"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Pendant combien de temps peut-on supporter deux amours inconditionnelles ? Pendant combien de temps une femme peut-elle vivre écartelée entre une passion amoureuse et un amour absolu pour ses enfants ?
Dans ce nouveau roman, Emma Becker regarde en face et dévoile sans complaisance les moments les plus dangereux, les plus intenses et les plus beaux d'une vie.
Elle ausculte ici le mal joli, cette traversée des plaisirs incandescents et des peines inavouables qui scandent un amour interdit. Et elle nous conte cette histoire d'amour, ou plutôt nous la fait vivre en temps réel, durant un printemps, un été et un automne.
Trois saisons privée des siens auprès de l'homme qu'elle aime, privée de lui auprès des siens.
Trois saisons dans la vie d'une femme.
Trois saisons d'extase et de déchirement.
Emma Becker va encore plus loin dans l'écriture de l'intime et jamais elle ne nous avait tendu un miroir aussi universel.
Mais où est donc la libération de la femme dans toute cette affaire ?
Est-ce moi qui n’ai rien compris à ce qu‘Emma Becker avait à nous dire ? Est-ce moi qui n’ai pas su lire entre les lignes ? Probablement puisque ce livre est sélectionné par plusieurs jurés de prix littéraires de cet automne. Pourquoi n’auraient-ils pas vu ce que j’ai vu moi ? Pas possible, à moins que volontairement ils choisissent de laisser parler des voix qui se sont senties muselées durant tant d’années. La libération de la femme doit-elle passer par là ? Pas certaine du tout, du tout.
Ceux que je n’ai pu m’empêcher de plaindre, ce sont le compagnon de l’héroïne ainsi que ses enfants. Le premier a dû prendre un sale coup dans son amour propre ; les seconds ont dû se demander ‘’mais avons nous réellement existé aux yeux de notre génitrice ?’’
Je concède que je ne mâche pas mes mots dans mes écrits, mais c’est parce que je pense que l’on peut se faire entendre et se sentir prise au sérieux lorsqu’on expose un mal être, sans pour autant avoir à passer par une attaque en bonne et due forme de la gente masculine et du concept patriarcal. Je ne cherche pas à mettre quoique ce soit sous le tapis, je suis une femme, une femme qui a vu pas mal de drôles de situations dans son entourage immédiat.
Mais la question qui me taraude le plus c’est : était-il besoin d’en faire un roman ? Qui l’autrice a-t-elle cherché à venger ? Peut-être que beaucoup de femmes lui ont exposé leur mal être et leur impossibilité de tirer un trait sur un passé terrifiant pour elles. Si c’est cela l’origine de ce livre, alors je vais le relire, le reprendre sous un autre angle de lecture. Certainement que je comprendrai mieux pourquoi Emma Becker a cherché à rendre les personnages détestables. Mon malaise sera alors possiblement moins profond.
Parlons aussi des scènes de sexe. Et pour en parler il va falloir que je me dévoile un peu. Je me suis réellement amusée à la lecture des « Cinquante Nuances de Grey » de E.L. James et n’ai donc pas craché dans la soupe. Mais dans « Le Mal Joli » j’ai lu tout autre chose. Quelque chose de cru et de nettement moins joli. Qu’il n’y ait pas forcément de sentiments dans un certain nombre d’échanges sexuels, ça je le concède, mais que ce ne soit qu’une énumération de mots crus pour expliquer un échange physique, là je me suis sentie perdue.
Aucune figure de style dans l’écriture, aucun coup d’éclat dans l’adultère dépeint, aucune sensualité dans les scènes évoquées, aucun moment de détente dans cette lecture ; personne n’a sauvé personne dans ce livre…si c’est cela que l’autrice cherchait à faire.
Emma Becker a fait de ses histoires de fesses son fonds de commerce. Mais pour appréhender sa démarche d'écrivaine dans toute sa profondeur, il ne faut pas s'arrêter aux scènes particulièrement crues qui essaiment son dernier roman.
Car c'est avant tout du sentiment amoureux dans sa version passionnelle et de la condition de la femme empêchée de vivre pleinement son histoire parce qu'elle est mariée et mère de deux enfants qu'il nous parle.
C'est au printemps, saison de la renaissance, que tout commence dans une soirée de remise de prix dont le Tout-Paris littéraire se délecte. Si l'événement se conclut comme d'habitude avec « peau de zob » pour Emma, elle se cogne à un « écrivain au visage familier » qu'elle trouve mignon comme elle le confie à son attachée de presse.
L'attirance est réciproque et rapidement consommée. Elle est au début purement physique, ces deux-là étant totalement opposés.
Antonin de Quincy d'Avricourt (pseudonyme derrière lequel se cacherait Nicolas d'Estienne d'Orves) est du genre réac. Emma le décrit comme une « créature à chevalière qui baise en écoutant du Wagner » entourée de livres de Robert Brasillach, de Benoist-Méchin et de Paul Morand, ayant droit de Lucien Rebatet dont il a encadré les lettres...
L'ironie qu'elle pratique à l'égard de sa nouvelle conquête va se tarir, car elle en pince de plus en plus pour le bellâtre aux boutons de manchette et à la chevalière ostensible. « Je n'allais quand même pas tomber amoureuse d'un connard de droite ! » s'exclame-t-elle. Eh bien oui ! Même si elle est consciente de la dissonance de leurs origines, elle n'entend pas écrire un roman sociologique bourdieusien.
Possédée par le presque quinquagénaire avec lequel elle partage non seulement des séances de jambes en l'air fougueuses mais aussi des parties de fous rires débridées, elle multiplie les allers et retours entre sa maison du Var et la capitale, délaissant sa famille à laquelle elle ment pour jouir quelques heures de son amant, en couple lui aussi.
Comme elle le rappelle pertinemment, car c'est là le cœur de sa démarche littéraire, son idée est de composer « une sorte de Fragments d'un discours amoureux » pour « décrire les étapes de la passion » sans occulter la part de souffrance qu'elle contient.
Sauf qu'Emma n'a rien d'une héroïne romantique qui attend, le mouchoir à la main, que l'objet de son cœur l'emporte sur son cheval blanc. Très lucide sur les affres de la passion amoureuse qui la rend folle et obsessionnelle, elle décrit avec un grand réalisme la vie d'une trentenaire quasi écartelée entre son quotidien de mère et d'épouse, son métier d'écrivaine et la frénésie presque fanatique qu'elle vit avec Antonin.
Le tout avec humour, un sens de l'autodérision et une sincérité émouvante et désarmante.
EXTRAITS
La passion, c'est un empoisonnement du cerveau.
Un monde où l'odeur de l'amour fou ne vous parvient qu'à travers la puanteur des emmerdements et des couches à changer.
J'ai renoncé à tout pour n'être qu'un frisson, et on ne peut pas vivre avec un frisson en permanence.
Peut-être que je suis une esclave. Mais je pense qu'il suffit que je sois.
C'est ça être heureux, c'est ça regarder au loin, c'est aimer tout ce qui n'est pas lui, grâce à lui.
http://papivore.net/litterature-francophone/critique-le-mal-joli-emma-becker-albin-michel/
Il n'y a pas encore de discussion sur ce livre
Soyez le premier à en lancer une !
"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
L'auteur se glisse en reporter discret au sein de sa propre famille pour en dresser un portrait d'une humanité forte et fragile
Au Rwanda, l'itinéraire d'une femme entre rêve d'idéal et souvenirs destructeurs
Participez et tentez votre chance pour gagner des livres !
C'est rare quand tu coches une seule étoile pour un roman... En tous cas, je me suis amusée à lire à ta chronique car on connait tous ce genre de situations : mais qu'est-ce qu'ils donc trouvé de bien dans ce livre ?... Et je n’achèterai pas l'ouvrage.... :- )
je partage tout à fait votre avis sur cette auteure!