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Au tournant des années 1990, Maurice Tourigny était le correspondant du Devoir à New York. C'est également lui qui décrivait, pour le bénéfice des auditeurs, les représentations d'opéra diffusées en direct du Met, le samedi après-midi.
Quelques années plus tôt, il avait quitté Québec, sa ville natale, et l'ambiance bourgeoise dans laquelle il avait grandi. À New York, c'est une vie toute nouvelle qu'il a voulu se créer. Une vie de liberté, d'épanouissement, de création artistique. Une vie qui nie toutes les entraves. Malheureusement, c'est très vite la mort qu'il trouve au bout de son chemin. Le verdict est irrémédiable : sida. Et cet homme qui voulait faire de sa vie une fête, la réalisation de tous les possibles, se voit obligé à la place de vivre sa mort, de la vivre jusqu'au bout.
En racontant le destin de Maurice Tourigny, Hélène de Billy célèbre New York, la ville qu'elle était jusque dans les années 80, c'est-à-dire ce que l'Occident a créé de plus proche de son idéal de liberté et de poursuite du bonheur. Elle évoque aussi de façon poignante ce que la
ville est devenue ensuite, un immense mouroir où des centaines de milliers de jeunes gens ont connu une fin atroce. Bon nombre de ces jeunes gens appartenaient aux cercles les plus dynamiques et les plus créateurs de ce qui était alors la capitale du monde. Et ce livre est une sorte d'hommage à toute cette génération perdue.
Au-delà du sort des victimes, La Vie ouverte s'attache à montrer comment leur maladie et leur mort a également transformé la vie de tous ceux qui les entouraient : compagnons, femmes, parents. Elle montre aussi combien, pour exceptionnel qu'a été leur destin, il n'en reflétait pas moins le désir qui est en chacun de nous de trouver la vie idéale, la liberté, l'amour. Ainsi Hélène de Billy trace toute une galerie de portraits des gens qui on entouré Maurice. Son grand-père, victime de ses démons. Sa tante, qui bien des années avant lui avait quitté Québec pour New York, à la recherche d'horizons plus vastes. Son compagnon, Ken, à l'enfance tragique. Hélène de Billy dessine chaque personnage avec une remarquable sûreté de trait, évoque magistralement milieux et époques. Elle accompagne son texte de nombreuses illustrations. Enfin, le livre est surtout un hommage à Maurice Tourigny, un homme comme tant d'autres qui a eu le courage de défier l'ordre établi pour chercher sa vérité, qui a eu le courage encore plus grand de faire de la mort une ouverture sur la vie.
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