et ses découvertes en cuisine. Il n’est pas obligatoirement passionné mais aime à régaler ses amis, à travailler le produit, à multiplier les expériences en cuisine.
Le récit de l’auteur, témoin de ce parcours initiatique est tout à la fois sensuel, exigeant, rugueux comme l’est le métier de chef. On sent qu’elle se pourlèche, se délecte et savoure chacun de ses mots et nous entraîne avec elle vers des sommets culinaires. Parallèlement, rien ne nous est caché de l’envers du décor, ses contraintes, ses difficultés. J’ai aimé cette langue directe et variée qui si bien décrit le geste, l’ustensile ou la fatigue.
Maylis de Kérangal où l’art de nous envoûter.
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