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Toute l'histoire récente du système scolaire témoigne du travail d'objectivation fait pour imposer une représentation du technique comme propriété " naturelle " des objets du savoir technique et des relations à ces objets, et lui opposer les propriétés non moins " naturelles " du savoir général et des relations à ces savoirs.
Que l'école raisonne en termes de pratique/théorie, concret/abstrait, informel/formel, savoir-faire/savoir, métier/culture, etc., c'est toujours en référence au couple paradigmatique Technique/Non Technique qu'elle opère la distinction hiérarchique entre les filières, les disciplines, et les élèves auxquels elle transmet cette opposition de façon explicite et implicite. Mais les élèves reprennent-ils à leur compte ces représentations dans lesquelles ils sont pourtant durablement instruits ? Pour prendre par là même la mesure de la différence entre leurs représentations et celles de l'école, la recherche aborde le Technique comme rapport aux savoirs et à leurs pratiques scolaires quelle qu'en soit la discipline.
La trentaine d'entretiens réalisés auprès d'élèves de toutes filières arrivés en fin d'études secondaires, a ainsi permis de construire le réseau implicite de sens dont ils investissent les termes de l'opposition et de mettre au jour la logique propre à leurs processus de pensée. L'analyse révèle des représentations en rupture avec les stéréotypes scolaires :
- Le Technique n'est pas d'abord un rapport professionnel (finalisé) à un type de savoir mais un rapport au monde, transversal à l'opposition entre disciplines et filières.
Le savoir n'est pas pour les élèves une formalisation de l'expérience mais ce qui lui donne sens.
- Donner sens au savoir, ce n'est pas le rapprocher de leur " vécu " : le réel n'est pas réductible au " vécu ", le sens ne s'épuise pas dans l'expérience mais il s'incarne aussi dans des objets de savoir réputés abstraits (les mathématiques), symboliques (les oeuvres littéraires), ou topiques (les figures technologiques).
- Ce qui permet de donner sens à ces savoirs, c'est en réalité le style de l'enseignement, " captivant " ou " barbant ", quelle qu'en soit la discipline.
Et il n'y a à cet égard, aucune pédagogie plus " active " que d'autres : l'écoute silencieuse d'un cours magistral peut y réussir aussi bien que l'animation pédagogique de la classe.
- Orientés par l'échec, les élèves des filières professionnelles opposent un démenti aux représentations négatives que l'école a projetées sur eux : condamnés dès la 5e, voire dès l'école primaire, à être inaccessibles à vie à la pensée conceptuelle et à la réflexion philosophique, littéraire, historique, mathématique, ils manifestent un intérêt marqué, voire une passion, pour les disciplines générales qui témoigne d'une saine résistance à assimiler leur destin scolaire et professionnel à un quelconque destin personnel et identitaire.
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